lundi 23 décembre 2019

Joey et le Mystère des Manteaux Noirs - Remi Vidal (2018)

Merci à Babelio et aux Éditions Trois Petits Points pour l'envoi du livre audio Joey et le Mystère des Manteaux Noirs dans le cadre de l'opération Masse Critique. 


L'histoire 


Soyez les bienvenus à Trifouillis-les-Os, une petite ville canine fort cocker coquette, réputée pour sa Butte Saint-Bernard, son Canal du Milou et son Université des Chiens Savants ! En cet après-midi d'été, Joey le chien bleu_ héros et narrateur de l'histoire, a profité du soleil pour aller jouer "à la baballe" avec sa bande de copains. Il nous présente tour à tour Cassidy, sa meilleure amie au caractère bien trempé, Rex le vieux de la vieille et Johnny l'érudit dont le plus grand talent est d'écorcher toutes les expressions qu'il emploie. Tous les quatre forment les Rex Pistols, du nom de leur chef.

Soudain, c'est le drame : un shoot malheureux envoie la balle en plein dans la vitre du salon de l'effrayant George Bouledogue. Ni une ni deux, le propriétaire se lance à leur poursuite, complètement furax, poussant les Rex Pistols à fuir jusqu'au nord de la ville, bien loin de leur quartier et de leurs repères. La joyeuse bande n'a plus qu'à regagner ses pénates avant la tombée de la nuit... mais qu'à cela ne tienne, ils vont profiter de l'occasion pour se payer un peu de bon temps. Ils ne savent pas que de nombreux déboires les attendent sur le chemin du retour.  

Déjà, ils remarquent que la très ambiancée Butte Saint-Bernard est déserte, et de mémoire de chien, on n'a jamais vu ça. Pour Rex, cela n'augure rien de bon. Ses craintes s'amplifient lorsque sa truffe détecte la présence de touffes de poils noirs sur les lieux : les Manteaux Noirs sont de retour. Qui sont-ils ? Pourquoi le vieux chien est-il tout à coup si pessimiste ? Le jeune Joey n'en sait rien, et nous non plus. Alors il nous chante la légende urbaine idoine, sur un air de rock ; on comprend que ces mystérieux chiens au pelage noir sont déjà venus hanter Trifouillis-les-Os quelques générations plus tôt, avant d'être combattus, vaincus et expulsés...

La nouvelle de leur retour met Joey et Cassidy sur les dents : pas question que les Manteaux Noirs viennent s'installer sur leur territoire, il faut chasser ces intrus une bonne fois pour toutes. Ils se lancent à leur recherche, très remontés, et finissent par tomber sur deux d'entre eux. Deux soeurs, Jackie et Vickie, très occupées à faire... rien de mal, en fait ! Encore imprégnée des folles rumeurs qu'ils viennent d'entendre, Cassidy se montre hostile bien qu'elle n'ait aucune raison de l'être ; pas spécialement belliqueuses, celles qui se font appeler les Jack Panters n'entendent pas s'écraser pour autant : oui, elles ont le poil noir, et alors ? Des chiens de Trifouillis-les-Os ou des chiens de passage, qui aura le dernier mot ? Le duel est inévitable ; il prendra la forme d'une joute verbale opposant les natifs de Trifouillis-les-Os aux "étrangères". Seul "le choc des mots" fera la différence. Joey et Cassidy vont apprendre à leurs dépens que les paroles peuvent faire mal lorsqu'elles sont mal choisies, lorsque la colère et la peur les poussent loin, trop loin, bien au-delà de la pensée. 

    


Joey, l'opéra rock 

Ceux qui ont appris à lire avec Ratus le rat vert autrefois seront particulièrement ravis de découvrir aujourd'hui Joey le chien bleu, héros tout aussi remuant et anticonformiste !

