lundi 27 décembre 2010

Citizen Kane - Orson Welles (1941)


En 1940, aux Etats Unis.

Le journaliste Thomson enquête sur la vie et la mort de Charles Kane, une personnalité rendue mystérieuse et inconnue par sa notoriété-même.

Propriétaire d'une mine d'or, la mère de Kane le confie, alors qu'il est encore enfant, à un banquier chargé de lui apprendre à gérer sa fortune future. Quand il en prend enfin possession, bien des années plus tard, il décide de l'investir dans la presse, et s'impose à la tête du journal l'Inquirer auquel il va donner plus d'ampleur en modifiant quelque peu la ligne éditoriale et en prônant la transparence.

Le succès de cette démarche lui donne alors des ailes, et, conforté par son mariage avec la nièce du président des États Unis ainsi que par sa grande fortune, il se tourne vers la carrière politique. C'est là que les choses se gâtent : il n'a pas réalisé que sa maîtresse, une chanteuse d'opéra en devenir, pouvait être une source de scandale et créer un obstacle à sa progression.

Condamné à ne jamais atteindre un haut rang politique, il lui reste quand même sa fortune et la sus-citée bonne copine à laquelle il décide de se consacrer. Elle devient sa seconde femme, et iI entend la rendre heureuse en lui payant des trucs : cours de chant, une scène à elle, un manoir dans lequel ils se retirent tous deux. Cependant, la solitude va vite se faire sentir.

Mais plus encore que sa vie, c'est sa mort qui passionne les foules : en effet, le vieux Kane finira par expirer, seul, dans son domaine qu'il a baptisé "Xanadu", en prononçant "rosebud", "bouton de rose". Pourquoi rosebud et pas autre chose? c'est ce que Thomson voudrait savoir.

Le grand puzzle

Au début de son enquête, Thomson dispose d'une masse d'informations de type journalistiques, qui relatent les événements clé de la vie de Charles Kane, la manière dont il est perçu par la population, par la presse. Ces informations, dont nous prenons connaissances dans les premières minutes du film, lui sont proposées pèle-mêle et sans interprétation, bien qu'elles soient parfois contradictoires.

Le voilà face à une sorte de grand puzzle dans toutes les pièces sont mélangées, et qu'il doit reconstituer. A lui de faire son boulot en sachant distinguer l'information de la rumeur et de la légende, pour dresser un tableau du personnage à même de le guider vers le fameux bouton de rose. Ici, faire le puzzle, c'est non seulement lier les morceaux qu'on a sous la main, mais savoir retrouver ceux qui manquent.

Pour avancer, il comprend qu'il doit s'appuyer sur des éléments autres que ceux dont il dispose déjà. Il se lance donc dans l'étude des témoignages de ceux qui ont fait partie de l'entourage de Kane, à différents moments de sa vie : le tuteur, à travers ses mémoires, un ami, la seconde femme, le majordome du manoir de Xanadu.

Au fil des flashbacks, Thomson comprendra que la force de la mutualisation des informations a néanmoins ses limites, et qu'il arrive parfois que les pièces d'un puzzle se perdent définitivement dans la nature.

01/01/2011

Bonne année 2011! :-)

samedi 25 décembre 2010

L'hérésie du mois : le Père Noël existe!

A Périgueux, du moins. Le 24 décembre, vers 11 heures, il a été vu en train de draguer deux mamies, en terrasse d'un café (rue Taillefer me semble-t-il), après s'être manifestement incrusté à leur table. Il faut bien s'occuper entre deux livraisons.

Il n'est pas tout seul dans son costume!

Contrairement à ce qu'on pourrait croire, il n'y a pas un seul Père Noël, mais toute une famille de Pères Noël qui officient chacun de leur côté, comme de bons petits individualistes. Réunis en comités régionaux, le Pôle Aquitaine des Pères Noëls tient des réunions en fin d'année histoire de faire en sorte que les papys soient bien synchros, bien répartis en secteurs, afin de ne pas les voir se marcher sur les pieds lors de la distribution. Un peu comme les gens qui mènent les opérations de recensement dans les communes. Etre Père Noël, c'est avant tout une philosophie du travail bien fait, propre et efficace.


Les réunions sont bien entendu tenues secrètes, et ont lieu dans des bars en centre ville, les vendredis soir, pour plus de discrétion. Les consommations lors de ces réunions sont entièrement financées par la revente des bonbons rackettés aux gosses le soir d'Halloween.

Pour en savoir plus, adressez-vous au Pôle Emploi; eux seuls détiennent la clé du Joué Club, et peuvent vous dire si oui ou non vous en valez la peine!

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Article de Rue 89 du 22 décembre 2010 sur le beau métier de Père Noël


Attention, ces temps-ci le Père Noël est un peu susceptible. A cause du surmenage, il lui arrive de cogner et de jeter dans une vitrine les gens qui l'embêtent. Désormais il faudrait éviter d'essayer de le soudoyer pour gratter des cadeaux à la sortie des réunions arrosées, car il pourrait mal le prendre : on ne réclame pas, mal élevé! Vous pourriez récolter plus de châtaignes que de jouets dans l'histoire.


Surtout si dans la vie, le Père Noël est un peu rugbyman, et que ce soir-là, il se trouve que, pas de bol, vous être 4 contre 15 :

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Article de Sud Ouest du 21/12/10 - Rixe entre Pères Noël du CAP et 4 mecs. Encore une histoire dont on ne saura jamais le fin mot.

J'oubliais :
JOYEUX NOËL à tous!






lundi 20 décembre 2010

Une presse sans Gutenberg - Jean-François Fogel - Bruno Patino

Après s'être intéressés à l'audience et à la rentabilité du site internet du Monde, Jean François Fogel et Bruno Patino ont réfléchi, à partir de cette expérience, à l'évolution du journalisme et aux mutations que la profession rencontre avec l'émergence d'une presse en ligne. On est alors en 2000.

Dans Une presse sans Gutenberg, les auteurs prennent le parti d'une rupture entre la presse écrite, plus généralement les médias de masse, et la presse disponible sur Internet, sans jugement de valeurs, d'ailleurs. Le métier d'un journaliste qui publie dans un quotidien en vrai papier recyclé est trop différent ce celui qui alimente la presse pas palpable, pour qu'on hésite à déclarer le changement d'ère. Le cyberespace et le monde réel sont ici deux univers distincts.



Ce changement d'ère n'est pas synonyme de mort du journalisme; avec ce média atypique qu'est Internet, une nouvelle branche de la profession s'allonge et bourgeonne rapidement et solidement.


Je ne parlerai pas de l'ouvrage en entier, intéressant d'ailleurs, mais la large place qu'il accorde à l'audience et plus particulièrement aux "lecteurs" de presse en ligne, me sert d'appui pour exprimer quelques remarques générales.

Jusqu'à la toute fin du XX°siècle, on avait d'un côté les journalistes détenteurs d'un "quatrième pouvoir", observateur critique des trois premiers (exécutif, législatif, judiciaire), et de l'autre, leur public-récepteur relativement passif : l'audience. Depuis une dizaine d'années, l'audience semble s'être "réveillée" : elle cherche l'information, la choisit, la conteste, et parfois-même la fournit. Le journaliste en tant que professionnel n'en impose plus comme au temps où on se disait « c'était vrai, on l'a vu à la télé, on l'a lu dans le journal ». A présent, tout le monde est a égalité.


Aussi, être journaliste en ligne, c'est tenir compte plus que jamais des attentes du public, pour ne pas passer à la trappe : écrire pour une lecture superficielle, dans une langue sensiblement différente de celle rencontrée ailleurs, maîtriser des indications des algorithmes qui font remonter ou non votre article sur le site internet d'actualité, en fonction du trafic des internautes, être rapide pour se faire une place parmi les liens qui bougent et s'agglomèrent à chaque seconde, en gros, obéir à de nouveaux codes. Encore un peu trop récents pour être théorisés, ils sont pourtant bien connus des journalistes, qui les ont appris sur le tas, au cours de l'évolution du web et des nouvelles pratiques des internautes..


Il n'y pas que sur les sites commerciaux qu'on va faire son marché; lorsqu'on s'informe sur le web, la démarche sensiblement est la même. Les avantages et les inconvénients sont comparables : la rapidité, le large choix et la quasi-certitude de toujours trouver quelque chose sur un sujet n'efface pas le risque d'être confronté à quelque chose qui semblait tout à fait satisfaisant à première vue, mais qui est en réalité tout pourri. Aussi, il n'est pas déplacé de dire que, sur Internet, on monte son propre journal en kit, en choisissant ses sujets d'actualité, en parcourant les liens de différentes sources, grâce à une invention magique mais un peu déboussolante : l'hypertexte*.