Voilà à peu près un an que j'essaie de me familiariser avec la lecture audio _ surtout pour des raisons professionnelles, puisque comme vous le savez (ou pas), on essaie de créer un fonds de livres sonores, au CDI. Je me suis parfois demandé si on pouvait parler de "lecture" et de "littérature" lorsque l'oeuvre enregistrée n'avait pas de "base écrite", si l'on peut dire. A priori, Joey et le Mystère des Manteaux Noirs n'est pas un livre lu à haute voix, mais plutôt un "spectacle audio". Pourtant, je n'ai pas eu de mal à l'associer à un livre. Il faut bien reconnaître que la jaquette du CD _ qui est vraiment un bel objet, soit dit au passage, nous y engage : elle fait vraiment couverture de livre, avec son titre central et son fond vermillon. Les illustrations de l'univers urbain et les petits personnages représentés en style BD nous aident à planter un décor et à imaginer les scènes de départ pour le jeune lecteur qui aurait du mal à "accrocher" aux premières pistes du livre audio. Voilà des petits détails qui n'en sont pas, et qui peuvent faire toute la différence ; ça me fait un peu mal aux mains d'écrire ceci, moi qui n'aime pas juger une noix d'après sa coquille, mais il faut bien le reconnaître : sur un livre audio, l'esthétique de la pochette a son importance. De même, le plan de la ville de Trifouillis-les-Os _avec ses noms de rues bien trouvés, et la retranscription des paroles de toutes les chansons qui rythment l'histoire, nous aident à suivre et permettent de prolonger la lecture.



Il faut le savoir, les aventures de Joey sont relatées sur fonds de chansons rock'n roll, bourrées de références culturelles, musicales, et de messages incitant les jeunes lecteurs - auditeurs au questionnement et à la réflexion : qu'est-ce qu'être différent ? les chiens des rues qui errent dans les quartiers sont-ils méprisables ? la couleur du pelage _et de la peau, bien sûr_ est-elle si importante ? faut-il virer tous les chiens étrangers ? viennent ils vraiment d'un pays "tout pété ?" faut-il croire les rumeurs ? Evidemment, ce monde de toutous peut (et doit) être transposé au nôtre...

Certes, l'avertissement "Parents attention langage mordant" n'est pas volé, mais le ton reste très correct et tout à fait adapté à la tranche d'âge ciblée par la maison d'édition, à savoir les 3-12 ans.

Le livre se termine sur un hymne final qui n'est pas sans rappeler un air bien connu de Matmatah.


Joey et le Mystère des Manteaux Noirs. Rémi Vidal. Trois Petits Points, 2018.


samedi 30 novembre 2019

La cicatrice - Bruce Lowery (1960)

Sur cette photo en noir et blanc, on était quatre ou cinq filles, toutes assises sur un canapé.
 On riait bien, apparemment, même si, là, comme ça, je ne pourrais pas dire de qui il s'agissait. J'ai posé le doigt sur l'une de nous, et elle s'est effacée. Puis sur sa voisine, qui s'est gommée elle aussi, comme passée à Photoshop. Enfin sur moi. Je n'ai pas réussi à me faire disparaître complètement de la photo : il restait mon pull à capuche, vide mais bien présent. J'ai comme double-cliqué sur le vêtement flottant comme un fantôme, en espérant l'éradiquer une fois pour toutes. Mais il n'a fait que se décaler à coté du canapé, glissant sous mes doigts, comme lorsqu'on presse une bulle d'air sur la couverture d'un livre mal filmoluxé.

 Quelque chose n'allait pas, c'était évident. Les bip bip caractéristiques des camions-poubelles ont envahi l'espace ; je les connais maintenant : ils sont le signe que je fais ce genre de rêves angoissants dont je ne peux sortir qu'en criant (pour me réveiller). Plus de photo, plus rien.  Me voilà dans l'ombre, dans des ténèbres épaisses, et je suis bien tentée de me laisser entraîner vers le fond. Non par choix, mais parce que je ne me sens pas la force de lutter.  Il est rare que je sois si près de céder. Pourtant je sais qu'il ne faut pas que ça arrive. Tout en bas, je vais trouver quelque chose d'horrible. Quoi, je n'en sais rien, mais quelque chose qui fera que rien ne sera plus comme avant, et que je ne pourrai plus remonter. Je crois hurler, mais dans la réalité, je n'ai fait qu'émettre un grognement qui a suffi à me réveiller.  




Toujours cité comme ouvrage incontournable dans toutes les bibliographies portant sur le harcèlement scolaire, La cicatrice est un roman beaucoup plus complexe que ce à quoi je m'attendais. En ouvrant le petit livre format poche _ trouvé dans la fameuse caisse de livres que nous avions rapportée de la Fête de la Fraise de Vergt, pour la petite histoire _, j'ai appris qu'il avait été publié par l'auteur américain Bruce Lowery en 1960. Voilà qui risquait de sentir le sépia. Est-ce que ça allait le faire ?


L'histoire 

Etats-Unis, 1944. Jeff a treize ans et coule une vie assez heureuse auprès de ses parents et de son petit frère Bubby. Le bonheur pourrait être parfait pour ce garçon s'il n'avait pas été frappé d'un bec-de-lièvre à la naissance, lui coûtant une opération signée d'une cicatrice inratable. Mais Jeff et son entourage s'y sont habitués et n'y font plus vraiment attention.   

Un jour, la famille déménage ; une nouvelle vie commence, les enfants changent d'école. Evidemment, la cicatrice de Jeff crée l'émoi dès son arrivée en classe, et il écope rapidement du surnom de "Grosse Lèvre". Hélas, il comprend très vite que sa prof, Miss Martel, brave femme un peu molle du genou et dépourvue de tout charisme, ne lui sera d'aucun secours. Jour après jour, les brimades vont crescendo ; plus Jeff s'accroche pour se faire une place parmi les autres enfants, plus il se fait jeter, tant par les garçons que par les filles : mauvaises blagues, coups "accidentels", interdiction d'accès aux jeux sous prétexte qu'il "ne soit pas capable de" ou qu'il "porte la poisse"... On va pas faire la liste, mais si vous vous lancez dans la lecture du roman, vous remarquerez à quel point les situations racontées sont proches de celles auxquelles on peut assister dans les collèges, de nos jours.

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La spirale infernale 

Vous l'aurez compris, malgré ses soixante ans d'âge, La cicatrice est une histoire terriblement actuelle ; Bruce Lowery sait parfaitement nous donner envie de casser du petit con, et en 2019 encore, on lui envoie des mercis jusqu'aux étoiles.

Attention cependant ; au fil des chapitres, on s'éloigne du schéma simpliste du garçon différent qui se fait frapper. Déjà, parce que Jeff fait l'objet d'une double discrimination : sa cicatrice le dessert évidemment, mais on a tendance à oublier qu'il est aussi méprisé en tant qu'enfant pauvre scolarisé dans une école de gosses de riches. Ensuite, parce que Willy entre dans sa vie et change le cours du destin. Willy a de trop grandes oreilles, il est pauvre, il n'hésite pas à sortir de la meute pour faire sa vie ; et pourtant, il est respecté et apprécié. Sans craindre les réactions de ses pairs, il prend un jour la défense de Jeff et l'impose à tous comme son ami.

"Jeff est plus fort qu'on le pense !" 

Mais à ce stade de l'histoire, Jeff en a tellement pris plein la tronche qu'il n'est plus à même de construire une relation amicale saine avec qui que ce soit. Il ne peut que développer une fascination démesurée pour Willy, ce copain qu'il n'ose pas partager de peur de le perdre, cette bouée de sauvetage qu'ils craint de lâcher. Ce trop plein d'admiration va le conduire à mettre à mal la confiance que lui accorde son ange gardien, puisqu'il va lui voler des timbres de collection. Non pas pour compléter son propre album, ni même pour se faire quelques pièces, mais seulement pour avoir près de lui H24 quelque chose appartenant à son sauveur. De manière tout à fait prévisible, Jeff sera accusé du vol (à raison), sans que personne ne puisse jamais le prouver ; mais bon, Grosse-Lèvre était dans les parages au moment du larcin, donc ça ne peut être que lui ! Il endossera des quolibets supplémentaires, sans répondre.

Willy, le Messie (doté d'une énorme b*** !)

Le ver est dans le fruit 

Sans avouer non plus. Car à force de s'en prendre plein la gueule, et aussi parce qu'il entre dans l'adolescence, Jeff s'est quand même un peu endurci ; il est devenu désagréable avec ses derniers alliés _ sa famille, et fourbe avec ses camarades de classe. On touche d'ailleurs une autre réalité du harcèlement, rarement évoquée : quand tu te fais maltraiter par plus fort que toi, tu te sens pris d'un besoin irrépressible de tyranniser ceux qui sont plus "faibles", ceux qui ne te veulent pas de mal, voire ceux qui ne te veulent que tu bien ; parce que c'est facile et sans risque, pour une fois. Chacun a besoin d'un défouloir, et malheur à qui se trouve au bout de la chaîne. Aussi, quand Jeff est innocenté par un curieux concours de circonstances, dans les toutes dernières pages, faisant injustement porter le chapeau à un escogriffe qui ne le laissait guère respirer, on s'en délecte ! J'aurais aimé que l'histoire s'arrête là. Le reste est tellement plombant... 