Alors, le journalisme en ligne, et à plus forte raison lorsqu'il permet l'interactivité et même la collaboration du public, est-ce la mise à l'honneur du citoyen? est-ce le Mal? Est-ce sérieux, crédible, ou simplement un gadget avant de passer aux choses sérieuses : allumer la télé? Tout dépend de la façon dont on perçoit l'internaute lambda, lorsqu'il surfe sur Internet. Est-ce un enfant? Un adulte? Les deux en même temps (car c'est possible!) Un irresponsable qui va mélanger toutes les sources sans faire preuve d'aucun discernement?

« Irresponsable » supposerait que la démarche est évidente et que celui qui tombe dans le panneau du hoax l'a vraiment fait exprès! Avoir une connaissance des sources, un usage raisonné des outils de recherche d'information s'apprend... Même lorsque cette difficulté nous passionne et qu'on veut se spécialiser dans sa reconnaissance, il arrive qu'on réalise qu'on a surestimé notre propre maîtrise des rouages de l'information sur Internet, qu'elle est extrêmement insuffisante, et qu'un long chemin reste encore à parcourir pour l'améliorer.

Seulement, chacun a une manière différente d'approcher l'information, chacun a sa propre expérience des sources et des démarches, tout le monde a à apprendre, mais personne n'en est au même point. Il n'y a pas un public, une audience, mais des tas et des tas. Pourtant, beaucoup ont, d'un point de vue technique, le même accès à Internet; d'où le problème, et une fausse impression d'égalité.

Ce n'est pas Internet, le web, ni même ceux qui publient l'information, qui doivent « faire peur »: c'est la place du public, acteur de sa propre information : c'est lui, en fonction de ses connaissances préalables, de sa facilité ou non à exploiter les sources, qui fera son omelette avec des oeufs clabots ou des oeux doubles, après s'être servi sur le marché de l'actualité. Et de ce point de vue-là, non, on n'est pas tous à égalité.


L'inégalité n'apparaît pas seulement à ce niveau. Jean-François Fogel et Bruno Patino le signalent bien : un journal en ligne entièrement payant, ça ne fonctionne pas. Pour être un minimum consulté, le site sera au moins en partie en libre accès. Une nouvelle fracture se crée : ceux qui peuvent payer (journaux en ligne ou papier), et ceux qui s'informent gratuitement (quotidien gratuit ou site en ligne). Plus que les titres des journaux qui révèlent une dominante politique ou un groupe de pensées et d'opinions, c'est maintenant l'accès ou non à des journaux qui déterminent de grands groupes de publics. Difficile de dire si oui ou non, on peut parler d'information à deux vitesses, car la qualité d'un contenu est moins que jamais liée à son support.



* l'hypertexte, c'est le système qui noue entre elles les pages disponibles sur Internet, à l'aide de liens; sans l'hypertexte, le web ne ressemblerait pas du tout à une toile d'araignée, on n'appellerait pas ça le web, et Internet ne servirait pas à grand chose si ce n'est à quelques tronches de l'informatique de s'échanger des dossiers top secrets (ou des blagues)! Hum.



Jean-François Fogel, Bruno Patino - Une presse sans Gutenberg, pourquoi Internet a bouleversé le journalisme. 2007 - Points

Couverture : Nick Veasey



Désolée pour ceux qui lisent depuis un tout petit écran... ;-)





vendredi 17 décembre 2010

L'Atlantide - Pierre Benoit


En attendant de pouvoir me plonger dans l'Assassin Royal 4, je suis revenue fouiller dans ma fameuse caisse de livres de la Fête de la Fraise, pour y prendre le plus petit bouquin du lot, histoire de ne pas passer des mois dessus : l'Atlantide de Pierre Benoît, 1919, Grand prix du roman de l'Académie Française. Mais surtout, 240 pages!




Le lieutenant Saint Avit, mis en fonction dans une région de l'Algérie, est en partance pour une mission stratégique dans le Sahara : il veut retrouver la trace des peuples qui ont assassiné des soldats en expédition, et comprendre leurs alliances pour mieux parer les futures attaques. Pour cela, il doit faire un détour dans le massif du Hoggar, un coin mal famé du désert.

Bienvenue dans les toutes dernières années du XIX°siècle, belle époque des colonies. Préparez vous à entendre parler d'"indigènes", de méchants "sauvages" et de "nègres" calculateurs avec une beaucoup de candeur, du premier au dernier chapitre!

La veille de son départ, il apprend qu'on va lui coller un compagnon de voyage : le capitaine Morhange, un érudit dont les motivations scientifiques emploient les mêmes routes que celles du lieutenant, même si elles sont très différentes.

Au cours du voyage, Saint Avit et son invité de dernière minute se retrouvent prisonniers d'une cité inconnue, au beau milieu du désert. Cette cité n'est autre que l'Atlantide évoquée dans le Critias de Platon. Elle est gouvernée par une reine, Antinea, une demi-déesse descendante de Neptune, qui se plaît à capter des voyageurs qui entrent dans son champ de vision, afin de les séduire, de les larguer pour qu'ils meurent de désespoir, avant de les faire embaumer.

Saint Avit se résigne assez facilement en se disant que de toute façon, il est impossible de s'enfuir, et qu'après tout, il y a plus vilaine mort que celle qui survient après avoir été le favori temporaire de l'irrésistible Antinéa. Morhange semble curieusement indifférent à la reine, trop heureux d'avoir retrouvé dans cette cité la pièce manquante du Critias inachevé.

Pierre Benoît - L'Atlantide - 1919 - Albin Michel
Couverture : Livre de Poche

Disponible en e-book : Project Gutenberg


mercredi 15 décembre 2010

Une nouvelle copine, Josette la boîte!

Elle a la classe, elle est pratique, discrète, elle sent bon le thé à la pomme, et elle va sans doute briser le cœur de beaucoup de thermos dans sa vie, que nous lui souhaitons longue et pleine d'aventures : j'ai l'honneur de vous présenter :

Josette!




super idée, vraiment!! ;-D

samedi 11 décembre 2010

A Serious Man - Ethan et Joel Coen - 2009


Direction le Middle West des États Unis, à la fin des années 60. Larry, prof de physique à l'université, va bientôt être titularisé. Il vit dans un lotissement avec sa femme Judith, ses deux enfants, Danny et Sarah, et son frère Arthur qu'il dépanne le temps qu'il se trouve un appart. Sa préoccupation du moment : faire en sorte que la bar mitzvah de son fils soit réussie.


Dans la vie, il essaie de tout faire pour rester aimable, droit et arrangeant avec tout le monde. Arrangeant mais néanmoins incorruptible, car lorsqu'un étudiant lui propose quelques billets contre une meilleurs note, il refuse catégoriquement le pot de vin. Il ne fume pas, contrairement à son médecin; et quand il lui arrive de rêver de sa voisine, elle n'est même pas à poil : Larry est un homme sérieux!


A quinze jours du grand événement familial, ce n'est pas une tuile, ni deux tuiles, mais un toit entier qui lui tombe brusquement sur la tête : Judith demande le divorce, car elle souhaite se remarier avec un ami de la famille, Sy Ableman, un récent veuf, tout vieux et si moche que n'importe que mari aurait les boules. Berk. Bien entendu, elle a pris soin de vider le compte en banque de Larry avant de lui annoncer la nouvelle.


Passent encore les soirées gaspillées à orienter l'antenne d'une télé capricieuse, passe encore le fait que Danny fume du shit dans les toilettes de l'école hébraïque, qu'Arthur peine à décoller du canapé, que le voisin s'approprie leur pelouse le plus tranquillement du monde, ainsi que toutes les contrariétés de la vie quotidienne des gens embourbés dans leur difficulté à dire non; mais lorsque Sy et Judith lui demandent de déménager, afin que "la vie des enfants ne soit pas perturbée par leurs problèmes", allant jusqu'à lui suggérer un hôtel pas cher, il commence à se poser des questions existentielles : pourquoi le sort s'acharne-t-il ? pourquoi lui? pourquoi maintenant? pourquoi s'efforcer de bien agir si c'est pour en baver deux fois plus? Lui qui se remet facilement en question, qui passe son temps à trouver des excuses et des raisons à la décision de sa femme, crie maintenant à l'injustice. Ne sachant où trouver les réponses, il se tourne successivement vers trois rabbins : peut-être Dieu veut-il lui dire quelque chose en l'éprouvant ainsi?