     

Pour finir sur une note d'optimisme 

La Cicatrice est un roman accessible aux jeunes lecteurs, peu joyeux certes, mais qui a bien vieilli.  Il a l'avantage de nous faire réaliser que les décennies passent mais que la nature humaine n'évolue pas. S'associer pour défoncer les personnes différentes est une tradition qui ne se perdra jamais ! Les dispositifs Non au Harcèlement, les Petits Citoyens, les associations de parents, l'EMC sont nécessaires et sauvent sans doutes un paquet de gosses. Et bordel, c'est déjà ça de gagné ! Mais si je n'aurai pas l'audace et l'insolence de dire que ce ne sont que des emplâtres sur des jambes de bois, je suis convaincue qu'ils ne canaliseront jamais la totalité les bêtes vicieuses que nous sommes. Sans vouloir donner d'ordres, lisez ce livre si possible ; il est rare que la question du harcèlement à l'école soit abordée de manière aussi complète et si peu manichéenne.


Édition utilisée pour l'article :
Bruce LOWERY. La cicatrice. J'ai Lu, 1971. 126 p. ISBN 9782277111658



samedi 2 novembre 2019

Chevalier B - Martine Pouchain (2007)



Les cinq premières minutes sont toujours un temps d'échauffement, même sur un 10km.
Les pieds connaissent la route, trouvent leur rythme sans que j'aie besoin d'y réfléchir, à présent.

Y a deux ans, de sombres trous du cul riaient en me voyant courir au canal ou à la voie verte.
Aujourd'hui, plus personne ne rit, et je me fais même alpaguer par des coureurs _des vrais. 
"T'es dans un club ? Non ? Viens courir avec nous !" 

Je dis pas ça pour me faire mousser _enfin si, un peu quand même... vite fait. 
Mais sachez-le, si je peux, tout le monde peut. 
Si vous avez la chance de trouver le truc qui vous plaît, qui vous fait vous sentir bien, qui vous réconcilie avec votre enveloppe, accrochez-vous, même si vous avez le sentiment de partir de très loin et de pas être spécialement doué. 



L'histoire

Barnabé Bouton aime les champs épanouis, les animaux en liberté, la soupe au lard de sa grand-mère et la jolie Rosa Valet. S'il pouvait attirer ne serait-ce qu'un regard bienveillant de cette dernière, il serait vraiment un paysan comblé. Mais elle l'ignore royalement. Il faut dire que dans le village qui l'a vu grandir et qu'il ne songerait pas une seconde à quitter, il est avant tout le "gros Barnabé", un brave simplet déjà assez costaud pour travailler autant qu'un adulte. A dix-sept ans, il est conscient de son physique peu avantageux, mais il ne s'en formalise pas : il sait qu'il est inutile d'être beau, svelte et diplômé pour faire pousser les céréales. 

Pourtant, ce Giono en herbe nous prouve qu'on peut très bien avoir les bottes dans la terre et la tête dans la lune : lorsque la nuit tombe, Barnabé devient Chevalier B et compose des poèmes enflammés, des odes à la nature pour sa bien aimée. Après quoi il enfourche son solex et roule jusque chez elle, en pleine nuit, pour les déposer dans sa boîte aux lettres. Rien de bien méchant jusque là _ ok, c'est un peu flippant, mais c'est pas méchant. Sauf que les élans écologico-amoureux de ce garçon a priori inoffensif vont l'emmener un peu trop loin. Une nuit, il sabote un champ de maïs transgénique à coups de désherbant. A quelques matins de là, un exploitant trouve son élevage de poulets désert, toutes portes ouvertes. Jusqu'où Barnabé ira-t-il pour sauver le monde et impressionner la fille de ses rêves ?   

José Bové likes it !

Etre d'ici ou ne pas être

Les premiers chapitres m'ont laissée perplexe, je dois le dire. Qu'est-ce que c'était que ce catalogue de clichés sur la vie à la campagne ? Le choix de ce roman pour le CDI avait pour une origine la volonté de casser les représentations du paysan véhiculées par les médias auprès des jeunes _après tout, l'Amour est dans le pré est au monde rural ce que Sept à Huit est à celui des banlieues_ mais j'ai bien cru qu'on était partis pour obtenir l'effet inverse. Ici, des autochtones méprisant "le" citadin, trop incultes pour faire la différence entre Lyon et Paris. Là-bas, des pères de famille aussi taciturnes que violents _mais juste quand il faut, hein, vous inquiétez pas, on n'est pas des bêtes..., des mères qui n'ont pas vraiment droit à la parole, assignées qu'elles sont aux remplissage des gamelles humaines et animales. Plus loin, les gens venus d'ailleurs ne se mêlent pas aux "bouseux", et réciproquement, puisqu'on admet sans problème qu'ils sont d'une "autre trempe". Il ne manquait plus que les dialogues en patois pour que le compte soit bon...



Conte de chez les oies 

En fait, Chevalier B ne doit pas être lu au premier degré. Je me suis laissée abuser par le décor rural, qui me poussait à coller sur cette histoire une étiquette de roman "réaliste". Jusqu'à ce que je comprenne que si certains passages n'étaient pas trop crédibles, si les personnages étaient assez typés, si certaines situations étaient de plus en plus tirées par les cheveux, c'était sans doute un choix réfléchi de l'auteure, tout simplement. A partir du moment où Barnabé passe la ligne rouge (je n'en dis pas plus pour ne pas spoiler), on glisse dans le conte. Conte de fées ? Conte philosophique ? J'ai lu cette dernière formule dans une critique de lecteur sur Babelio, et je trouve qu'elle est bien trouvée... Un conte en tous cas, avec son chevalier (Chevalier B), sa princesse inaccessible (Rosa), et ses opposants, ses Candide en plein apprentissage de la vie (Barnabé, Rosa aussi), ses merveilleuses coïncidences _ car aller à Paris pour retrouver une fille dont on a pas l'adresse ET la retrouver le jour-même, c'est quand même pas banal... Son château aussi, puisque Barnabé va se lancer dans une entreprise de rénovation - agrandissement fort ambitieuse !  

Un conte qui soulève des questions bien réelles et qui engage à la réflexion, à défaut d'apporter des réponses : les OGM, la maltraitance des animaux _je pensais vraiment que l'histoire allait tourner autour des débats écologiques, mais Barnabé s'en éloigne assez vite..., le deuil, la difficulté et le danger du métier d'agriculteur, le vieillissement de l'entourage, la solitude _toujours  plus pesante en pleine campagne, les différentes formes d'amour, aussi.   


THE destrier de Chevalier B
Stan, si un jour tu repasses par là : le solex, c'est cadeau ! 

L'amour en solex  

Je voudrais attirer l'attention sur le fait que ce cher Barnabé Bouton, fils honnête, petits-fils aimant et dévoué, père de substitution irréprochable... est quand même une graine harceleur qui s'ignore ! Eh oui, même s'il ne veut que du bien à Rosa, il lui envoie quotidiennement des messages anonymes, la surveille du coin de l'oeil, et malgré le râteau qu'elle lui balance, s'obstine à bâtir sa vie en l'imaginant comme sa future femme, la mère de ses enfants... Sans parler de l'irruption à l'improviste dans son petit univers, bien des années plus tard _ou il pourra d'ailleurs mettre en pratique ses qualités de preux chevalier ! Alors évidemment, Martine Pouchain a sûrement voulu, je pense, mettre en valeur cet amour obsessionnel qu'on développe tous à un moment ou à un autre pendant l'adolescence, toujours teinté d'admiration, de rêve aussi, souvent dirigé vers quelqu'un qu'on connaît assez mal pour pouvoir l'idéaliser. Un amour qu'on trouve beau et pur, mais dont on ne mesure pas la portée effrayante, voire oppressante. Et une fois de plus, ça sonne très juste.  Mais Barnabé nous rappelle qu'une situation de harcèlement peut aussi naître de sentiments positifs mal exprimés, frustrés, maladroitement repoussés... ce qui ne l'excuse aucunement, d'ailleurs. 

Chevalier B : à lire si.. 
 ... vous vous posez des questions existentielles. 
... vous avez aimé Bagdad 2004 (même auteure)
... vous aimez les histoires qui finissent bien, mais pas trop non plus, sinon c'est niais ! 
... vous aimez quelqu'un qui n'en a rien à foutre de votre face de rat 
... vous vous trouvez moche et que vous craignez que ça vous empêche de réussir 
... vous vous sentez mal à l'école et que vous avez peur de ne pas vous en sortir... 
Ce roman vous mettra sur la piste de vos propres réponses... 

Martine POUCHAIN. Chevalier B. Sarbacane, 2007. Coll. "Exprim'". 202 p. ISBN 978-2-84865-165-1





dimanche 27 octobre 2019

Nuit marine - Alain Crozier (2019)


Merci Babelio et Jacques André Editeur pour l'envoi de Nuit marine, recueil de poèmes publié en 2019 par Alain Crozier. 