Seulement, même lorsque vous voyez plusieurs années de votre vie s'effriter en quelques jours, grâce à l'aimable contribution de la poisse et de votre entourage, vous devez non seulement accepter ce qui vous arrive, mais aussi vous résoudre à ne jamais comprendre pourquoi cela vous arrive. A vous d'intégrer l'idée que rien n'est logique, rien n'a de sens, et que vous aurez beau vous débattre, ça ne changera rien, car, comme dit le jeune rabbin du film, "this is life!". Avec un peu de chance, c'est au moment où vous renoncerez à chercher un sens à votre vie, que vous en trouverez peut-être un! Ou pas!

Ah oui, au fait, c'est une comédie!

Si si …

Je pense que je vais souvent revenir sur ce film, et en parler plus précisément, parce que je peux le dire maintenant que je l'ai vu 4 fois : c'est le film qui est en phase de détrôner Elephant!! voilà pourquoi je n'en parle pas plus et pas mieux pour l'instant.. A suivre!

samedi 4 décembre 2010

L'assassin royal - 3 - La Nef du crépuscule - Robin Hobb



Il arrive parfois, dans un combat de longue durée, qu'on se rende compte qu'on a sous-estimé son adversaire. Il n'y a dès lors pas d'autres solutions que ruser pour arriver à ses fins, et mettre de côté tout ce qui rendait l'affrontement un tant soit peu régulier. Dans le tome 3 de l'Assassin Royal, Vérité, le roi servant de Castelcerf, fait l'expérience de la dure réalité. Repousser les navires ennemis depuis un donjon, par la télépathie, ne sert plus qu'à l'épuiser et à le faire passer pour un couard qui préfère rester reclus plutôt que se battre à l'épée. Le soir venu, il n'est même plus opérationnel pour donner un héritier au royaume, et sa femme Kettricken est bien marrie d'avoir quitté ses Montagnes pour une loque de prince qu'elle ne voit jamais.
A propos de loque, le vieux roi Subtil, sans cesse alité, meurt à petit feu, à moitié de vieillesse, à moitié étouffé par les herbes que son fourbe serviteur Murfès fait griller dans sa chambre. Soi-disant pour couvrir les odeurs fétides qui flottent autour du souverain sur le retour. Soi-disant.
Qu'est-ce qu'on fait, quand tout va mal, qu'on ne voit plus le bout du tunnel, quand notre survie est en jeu? On prie, parce qu'on ne sait jamais, après tout! La religion a ceci en commun à l'homéopathie, qu'à défaut de faire du bien, elle ne peut pas faire de mal. Pas question de Dieu dans ces contrées, mais des Anciens, c’est-à-dire, les esprits des rois fondateurs du territoire des Six Duchés, qu'on ne peut implorer que si l'on fait le déplacement au-delà du royaume des Montagnes. Vérité est bien décidé à entreprendre un voyage aussi long et périlleux qu'il peut paraitre farfelu : il prendra d'ailleurs parti de cacher son dessein au peuple et de prétexter une visite à son beau-père le roi Eyod, dans le but de sceller une alliance stratégique.
Fitz ne prie pas, car il baise : c'est sa thérapie perso, et le dernier exutoire lui permettant de snober la décision de son oncle. Comme si des fantômes allaient repousser les Pirates Rouges des côtes! Pendant l'absence de Vérité, il sera chargé de veiller sur la reine Kettricken. Elle en aura grand besoin; le prince Royal ne cache pas sa joie lorsque, le frère parti et le père dans le gaz, il se retrouve seul aux commandes du château : c'est la fête! Le voilà qui invite tous les ducs de ses amis, pour éventrer les réserves du château à coups de banquets et de soirées mondaines. Peu à peu, son désir de déplacer la cour dans un autre coin du royaume, pour faire de Castelcerf une sorte de garage à mulets et de prison pour les gens qu'il ne peut pas sentir, se dessine.
La troisième partie de l'Assassin Royal prend une dimension psychologique qu'on n'attendait pas forcément, vu que la seconde se terminait sur un cours de maniement de la hâche, et sur la perspective de fumeuses bastons navales. Ici il n'y aura qu'arrière pensées, trahisons, alliances, paroles non dites, paroles dites mais pas pensées, choses vues, non vues, mais qui auraient du l'être. De la vraie cervelle humaine, avec de bon gros morceaux de connerie dedans. Trop bon!

La cour de Castelcerf devient une grande boite à double fond, où les personnages secondaires grouillent et tirent les ficelles : Umbre, le maître empoisonneur, trame quelques décoctions pour ceux qui ignorent jusqu'à son existence. La petite Romarin, servante de Kettricken, est trop jeune pour être innocente. Quant au héros, plus que jamais à mi-chemin du trône et des écuries, il va très vite avoir le loisir d'apprécier toutes les facettes de la personnalité de Royal. Le fou dit sans dire, aide sans aider, mais reste fidèle à lui-même et au mystère qui l'entoure : vivement qu'on en sache plus sur lui!

Robin Hobb. La Nef du Crépuscule - L'assassin Royal 3. 1996
Couverture : édition France Loisirs, "Piment". Illustration : Kopik

jeudi 25 novembre 2010

Ombres


Pas besoin d'avoir la clé, la serrure suffit!

mercredi 17 novembre 2010

Comme quoi, ça existe...

...
les sucettes en chocolat !!!
Que dire sinon que c'est ENORME!!!!

dimanche 14 novembre 2010

L'hérésie du mois : La tour de Vésone

Bientôt, tout le monde va me dire : "Ohhh méchante bâtisseuse d'autoroutes et d'immeubles sans charme, tu n'as donc aucun goût, aucun respect du passé, des croyances de nos ancêtres gallo-romains pétrocores, de notre patrimoine!" Je sais que je vais me mettre quelques périgourdins à dos, mais tant pis, j'ose. Il est temps de faire fi de la politesse, de crier haut et fort ce que je n'ai jamais osé dire à personne depuis que j'ai 5 ans :

Je n'aime pas la tour de Vésone, je la trouve MOCHE!! Quand je vois la monumentale imposture qu'est cette cheminée géante à moitié effondrée, qui ne m'évoque rien d'autre qu'un lapin en chocolat sauvagement bouffé, j'ai envie de raser le peu caillasse qui fait semblant de tenir debout !!

Voilà, ça va mieux.

Elle est tellement mal placée qu'on ne peut ni la rater, ni s'en servir de point de repère ou de lieu de rendez-vous. Je ne sais pas pourquoi j'ai une telle aversion pour cet ancien temple de la divinité locale, mais la première fois que je l'ai vue, je me suis dit "berk" en lorgnant à peine une grande photo qui la représentait. Pourtant, j'aime bien me promener dans le Jardin des arènes, dont les ruines sont aussi fringantes que les molaires émoussées d'un vieux chien, et aux alentours de la Porte Normande. Avec des camarades de classe, nous avions même centré notre projet de TPE sur le musée Vésunna, qui venait d'ouvrir ses portes, et je m'étais vraiment éclatée.

Mais vénérer la tour de Vésone, c'est trop me demander. Même en essayant de m'intéresser à son histoire à travers les siècles, qui est sans doute riche et intense vu son état, j'aurai toujours une irrépressible envie de la casser ...


(Photo du site l'Internaute)

vendredi 12 novembre 2010

Etre un magicien dans une société magicophobe : Merlin, la série (2008)


En faisant ma recherche sur Merlin Merlot, l'autre jour, j'ai découvert qu'il existait depuis 2008 une série consacrée à Merlin, l'enchanteur cette fois-ci :


Mais mais mais... c'est quand même pas lui, Merlin! Eh bien si! Dans cette version de la légende, Merlin, jeune paysan doté de pouvoirs surnaturels, évolue tant bien que mal dans une société où la magie est très mal vue. Comme il devient de plus en plus difficile de cacher sa particularité, sa mère le pousse à quitter son village et le recommande au vieux Gaius, le médecin de la cour de Camelot. Officiellement, il doit devenir son « homme de peine », chargé d'aller chercher dans la forêt des plantes rares nécessaires aux décoctions. Officieusement, il vient apprendre à utiliser ses pouvoirs magiques pour protéger un royaume menacé de toutes parts, et pour constituer la garde rapprochée d'Arthur, le fils unique du roi Uther Pandragon. Au cours des 13 épisodes de la première saison, Merlin et Arthur vont notamment avoir affaire à un tournoi truqué, à une épidémie, à une famine, à une allumeuse mal intentionnée, et à des créatures qu'on croirait venues de nulle part, mais qui sont issues de la caverne de Nimueh, une méchante sorcière qui n'aime personne. Gnark gnark gnark. Tout un programme!


Magicophobie ambiante.

Dès l'arrivée du jeune Merlin à la cour, le ton est donné : on s'apprête à couper la tête d'un sorcier sous les fenêtres du donjon – si l'on peut dire, car le château de Pierrefonds (Oise) où a été tournée la série, n'est pas vraiment une forteresse du XII° siècle. Tant mieux, c'est plus joli.

En effet, le roi Uther Pandragon est un type assez borné dans son genre. Sous prétexte qu'il a eu quelques démêlés avec des magiciens dans sa jeunesse, et qu'une sorcière a provoqué la mort de sa femme à la naissance d'Arthur, il «devient sourd à toute réflexion» lorsqu'il est question de faits irrationnels. La magie, c'est le mal, voilà tout! Il suffit d'être soupçonné de l'avoir peut-être un peu expérimentée pour se faire gicler sur le champ : simple mesure préventive! Autant dire que pour Merlin, la galère ne fait que commencer; souvent tenté de faire son CO de magicien, il jouera la carte de la prudence et prendra le parti de garder la tête sur les épaules. Logique...

Sorcellerie, magie, c'est interdit, mais tout le monde en fait un peu dans son coin : Merlin, Gaius, quelques druides de passage, sans oublier Morgan, la pupille du roi Uther Pandragon, et ... cousine du prince Arthur.

La légende revisitée

Oui, dans cette série, Morgan est la nièce d'Uther Pandragon. La nuit, c'est une jeune femme souvent prise de cauchemars. La journée, en compagnie de sa servante Guenièvre (!), elle s'occupe à asticoter son cousin Arthur, qui lui-même a visiblement le même âge que Merlin. La grande originalité de la série est d'avoir voulu jouer avec le statut des personnages. Les clichés s'effondrent dans un nuage de poussière sombre, comme une vieille sorcière anéantie, et il faut faire table rase de toutes les attentes qu'on peut avoir de ces personnages mythiques. Vous vouliez un Arthur loyal et courageux? Vous aurez un petit con prétentieux tueur de licornes. Guenièvre, une princesse qu'on courtise? Non, la fille de forgeron, à qui on ne confie d'autre responsabilité que d'aller chercher de l'eau au puits. Merlin, un sage magicien à barbe blanche? Non, c'est plutôt un pauvre gars assimilé à un fou. Néanmoins, tout le monde s'accorde à dire qu'ils est bien brave.

« Regdane anvilde gafélueque!! Regdane anvile gafélueque!! Eh, ça marche!!!»

Merlin est sans doute ce qu'on pourrait appeler un anti-héros. Dans l'ombre d'un chevalier reluisant de partout, il nous paraît moche et faible, avec ces cheveux noirs-corbeau et ses grandes oreilles. Alors, on pourrait se dire, oui, mais, il est gentil, et puis il est intelligent. C'est vrai, il a du coeur, par contre on sent que son intelligence a encore une marge de progression... S'il se sert de ses pouvoirs, c'est pour faire l'imbécile, accumuler les boulettes, tenter de se débarrasser de ses corvées, fabriquer de faux titres de noblesses pour son pote Lancelot... Évidemment, quand on lui demande d'employer sa magie à une cause précise, il n'en a plus envie! Ou alors, il ne sait pas comment s'y prendre, car il ne maîtrise pas encore toute sa palette de possibilités.

Personne ne se doute qu'il est capable de sortir du pétrin un royaume tout entier, en prononçant une pauvre formule. Aussi, son aide n'est jamais reconnue à sa vraie valeur. Comme il est gentil, il s'en moque : "l'important est que le bien triomphe!" Enfin, c'est vite dit, il aimerait bien un petit merci de temps en temps. A signaler que Merlin a aussi une vague tendance à prendre la mouche.

Manque de suspense.

Tout cela est très intéressant, mais malheureusement, la série manque cruellement de suspense. Même moi qui suis complètement larguée niveau séries télé, j'arrive à savoir à peut près tout ce qui va se passer dans l'épisode, au bout de quelques minutes, même lorsque l'action est entraînante. Quel peut bien être l'intérêt de mettre en scène une tentative d'empoisonnement mortel le héros dès le 4ème épisode? On s'en doute, que ce n'est pas encore son heure! Quant aux dialogues, dans la VF en tous cas, il leur arrive de sonner creux...

Petit exemple :

Episode 2

Merlin : Ne combattez pas Valiant dans la finale de demain. Il utilisera le bouclier (ensorcelé!) contre vous.

Arthur : Je sais.

Merlin : Alors, renoncez! Vous devez renoncer!

Arthur : Tu ne comprends donc pas! Je ne peux pas renoncer! Les gens s'attendent à ce que leur prince combatte, comment les conduire à la bataille s'ils croient que je suis un lâche??

Merlin : Valiant va vous tuer, combattre c'est mourir!

Arthur : Alors je mourrai!
Merlin : Comment pouvez-vous aller au devant d'une mort certaine?

Arthur : Parce que je le dois.
(silence 4-5 secondes) C'est mon devoir.
Petite musique triste, Merlin s'en va.


C'est assez drôle.
Je vous entends d'ici :

Mais alors, pourquoi tu regardes, patate!?

Pour Guenièvre!

Si la Guenièvre de Chrétien de Troyes avait été semblable à celle-là, l'industrie de la charrette aurait explosé à Camelot.

Dans cette saison, c'est elle qui a le rôle du personnage vivant. Oui, la servante de la pseudo-rebelle Morgan est extrêmement b... sympathique, bien qu'atteinte d'une insolente niaiserie, mais c'est le lot de tous les personnages féminins au Moyen Age : « Lancelot, je n'ai encore jamais rencontré quelqu'un comme vous, ne partez pas je vous en prie!! »


Plus sérieusement : d'un point de vue esthétique, Merlin est une série superbe à regarder. Les images se prêtent d'autant plus à la rêverie qu'il ne pleut jamais sur Camelot, sauf en cas d'imminente sorcellerie. Tout est très propre, on n'y verra pas plus de sang que de pluie, malgré l'acharnement des combats. Ah si, Gaius saigne le doigt de Merlin dans le 4ème épisode, mais ça s'arrête là.

J'ai lu un peu partout que les effets spéciaux, utilisés pour la mise en scène du féroce bestiaire, étaient tout pourris. Comme je n'y connais absolument rien et que je ne suis pas fan, ça ne me choque pas, au contraire, j'ai bien trouvé les mygales géantes et les cafards possédés tout à fait crédibles. Quant aux serpents carnassiers issus du bouclier magique de Valiant (épisode 2), ils sont aussi dégueulasses que des vrais!


Merlin -Julian Jones, Jake Michie, Johnny Capps, Julian Murphy
Diffusion : BBC One
2008


lundi 8 novembre 2010

Non, je n'oublierai pas.


Enfin, pas pour l'instant...

Il y en a qui "voudraient être un chat", moi j'aimerais être une jolie poule pondeuse. Vivre deux ou trois ans dans l'ignorance du futur, pondre un oeuf tous les jours sans me poser de question, chasser mes poux en me roulant dans la poussière et me lisser la plume à l'ombre des lilas, avec mes copines, les après midis d'été.

Je perdrais mes plumes à l'automne, de nouvelles perceraient ma peau dans une vague douleur, c'est vrai, mais j'affronterais l'hiver vêtue d'une robe soyeuse et chaude.
Je serais une fière poule rousse au bec jaune et au poitrail tirant vers le grenat, au caractère sanguin. D'un œil jaune et noisette, j'imposerai le respect aux plus jeunes que moi et j'ouvrirai mes ailes puissantes pour regagner mon perchoir.

Les poules ne sont pas tendres, entre elles : certaines recherchent clairement le conflit et le trouvent avec une habileté perverse! Cependant leurs querelles sont aussi violentes que brèves. Elles n'hésitent pas à étourdir la plus faible d'un coup de patte, mais elles ne vous disent jamais "oublie-moi".

Non, je ne suis pas bourrée!

Je suis un peu triste, voilà tout! Un peu folle aussi, paraît-il, mais hélââââs pas complètement... sinon je ne serais pas triste!




lundi 1 novembre 2010

Cassage Gratuit : aujourd'hui, Halloween


Allez, maintenant que la date d'Halloween est derrière nous, on peut bien balancer un peu, sans passer pour des rabat-joie!
Non, il n'est pas question de faire le procès de la citrouille lumineuse, mais plutôt de se pencher sur les conduites particulières que véhiculent cette fête devenue incontournable pour tous les amateurs de bonbecs et de déguisements. En effet, la coutume propre au dernier jour d'octobre veut que des gosses s'habillent en petits montres qu'ils sont déjà, et qu'ils aillent ainsi sonner chez tous leurs voisins, afin que ceux-ci leur donnent des friandises.