Bon, c'est toujours délicat d'écrire une critique, même brève, d'un ensemble de poèmes : on est presque sûr de tomber à côté de ce que l'auteur a voulu dire. Le personnel est l'universel étant constamment mêlés en poésie, on en est réduit à marcher sur des œufs lorsqu'on s'essaye à l'interpréter. C'est pourquoi on ne le fera pas : trois années passées en fac de lettres à faire du décryptage forcé _ si possible en suivant la tendance et les goûts du correcteur potentiel, histoire de s'assurer une note potable _ m'ont appris que rien n'était plus vain, qu'on n'est certainement pas obligé de tout comprendre, et que les universitaires aiment beaucoup retrouver leur cours dans votre copie !
   


Nuit marine s'ouvre sur une dédicace à M., figure qu'on retrouvera dans de nombreuses pièces du grand puzzle de sa relation avec le poète. Au fil des quatre grandes parties qui le structurent, différentes phases de fusion, de séparations et de retrouvailles se succèdent, un peu comme s'il s'agissait d'une pièce de théâtre en quatre actes au cours desquelles deux acteurs principaux se débattent, avant de laisser place au monologue du poète. "Histoires corporelles" semble présenter la corde embrasée qui liait les deux protagonistes ; si elle appartient désormais au passé, elle se poursuit en ramifications à travers le rêve et le souvenir. Ces "traces" d'un amour d'autrefois nous sont partagées efficacement par l'insistance sur les souvenirs physiques.

"La mémoire du corps 
Me rappelle à elle. 
Je sens ses mains, 
Je sens mes doigts. 
Cette odeur qui reste là, 
Comme sa pression
En sensation"     
#moinsdedixhuitans


"La main passe" évoque Questions pour un champion le jeu, au premier abord. Mais le poète n'est plus d'humeur à rire. Le souvenir de M., qu'il nomme d'ailleurs "Marine" dans l'un des poèmes, semble s'estomper ; ne reste plus que le rêve et ses miroirs déformants. C'est fini, on sent qu'on oublie même si l'idée ne nous plaît pas ; on veut revivre les bons moments quelques dernières fois avant de passer à autre chose. Mais la vie nous pousse à aller de l'avant. Certains poèmes, sonnant comme des haikus, nous le rappellent.


"Ceux qui cherchent 
Le bonheur
Ceux qui le fuient, 
Trouver quelqu'un
Qui le cherche"   

Dans le court chapitre intitulé "Éclats", je comprends qu'il y a retrouvailles entre M. et le poète, avec leur lot d'euphorie et de méfiance. Mais peut-être que je me trompe. Enfin, "Nuit noire" laisse présager la fin, cette fois-ci la bonne, le chant du cygne. M. est partie sans se retourner.

"Le cavalier s'entête à avoir des nouvelles.
Un cavalier sans tête, 
Aussi. 
Elle ne veut plus donner de nouvelles."

Bien que je sois aussi facile à émouvoir qu'un sac de croquettes pour chats, j'ai trouvé cette partie du recueil particulièrement parlante. Tristesse, perte de repères, mort de l'espoir, et douleurs physiques entraînées par le manque de cette âme soeur qui n'en était peut-être pas une, à bien y regarder... L'auteur réussit le pari de mettre des formules percutantes sur des sentiments bien complexes ! 

En lisant ces vers, qui font fi de toutes des règles de versification _et c'est tant mieux !, un certain nombre d'images me sont revenues en tête ! Bubulle à la gare de Bordeaux (rien que ça, c'est pas triste), en train de m'annoncer qu'on arrive bien au terminus et que, allez allez, les lignes de nos mains se séparent. 
Bubulle toujours, m'accompagnant jusqu'au train que je devais prendre, avec sourire et politesse, dans les règles de l'art. 
Et enfin Bubulle montant me rejoindre dans le TER, peu avant le départ, alors que j'étais en train de me dire que c'était vraiment la loose de se faire larguer avec un jingle SNCF en fond sonore. 
Tiens, Bubulle aurait donc des remords ? 
Coup de théâtre ?
Changement d'avis ? Peut-être que ce n'est pas fini, en fait ?   
"Oh, j'ai oublié de récupérer mon paquet de cookies !
_ ... 
_ Tout à l'heure, j'ai confié un paquet de gâteaux pour que tu le gardes dans ton sac à dos car j'avais plus de place dans le mien. Tu te souviens ?
_Ah oui, bien sûr. Le voilà." 
Eh ouais, c'en était fini pour de bon de mon idylle avec Bubulle (idylle, c'est ironique). J'avais cru trente secondes à un retour de flamme, mais ce dernier élan vers moi n'avait été provoqué que par Michel et Augustin. 