Concrètement, c'est assez amusant pour tout le monde. Cette année, les enfants des alentours ont mis tout leur cœur dans des costumes de sorcières, de squelettes, d'Arlequin (?), et de fantômes. D'ailleurs, j'ai été surprise de les voir arriver par demi-douzaines, en plusieurs vagues : purée, je ne pensais pas avoir tant de marmots dans mon voisinage! Ils ont manifesté leur véhémence et m'ont menacée d'un sort inexistant, lorsque je leur ai dit que je n'avais qu'un paquet de Air Waves menthe réglisse sous la main; par chance, ils n'ont pas craché sur les Palmitos que je leur ai proposés, à tout hasard. Ouf, sauvée! Les voilà partis, deux d'entre eux sont déjà mis à cogner éperdument sur la porte d'entrée de ma vieille voisine partie en maison de retraite depuis quelques temps déjà.

Bon, dans l'idéal j'aurais du leur proposer des fruits, leur dérouler un topo sur Manger Bouger, mais... le mal est déjà fait, puisqu'ils ont parfaitement intégré l'idée qu'on puisse sous-tirer des biens et des avantages auprès de ses semblables, en utilisant la menace, en faisant peur! D'accord, ils ne font pas du tout peur et leurs menaces encore moins. D'accord, ils auraient appris d'une autre manière, un jour ou l'autre, que le monde fonctionne effectivement ainsi! Mais quand même, il y a quelque chose de dérangeant quand ce sont des gosses qui perpétuent, si jeunes, ces lois humaines!



J'avoue que j'ai aussi un peu envie d'être chiante, car, honnêtement, il y a bien pire qu'Halloween pour exciter la bestialité de chaque être humain. Par exemple, chez nous, pendant Carnaval, nous avons l'habitude de cramer un mec. Pas un vrai, quand même,(ça viendra peut-être!) mais plutôt un grand pantin en carton qu'on appelle Pétassou, et qu'on s'efforce de faire ressembler à quelque chose pendant des semaines, pour finalement en faire ce qu'on en fait...
Pas de panique! Il y a une explication tout à fait censée à tant de barbarie.

Malheureusement, d'un point de vue historique, je ne suis pas très calée sur le sujet, mais pour résumer, Pétassou est considéré comme le cousin occitan d'Arlequin. Grande figure du folklore, il a pour particularité de s'habiller av
ec des lambeaux de tissus cousus entre eux, ce qui donne fortement envie de le poursuivre avec un briquet, il faut bien l'admettre. Il a quand même une allure beaucoup moins élégante qu'Arlequin, cette grande asperge colorée dont le look se situe au croisement du vitrail et de la folle. Comme si cela ne suffisait pas, Pétassou (ou Pétaçon, selon les localités) se voit aussi affublé d'une réputation démoniaque; c'est pourquoi, à Carnaval, il est de bon ton de lui organiser un procès bidon, pendant lequel on l'accuse de tous les malheurs survenus dans la contrée, au cours de l'année.


Comme aurait pu le dire Bernard Laporte, "We have Pétassou, you have Arlequin!"

Dans mon village, il n'y a de cela pas si longtemps, le jugement de Pétassou était un grand spectacle où toute l'école était conviée. Le bonhomme au sourire figé était transporté au milieu du terrain de foot municipal; on lisait sa sentence soigneusement préparée par les élèves d'une des classes, et, après l'avoir rendu responsable de la grève des routiers, après l'avoir accusé de la chute de cheveux de Ducon et de l'élimination des Girondins de la coupe de l'UEFA, on lui foutait le feu aux miches dans la joie et la bonne humeur. Nous le regardions cramer et fondre jusqu'à ce qu'il s'effondre. Personnellement, j'adorais le moment où il noircissait de partout, et où des particules de carton se mettaient à voleter autour de lui. Pourtant, on n'avait rien fait de mieux qu'accuser sans preuve et condamner sans tenir compte de la présomption d'innocence, et ce, sans y réfléchir une seule seconde!!

Comment ça, j'exagère? Oui, sans doute, mais reconnaissons que la violence ne se limite pas à celle qu'on diffuse à la télé, dans les jeux vidéos, sur Internet. Elle est présente dans notre vie quotidienne, et jusque dans nos respectables traditions!

A part ça, j'aime bien Halloween!

Plein d'infos historiques à propos de Pétassou, Arlequin, et leurs copains sur le site Lettres d'Archipel!

jeudi 28 octobre 2010

Belle vue, n'est-ce pas?


Vivement le jour où je me réveillerai ailleurs, la tête lourde comme une enclume, en me demandant si tout cela n'était rien d'autre qu'un vague cauchemar!

mardi 26 octobre 2010

Merlin Merlot, du Père Castor à Archive.org


Alors que je réfléchissais à la dimension intéressée, que prennent inévitablement les liens sociaux au bout d'un certain temps, je me suis souvenue vaguement d'une histoire du Père Castor. Comme chacun sait, le Père Castor est toujours de très bon conseil, bien qu'il laisse ses trois stupides petits enfants jouer au bord de l'eau s
ans surveillance. Bref, il faut croire que ce conte entendu une seule fois a su se faire une place confortable dans ma cervelle, pour ressortir de façon aussi impromptue après tant d'années, et j'ai eu envie d'en retrouver la trame. Mais je ne disposais que de peu d'éléments, et n'avais dans ma tête que les images, sans pouvoir y associer de mots.



"Bon, les gosses, poussez-vous! vous me pompez l'air, à force!"

Réfléchissons. Le Père Castor est bien brave, mais il n'invente rien. Il met en scène des histoires populaires et des contes des temps anciens afin que les petits enfants puissent en tirer une morale. Je ne devrai pas me sentir frustrée ou bloquée dans mes recherches si je me rends compte que
toutes les histoires du Père Castor ne sont pas piratées de partout, mises en lignes sur Youtube par tranches de 10 minutes, doublées en suédois et sous-titrées en espagnol, grâce à l'aimable contribution de 140 utilisateurs différents. Ce qui est effectivement le cas : il faudra se contenter du générique. Dailymotion est plus causant : quelques épisodes sont disponibles en streaming, dont celui de la galette roulante qui, à force de faire sa belle, finit dans le gosier d'un renard. Mais pas celui que je cherche. Comment faire? Interrogeons notre mémoire.

L'histoire se passe au Moyen Age. Il y a de la neige partout. Le héros, un pauvre bûcheron, se lamente de passer sa vie à couper du bois, ce qui par ailleurs est un peu le principe du bûcheron : sans doute n'a-t-il pas choisi son métier. Un soir, alors qu'il chouine particulièrement fort, un magicien vient le consoler. Il lui dit quelque chose comme : « si tu me promets de faire le bien
autour de toi, je te fais devenir riche dès maintenant, en t'indiquant l'emplacement d'un trésor. Mais dans un an jour pour jour, il faudra que tu reviennes ici-même pour rendre compte de toutes tes bonnes actions et montrer que tu as tenu ta promesse. »

Ah, je me souviens aussi de quelque chose qui m'avait surprise : le magic
ien se nommait Merlin, mais n'était pas le célèbre enchanteur. Indice de taille! Merlin pourrait très bien figurer dans le titre de l'épisode (ou de l'album!) du Père Castor. Le Père Castor a-t-il un site web? Non...*** Mais il fait l'objet d'une fiche complète sur le site Planète Jeunesse, où tous les épisodes sont listés, dont un : « Merlin Merlot »! Nous tenons notre homme!


Il est temps de passer au choses sérieuses et de parcourir la toile en faisant un un usage raisonné du moteur de recherche Yahoo!. Je m'attaque directement à la recherche avancée, et j'indique « Merlin Merlot » dans le champ « tous les mots », en précisant que ces deux mots devront se trouver dans le titre des pages web proposées en résultat, lesquelles devront également contenir le mot « bûcheron ». Pour éviter les parasites, je prends quelques mesures de précaution; j'élimine toutes les pages, qui, même si elles répondent aux critères sus-cités, ont la malchance de compter les mots suivants : « enchanteur », « outillage » ... « hélicoptère » ... et puis « bicarbonate » aussi, parce qu'on n'est jamais trop prudent. Je limite l'expédition du robot aux noms de domaines finissant par .fr. Après avoir filtré les éventuels résultats à caractère pornographique, je prends soin de sélectionner quelques langues de prédilection pour ne pas être noyée parmi les liens slovènes. Il va sans dire que pendant que je formule ma requête, le métamoteur Copernic Agent est parti à la recherche de l'expression exacte « Merlin Merlot », et qu'il est en train de me retourner Lycos et AltaVista comme des crêpes.