Pas merci M. Alain Crozier de m'avoir fait revivre ça ! Mais il faut saluer votre efficacité : je ne sais malheureusement pas apprécier la poésie, et pourtant Nuit marine m'a fait réagir ! 

Alain Crozier est un artiste qui a de nombreuses cordes à son arc. Poète et plasticien, il est également directeur de la revue littéraire Cabaret (que je découvre).

CROZIER, Alain. Nuit marine. Jacques André Éditeur, 2019. 86 p. ISBN 978-2-7570-0406-7

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vendredi 23 août 2019

Lectures de vacances : Nous autres, simples mortels - Patrick Ness (2016) / Le dernier des yakuzas - Jake Adelstein (2017)


Résumer le livre qu'on a aimé n'est pas toujours facile, mais ça reste plus commode que de parler de celui qu'on a un peu moins apprécié. Pourtant, il faut s'y efforcer : chaque oeuvre a doit à sa chance et mérite d'être valorisée. C'est pourquoi aujourd'hui j'ai voulu mettre en ligne un billet qui sera consacré à deux livres lus ces derniers jours ; s'ils ne me laisseront pas un souvenir indélébile, ils vous plairont sans doute. 



Nous autres, simples mortels - Patrick Ness (2017)

Ca se passe de nos jours, ou dans un futur proche..? aux fins fonds d'une petite ville des Etats-Unis. Une bande d'amis d'enfance voit l'inéluctable séparation post-bac arriver, alors ils essaient de passer un maximum de temps ensemble. Ce ne sont pas des héros, juste des adolescents lambda torturés par leurs problèmes existentiels : réussir sa fin d'année scolaire, obtenir son diplôme, pécho, choisir sa tenue pour le bal de fin d'année, pécho, tenter de se projeter dans un avenir encore brouillé, et aussi pécho, éventuellement.

A côté d'eux, d'étranges événements se produisent : des animaux blessés surgissent des forêts et finissent leur course sur des voitures ou près des habitations, tandis que des explosions se produisent, projetant de la lumière bleues. D'instinct, ils sentent qu'une catastrophe XXL se prépare mais savent qu'ils n'ont pas à s'en mêler : les pros en la matière sont plutôt les "indie kids" un groupe de jeunes sympas mais un peu étranges qui font bande à part, au lycée. Comme la génération qui les a précédés, Mikey et ses amis ont accepté le surnaturel dans leur vie : leur seule marge de manœuvre sera de se protéger assez efficacement pour ne pas figurer parmi les dommages collatéraux. Et pour eux, simples mortels, ce sera déjà pas mal. 




De Patrick Ness je ne connais que deux romans : Et plus encore depuis l'année dernière, et Nous autres, simples mortels rencontré tout récemment, donc. L'écrivain anglo-américain a publié une bonne dizaine d'ouvrages pour la jeunesse, et quelques uns pour les adultes. Il s'est surtout rendu célèbre avec pour Quelques minutes après minuit, son best-seller adapté au cinéma en 2016 _que je n'ai pas encore lu. 

Et plus encore m'avait tellement troublée que je n'ai jamais réussi à pondre un billet dessus, même un tout petit ; c'est sûrement pour cette raison aussi que Nous autres, simples mortels me paraît plus emprunté, moins puissant, si l'on peut dire. Il faut dire que le choix de Mikey comme narrateur a peut-être influencé mon jugement, car c'est quand même, à mon avis, le gars le plus névrosé et le moins attachant du groupe. Henna et Mel ont des allures de petites filles modèles, brillantes et attachées à masquer leur souffrances en étant bienveillantes avec les leurs. Jared est le bon garçon apprécié de tous, sportif, génie des maths et gay. Evidemment. Parce qu'il en faut toujours un, ou deux, ou plus. Dites-moi si je me trompe, mais je crois deviner qu'un roman de Patrick Ness sans personnage gay ou sans référence à l'homosexualité, c'est un peu comme une paella sans riz. Et c'est très bien comme ça d'ailleurs, parce qu'il arrive à traiter ce sujet très justement et sans en faire des caisses. Je n'hésiterai pas à dire que c'est la référence littérature jeunesse en la matière, actuellement.