Non, je déconne. J'ai ouvert Google, j'ai tapé
Merlin Merlot (sans guillemets!), et j'ai cliqué sur le premier lien, qui n'est pas un article de Wikipédia, mais un document Word contenant une traduction du texte original de Merlin Merlot, Du vilain qui devient riche et puis pauvre. Il est hébergé sur le site personnel d'un prof qui suggère à ses collègues des textes médiévaux exploitables en classe de 5°, libres de droits. Pas si mal, pour avoir tapé deux pauvres mots n'importe comment.

Le bûcheron avait une femme et deux enfants. Il avait donc plus de mal à joindre les deux bouts que son voisin, dont la vie se résumait aussi à couper du bois et à essayer de le vendre, mais qui n'avait pas de progéniture. Le jour où Merlin vint lui indiquer l'e
mplacement d'un trésor enfoui, en échange d'une conduite exemplaire pour l'année à venir, il n'avait absolument rien vendu et se préparait déjà à se faire engueuler par sa femme.

Il accepte donc le marché sans se faire prier; après bien des courbettes, des prosternations, il court annoncer la bonne nouvelle à sa famille, qui interprète d'abord son euphorie comme un léger foutage de gueule, jusqu'à ce que le trésor soit bel et bien déterré.
C'est la fête : aussitôt, le bûcheron balance la hache, s'achète une maison, des terres, des amis, et profite à fond. Un an plus tard, n'oubliant pas son bienfaiteur, il se présente au lieu-même de leur rencontre, et .. s'aperçoit qu'il n'a rien fait de particulièrement charitable ou autre, mais après tout il n'a rien fait de mal non plus. «As-tu ce dont tu as besoin?» Lui demande Merlin. «Oui; mais tant que vous êtes là, j'aimerais bien monter en grade et avoir plus de pouvoir; ce serait le pied» «Ok, répond Merlin, en attendant, rentre chez toi, fais le bien autour de toi, et reviens dans un an jour pour jour, pour en rendre compte.» Faciiile!

Merlin Merlot serait donc un fabliau; au Moyen Age, ces petits récits amusants écrits en vers étaient répandus; on les situe aux XII° et XIII° siècle. Si je lance une nouvelle recherche en prenant en compte ces nouveaux paramètres, j'obtiens d'autres résultats; dont une page de The Internet Archive. Depuis 1996, ce projet de « bibliothèque numérique » permet à tous de découvrir ou étudier des documents historiques, même si, en réalité, il s'adresse plus particulièrement aux historiens, aux chercheurs. Aujourd'hui, Internet Archive a pu développer de nouvelles fonctionnalités (archivage de pages web, fichiers sons, images), mais le site conserve son objectif premier : faciliter l'accès au savoir. Toujours est-il que dans l'Open Library du site, en feuilletant le tome 5 des Fabliaux ou Contes, Fables et Romans du 12° et 13° siècle, traduits ou extraits, conservé à la bibliothèque de l'Université de Toronto, j'arrive enfin à «Merlin». Encore une traduction, certes, mais elle fera l'affaire.


Oui, je sais, on voit rien



Devenu puissant, le bûcheron prit franchement le melon. Il se mit à snober son voisin, ce pauvre type sans ambition qui coupait du bois à longueur de journées, mais ne s'attacha pas à être vertueux, comme il l'avait promis : après tout, n'avait-il pas assez souffert comme cela? La date de sa visite annuelle à Merlin Merlot s'approchait et il avait du mal à cacher sa flemme d'aller le voir.

Or, il se souvint que le magicien avait quelques pouvoirs et que cette entrevue était une nouvelle opportunité de gratter des avantages.
« As-tu encore besoin de quelque chose? Demanda Merlin _ Oui, je veux que ma fille se marie avec le prévôt voisin et que mon fils soit évêque. _ Ok, fit le magicien, en espérant que son indulgence aurait un impact positif sur ses actes de l'année à suivre, reviens dans un an, ici-même, comme d'habitude».

Autant donner de la confiture aux cochons! Le bûcheron devint de plus en plus hautain, et, s'il se présenta effectivement au rendez-vous fixé à la date convenue, l'année suivante, ce ne fut que pour annoncer à Merlin que cette entrevue l'agaçait et qu'il n'était plus question qu'il vienne se les geler au milieu d'un bois en plein hiver, simplement pour le remercier. Il n'avait plus besoin de rien, et se passerait désormais de ses services.

Pas une seule seconde, il ne s'est dit que si Merlin en avait eu assez dans le chapeau pour lui venir en aide, il avait sans doute les moyens de le détruire : quelques jours plus tard, les enfants du bûcheron moururent, il perdit toutes ses alliances et ses pouvoirs, se fit jeter de ses terres, et dut reprendre sa hache pour survivre.

Au XXI° siècle, les bûcherons et les apprentis Merlin Merlot continuent de se croiser, inlassablement. Entre ceux dont la chance raccourcit la mémoire, et ceux qui indiquent les trésors enfouis sans se soucier de savoir s'ils récupèreront ou non leur pourcentage, à qui la faute? A tout le monde. Comme la relecture de cette histoire m'a fait passer un très bon moment, la morale du jour sera la suivante : un ami est quelqu'un dont l'absence-même vous sert à quelque chose! Eh oui, l'utilité, on y revient toujours...

Je dédie ce billet à notre regretté Paul le Poulpe!


*** Mise à jour du 27/03/11 : contrairement à ce qui a été annoncé, il existe bien un site dédié au Père Castor. Mais le lien ne fonctionne pas, actuellement.

dimanche 24 octobre 2010

Chasser le lapin de Nabaztag.




C'est tellement plus facile à dessiner qu'un vrai lapin...

samedi 9 octobre 2010

Notre prison est un royaume - Gilbert Cesbron -

Chaque année, à la fin du printemps, la petite ville de Vergt célèbre sa spécialité locale : la fraise. A défaut d'être assez médiatisée pour se voir attribuer une réputation de carrefour international des femmes enceintes, la fête de la Fraise et des Fleurs est cependant un grand rendez-vous départemental. Elle donne lieu à un imposant marché de produits dérivés de la fraise, à un concours de danse et de chansons occitanes, et à une brocante peuplée de promeneurs endimanchés de leur costume périgourdin traditionnel, et de leurs lourds sabots (respect!).

Depuis deux ans cependant, la Fête de la Fraise, qui représentait une sortie familiale incontournable, est devenue un sujet quasi tabou; cela fait maintenant partie des choses dont on ne parle pas. Le lendemain de l'événement fatidique, lorsqu'un gros plan sur LA tarte aux fraises géante ouvre l'édition Périgords du journal de France 3, personne n'ose franchement fixer l'écran.


C'est lors de la fameuse brocante que la magie de la fête de la Fraise est devenue un orage de grêle pourfendeur de familles. En effet, ma mère et moi avons un coup de cœur pour une grande caisse pleine de vieux livres, et plus encore pour le prix de vente de l'ensemble (1euro). Or, cela impliquait que, en supposant que nous craquions pour de bon, quelqu'un porte la caisse. N'étant pas de taille, nous prîmes la décision de la porter à deux. Le tableau s'annonçait ridicule, d'autant plus que nous avions toute une rue à remonter jusqu'au parking, mais nous, les Femmes, nous savons sacrifier notre image pour la bonne cause. Hum.

« Mais, qu'est-ce que vous allez en faire? »

Ce doit être la question que les brocanteurs doivent entendre le plus souvent au cours leur vie, à force de voir défiler les acheteurs indécis. En l'occurrence elle était posée par mon père.

« Vous n'avez pas assez de bouquins comme ça? Là dedans, il y en a peut-être que vous avez déjà! Où est-ce que vous allez les mettre?»

Oui, bon, parmi les San Antonio, les guides de la ville de Paris dans les années 60, il y a effectivement une ou deux vieilles connaissances, comme
Le Diable au Corps, ou Cyrano de Bergerac, mais ils font partie de ceux qu'on ne regrette jamais d'avoir en double. Il serait intéressant de savoir quel a été le chemin de ces vieilles pages vermoulues, de leur impression jusqu'à nos jours...

Le vendeur aimerait qu'on se décide et se demande s'il va devoir descendre le prix à 50 centimes: « Si personne n'embarque tout ça d'ici ce soir, je les balance, de toute façon. Ma tante ne m'a pas demandé de nettoyer son grenier pour que je lui ramène des trucs; et moi, qu'est-ce que j'en ferais?

_ Oui, mais justement, nous aussi, qu'est-ce qu'on va en faire? »

Au fond, mon père se fout de savoir si nous allons lire les vieux romans, faire des avions avec les pages, ou caler une table avec. Ce qui le perturbe, c'est de prendre le risque de se faire remarquer en remontant la rue à côté de personnes qui portent laborieusement des vieilles choses poussiéreuses et inutiles avec la conviction d'avoir fait une affaire. Pour limiter les dégâts, il se propose de porter lui-même la caisse, conscient que dans ce cas de figure, c'est lui qui passe pour un con; il n'ose même pas envisager l'éventualité de croiser une connaissance...

_ Ou alors, on va faire un tour de l'autre côté du village, et on revient chercher les livres après?

Non, non, le vieux piège du « on repassera tout à l'heure » ne marche plus et ne sert absolument à rien, si ce n'est à mettre ma mère et ma sœur hors d'elles. Oui, elle aussi est venue s'en mêler, comme toujours dès que le ton monte. Après engueulade générale, nous sauvons in extremis les livres du bain de sang pour les caser dans la voiture, sans en tirer de gloire particulière.

L'incident est clos, et la fraise avalée, définitivement. Ce jour-là, la tension était telle qu'on a directement rangé les livres dans un placard, sans même les feuilleter.

Rideau.
(Un jour, je ferai un article sur Louis la Brocante. Il le faut!)


Tout ça pour dire que, dans cette caisse de livres, que j'ai quand même fini par aller fouiller une nuit d'insomnie, il y avait
Notre prison est un royaume, de Gilbert Cesbron.
Pour moi, Gilbert Cesbron était un parfait inconnu; heureusement, il faisait l'objet d'un article sur
Wikipédia, DONC j'étais sauvée : « né le 13 janvier 1913, à Paris où il est mort le 13 août 1979; écrivain français d'inspiration catholique ». Pas la peine d'aller plus loin, me voilà déjà pleine de préjugés! Notons que cet écrivain a été populaire dans les années 50, mais qu'à présent il est tombé dans l'oubli.
Sympa, le titre! Sur la couverture, trois jeunes qui tirent la gueule. Encore une histoire d'école ou d'orphelinat? Sans doute pas le meilleur moyen de trouver le sommeil, mais je n'ai pas encore eu le temps d'aller emprunter le tome 3 de l'
Assassin royal... donc c'est parti.

Le roman retrace une année scolaire dans un lycée parisien, vraisemblablement dans la période de l'entre deux guerres. Dans leur classe de seconde, quatre élèves forment un groupe indissociable : François, Alain, Pascal et Jean-Jacques. Ils s'identifient aux quatre mousquetaires, ils sont un peu rebelles, ils ont leurs dilemmes et leurs passions (« suis-je royaliste ou républicain?? »), s'écrivent des messages codés, et, bien qu'ils portent des prénoms à la con, ils s'en sortent plutôt bien, dans la vie!!

Or, le jour de la rentrée, c'est le drame : Pascal manque à l'appel. Il faut dire qu'il a une bonne excuse, puisqu'il s'est suicidé pendant les vacances, ce qui rend pas mal de choses impossibles pour lui, désormais. La vie continue. Elle continue avec une facilité déconcertante : les mousquetaires ne sont plus que trois, ce qui est suffisant pour faire tourner en bourrique les profs qui se mouchent bruyamment ou qui ont le malheur d'avoir leur fils dans le lycée, les surveillants qui s'endorment, pour mener une guerre impitoyable contre une autre classe, saboter un repas de classe et une sortie pédagogique. Seul François, ne se relève pas de cette tragédie: il est le plus
"jeune" de la bande, il est complexé de « ressembler à un enfant » (comprendre : d'en avoir une petite), et il voyait en Pascal le modèle à suivre. Les temps ont changé, et il faut faire avec; plein de mépris pour Alain et Jean Jacques qui ont vite oublié leur pote, trop occupés à draguer ou a entretenir leur réputation de forte tête, François décide de mener l'enquête, de son côté, pour découvrir la cause du suicide de Pascal.

Hormis les références littéraires (les Trois Mousquetaires, Chateaubriand, Nerval) qui peuplent les pensées du héros mélancolique, et qui font qu'on n'est pas loin de prendre ce roman pour un
Profil Bac ^^, la lecture de Notre prison est un royaume n'est pas plus contraignante que moraliste. C'est même assez troublant de voir que, soixante ans après la publication, les jeunes peuvent facilement, se reconnaître dans des personnages qui n'ont pas vieilli; surtout depuis le grand retour sur les registres d'État civil des Fernand, Hubert, Louis-Gaston, et autres vieux prénoms!


Notre prison est un royaume – Gilbert Cesbron – 1948 – Robert Laffont

Illustration → Livre de Poche

mercredi 29 septembre 2010

Cassage gratuit

"_Suis-je bête!! J'ai failli oublier!!

_Oui, c'est bien vrai! mais... oublier quoi?

_ Ca fait un mois tout pile que Rio, euh, Rillette ne répond plus!

_Un mois? Déjà? comme ça passe!

_Ehhh oui, il faut marquer le coup! Tiens, la voilà qui arrive! mais si, regarde bien, la fille qui se cache derrière sa main!

_Eh toi! viens un peu nous voir!

_ Bouh, si l'on s'appuie sur une mesure approximative du degré d'ouverture de ses sourcils froncés, on a toutes les raisons de penser qu'elle n'a pas l'air d'avoir envie de parler!

_ On s'en fout, au contraire! c'est encore plus drôle! choppe-là par la tignasse! allez, vas-y franchement! tout est dans le mouvement de poignet!

_ Ok ..

_ Aïe putaing! lâchez-moi la touffe!

_ Elle bouffe ses ongles mais elle griffe quand même t'inquiète! La prochaine fois faudra prévoir l'épuisette, vieux!

_ Baisse d'un ton Rillette, hein! et écoute nous : HAPPY BIRTHDAY TO YOU
_HAPPY BIRTHDAY TO YOU!!

_ HAPPY BIRTHDAY TO YOU Rillettteuuuh
HAPPY BIRTHDAY TO YOUUUU

_ Pff c'est débile de fêter un anniversaire tous les mois!

_ On le fait bien pour les gosses! Allez, souffle la bougie!

_Plllltpsh

_ Bahhhh dégueu!!!!!!

_Non, on avait dit "souffle", pas "crache"!

_Comment ça, c'est la faute de l'appareil dentaire? Allez allez, cherche pas d'excuses, tu souffres d'un surplus de fiel, comme beaucoup de gens; et parfois, il faut que tu l'expulses! Ce n'est pas sale, tu sais.. même si ça ne se produit pas toujours au bon moment...

_ Heureusement qu'on n'avait pas prévu un vrai gâteau!"

Pardon si c'est méchant, mais c'est ma manière à moi d'avancer ...

vendredi 17 septembre 2010

L'assassin royal - 2 - "L'assassin du roi" - Robin Hobb



Je viens de régler son compte le volume 2 de L'assassin Royal "l'Assassin du roi", qui fait suite à l'"Apprenti assassin". A la fin de cette première partie, on avait laissé FitzChevalerie, le héros, bien mal en point puisque son oncle le prince Royal lui avait fait le coup de l'empoisonneur empoisonné lors de leur voyage au pays des Montagnards.

Comme prévu, ils ont confronté Kettricken, la princesse des Terres intérieures, au climat océanique de la cour portuaire de Castelcerf pour célébrer son mariage avec le prince Vérité et en faire la nouvelle reine-servante. Le tout en sachant très bien qu'elle va s'y ennuyer ferme, vu que Vérité est plutôt branché bataille navale.

Vous êtes perdus?
Tant pis, de toute façon on s'en fiche, de leurs histoires de mariages arrangés!

On s'en fiche, d'abord parce que les Pirates Rouges, c'est à dire les Méchants, continuent de piller les villages du bord de mer et de réduire les paysans qu'ils ne tuent pas à l'état de fous sanguinaires et cannibales. L'armée du roi Subtil (qui ça? _mais le roi, le vrai! le père de Royal et Vérité, le grand père du héros, le vieux qui gouverne depuis son pieu, enfin!) ne fait pas le poids, et le seul moyen de repousser les pirates, c'est d'entrer dans leur esprit par l'Art, la télépathie dont sont doués certains membres de la famille royale. D'ailleurs, Galen est mort, tout le monde est bien content! Finalement on fait comprendre à Fitz qu'il n'était pas si nul que cela, en Art, et que ce serait bien qu'il reprenne cet apprentissage, un de ces quatre.

Mais surtout, on s'en fiche, parce que, attention, attention!! en plus d'avoir réussi à apprivoiser un loup galeux, le héros drague et choppe! Bon, en même temps, il décide après mûre réflexion de faire la cour à la seule fille avec qui il traîne depuis qu'il a cinq ans... alors disons que leur histoire était à peine prévisible. Heureusement l'auteur a pris soin de jeter quelques obstacles entre eux, de manière à ce qu'il puisse pleurer et se laisser aller à la mélancolie entre deux empoisonnements.

Question qu'on se pose : que va-t-il faire, maintenant qu'il a réussi à se la taper? Sachant qu'il a encore 11 volumes pour en essayer d'autres...

Vont-ils arriver à se marier, vu qu'elle n'est qu'une insignifiante servante spécialisée dans la fabrication de bougies odorifères, et lui un noble bâtard de prince?
Voudra-t-elle toujours sortir avec lui lorsqu'elle apprendra qu'il est aussi un dangereux empoisonneur de gens (car elle l'ignore!!)?

Suspense!

On rigole, on rigole, mais l'histoire ne s'essouffle pas, pour l'instant, et c'est trop bon de se prendre au jeu! L'assassin royal, et la littérature de jeunesse en général, devraient être remboursés par la Sécu! De même que ce truc, une des rares âneries qui réussissent à me faire rire en ce moment!

L'assassin du roi - L'assassin Royal 2 - Robin Hobb - J'ai Lu - Fantasy - 2001- ill. Sofiane Tilikete

jeudi 9 septembre 2010

Dino Buzzati - Le Désert des Tartares



A l'issue de pénibles années passées à l'académie miliaire pour devenir officier, Giovanni Drogo est affecté au Fort Bastiani pour son premier poste. Après deux jours de voyage, il trouve enfin cette forteresse inconnue, ou plutôt oubliée de tous, située à la frontière du royaume et faisant face au désert des Tartares. Il est assez déçu lorsqu'il se rend compte qu'il ne se passa jamais rien de ce côté du pays : aucune offensive à contrer, rien à protéger. Les soldats passent leurs journées à trépigner et à scruter le désert à la longue vue, en espérant que quelque chose les poussera un jour à se servir de leurs fusils. En gros, on se fait ch***. Tous ceux qui arrivent n'ont qu'un souhait : se tirer de ce trou paumé le plus vite possible.

En lisant les premiers chapitres du Désert des Tartares, j'ai eu une pensée émue pour mes copines professeures documentalistes récemment envoyées au vert dans des collèges sans ordinateurs, sans site internet, dont l'unique charme réside dans leur obstination à résister à Google maps, dans des CDI sans BCDI, tout pleins de beaux livres de la Bibliothèque Rose, de cassettes vidéos, de tapuscrits, de plantes dont la vie dépend de la taille des gouttières, et de poufs éventrés d'où s'élèvent quelques brins de paille ...

Où est-ce que j'en étais?
Ah oui!

Donc, Drogo est conscient d'avoir déjà grillé une bonne partie de son capital jeunesse, et ne voit pas d'un bon oeil cette nouvelle réclusion dans un édifice à la fois triste et fascinant, presque oublié de tous. Il ne rêve que de gloire, d'une longue carrière et de batailles, d'un poste plus proche de la ville, de ses amis. Alors, vite, pas de temps à perdre! Puisqu'il lui reste quelques jeunes années à sauver, il faut quitter au plus vite cette citadelle inutile. Si possible dès maintenant. Mais le commandant Matti est formel : l'officier doit d'abord patienter 4 mois, ensuite, il sera en droit de demander sa mutation.

ATTENTION SPOILER!!
Si vous voulez lire le livre, n'allez pas plus loin!!!

Sauf qu'au bout de quatre mois, Drogo renonce à partir. Finalement, il trouve un charme fascinant au Fort Bastiani, aux murailles si pittoresques au soleil couchant. La vie y est ennuyeuse, c'est vrai, mais la routine a quelque chose de rassurant, et la répétition des journées est telle qu'il n'a plus conscience du temps qui passe. Il se donne quelques mois de plus pour réfléchir à la suite de sa carrière. On ne sait jamais, s'il se passait quelque chose? Une guerre, une attaque? Il s'en voudrait d'être parti. En même temps, tout porte à croire que je Fort Bastiani ne servira jamais à rien d'autre qu'à décorer le paysage.

Le problème, c'est que le temps ne fait pas de pause, lui. Les mois deviennent des années, les années des décennies, et un beau jour Giovanni Drogo se rend compte que sa jeunesse est bel et bien finie, que ce n'est même plus la peine de chercher à partir. Ses rares permissions ne servent qu'à lui rappeler qu'il a loupé le coche, et donc, dans un sens, qu'il a raté sa vie. Il ne lui reste plus qu'à réussir sa mort!

"Venge-toi finalement du sort, nul ne chantera tes louanges, nul ne t'appellera héros ou quelque chose de semblable, mais justement pour cela ça vaut la peine."

La fuite du temps est donc le fil rouge du roman, plus que l'action (inexistante, on l'a compris). D'ailleurs, le temps, jusqu'à la déchirante fin du héros, on le sent un peu trop bien passer, mais cela reste un avis personnel. Quand on vient de lire de l'heroic fantasy avec de l'action dans tous les sens, rester 200 pages entre une chambre d'officier et un chemin de ronde est quelque peu déstabilisant, même si la formulation est poétique.

Le désert des Tartares - Dino Buzzati
(1940)
Illustration : Jong Romano (couverture Pocket - 2009)


jeudi 2 septembre 2010

L'invitation - Jim et Mermoux



Coïncidence, nez creux, folie des astres ?
Caprice des dieux?

Camembert ?
A vous de voir !
Toujours est-il que « ma pause Virgin » du jour – ah, j'avoue que ça m'avait manqué depuis deux mois ! - a sans douté été enrichissante sur le plan personnel.
En faisant un tour (d'une heure) au rayon BD, mon regard s'est porté sur un exemplaire de L'invitation de Jim et Mermoux, à moins que ce ne soit la main de Dieu qui ait d'abord saisi l'album, ou alors une facétie du présentoir.

"Mais qu'il est con ce Léo!"
Basé sur une anecdote de la vie de Jim, l'intrigue ne manque pas de surprendre. Raphaël et Helen sont réveillés en plein milieu de la nuit par une sonnerie de téléphone. Le jeune homme regrette déjà d'avoir oublié d'éteindre son portable, quand il remarque que c'est son vieux pote Léo qui l'appelle : on n'a pas idée de biper à des heures pareilles, y a intérêt à ce que ce soit grave !

Lorsque Léo lui annonce que sa voiture l'a lâché dans un coin tout paumé et qu'il attend que son ami vienne le dépanner, Raphaël est au comble de l'exaspération : pourquoi serait-ce à lui de se déplacer ? Ne paye-t-il pas une assurance, dont le rôle est justement de régler ce genre de problèmes ! De plus, Léo a eu l'intelligence de tomber en rade à deux heures de route de l'appart du jeune couple. Raphaël le rembarre et s'apprête à se recoucher, mais sa copine Helen est là pour réveiller sa bonne conscience : comment son mec peut-il planter un copain aussi facilement?

Raphaël se décide donc à le rejoindre, agacé mais secrètement heureux que Léo ait fait appel à lui. Une drôle de surprise l'attend.


Tout se passe dans les bulles

Les vignettes assombries par le cadre nocturne de l'action sont avant tout consacrées aux personnages et à leurs dialogues à propos de l'amitié. Le dessin est épuré au profit d'un contenu tellement dense qu'on en oublie l'esthétique de la forme. C'est curieux d'en arriver à se dire qu'au final l'histoire aurait pu être tout aussi efficace sous forme de récit, et pourtant c'est bien le cas ; peut-être parce que les propos sonnent particulièrement bien à mes oreilles en ce moment, peut-être aussi parce que j'ai lu l'album d'une traite.

Ce qui apparaît à travers une brochette de copains de plus ou moins longue date, c'est qu'on évolue souvent très différemment, qu'on a la mémoire plus ou moins courte, mais qu'au fond rien de ce qui a été vécu ne se perd, même si on ne se comprend plus jusqu'à passer à côté de l'essentiel. L'amitié idéale et parfaite n'existe pas, chaque amitié a sa particularité, sa part d'ombre, et s'exprime différemment. Le tout, c'est de savoir trouver la bonne dose d'humour en toutes circonstances.

Cette BD ne pouvait pas mieux tomber ces jours-ci! Elle m'a permis de me reconnaître dans certaines situations réalistes, de réfléchir, de me remettre en question, aussi. Bon, le dialogue entre Léo et Raphaël dominant/dominé (« tu es mieux que moi donc je t'admire mais en même temps je suis frustré parce que t'es vraiment trop mieux que moi!») est un peu lourd, c'est vrai. J'imagine que les lecteurs qui voguent paisiblement sur le radeau de leurs amis s'attarderont moins sur cette dimension d' « identification », et auront donc moins d'intérêt à parcourir l'album. Mais ils s'amuseront bien quand même, à défaut d'admirer les dessins.

L'invitation – JIM (scénario), Dominique Mermoux (dessins) - Editions Vents d'Ouest – Avril 2010