Et plus encore - Patrick Ness
Gallimard Jeunesse

Il n'empêche que Nous autres, simples mortels manque d'"un fil rouge", d'une trame d'action qui voudrait nous amener quelque part ; c'est vrai que j'ai toujours eu du mal avec les livres ou les films qui ne racontent pas une "histoire" pourvue d'un début et d'une fin, parce que je dois être un peu formatée par des récits qui m'ont beaucoup plu, mais aujourd'hui je me permets de le souligner car c'est une critique que j'ai retrouvée dans beaucoup d'avis de lecteurs, sur Internet. Les attentats et les accidents s'enchaînent, plus ou moins prévisibles, tandis qu'en parallèle, le gentil quatuor cogite et expérimente sa palette d'émotions. Résultat : on obtient un roman curieusement cérébral... J'adhère pas plus que ça, mais au moins c'est original.

Nous autres, simples mortels vaut le détour pour plusieurs raisons : 


  • Son côté "expérimental" est intéressant. Imaginez qu'en se promenant à Londres, un Moldu assiste à un combat entre Harry Potter et Voldemort, et qu'il nous raconte la scène : il pourrait éventuellement décrire la scène, mais il ne pourrait pas mesurer l'enjeu de l'affrontement. Il saurait d'instinct qu'il se passe quelque chose d'important, de grave, mais il ne pourrait rien faire d'autre que continuer sa petite vie en se persuadant qu'il a rêvé. C'est ce point de vue que Patrick Ness a choisi pour raconter son histoire : celui des gens laissés en dehors de la confidence, des particuliers qui observent passivement les super-héros occupés à sauver le monde, là bas au loin. Peu d'auteurs prennent le risque de poser leur caméra de ce côté de la barrière, voilà pourquoi je parlais "d'expérimentation".



"Tout le monde n'est pas nécessairement l’Élu. Tout le monde n'est pas nécessairement le gars qui va changer le monde. La plupart des gens doivent juste vivre leur vie du mieux qu'ils peuvent, en accomplissant des choses qui sont grandes pour eux, en ayant des amis merveilleux, en essayant de rendre leurs vies meilleures, en aimant les gens. Tout en sachant que le monde n'a pas de sens mais en essayant d'être heureux quand même"



  • Ce livre parle des TOCs. Mikey en est atteint, et, à travers lui, l'auteur nous explique plutôt bien ce qui se passe dans la tête d'une personne touchée par cette maladie : les "boucles", les décomptes, les litres de savon et d'eau, la peau qui part en lambeaux à cause d'avoir été trop frottée. Se laver les mains des dizaines de fois, vérifier, revérifier que la porte est fermée, se relaver les mains, et avoir conscience de bout en bout que ce qu'on fait est complètement débile. Le cercle vicieux de la thérapie couplée aux médicaments, qui a pour but de vous aider à "vous en sortir", mais qui vous plonge dans une nouvelle addiction. Ceux qui portent ce fardeau, adultes ou enfants, devraient lire ce roman rien que pour ça, déjà. Y compris ceux qui ont le TOC sélectif... ;-) spéciale dédicace à mon ex !  


Patrick NESS. Nous autres, simples mortels. Gallimard Jeunesse, 2016. 335 p. ISBN 978-2-07-507458-2

Le dernier des yakuzas. Splendeur et décadence d'un hors-la-loi au pays du Soleil-Levant - Jake Adelstein (2018)

Changement de registre. On quitte la fiction, on échange la bande à Mikey contre l'univers bien réel des yakuzas. Si vous êtes fan de culture japonaise, de mythologie du grand bandistisme ou des deux, il est fort probable que ce livre vous convienne. Il y a même des chances pour que vous connaissiez déjà son auteur, Jake Adelstein, un journaliste d'investigation américain qui officie au Japon et qui en parle sans faux-semblants, à ses risques et périls. Avant de sortir Le dernier des yakuzas, il a publié Tokyo Vice, récit assez autobiographique sur ses premiers pas professionnels dans un pays dont il ne maîtrisait pas tous les codes. C'est du moins ce que j'ai compris des résumés piqués ça et là, car je n'ai pas lu ce livre. Avant de commencer, j'ai cherché la définition de "yakuza". Larousse m'a raconté que c'était, au Japon "un membre de la mafia", Wikipedia m'a dit que c'était un "membre du crime organisé", Universalis a ajouté vite fait le terme de "bandit". On a compris l'idée.



Parce qu'il s'est mis en fâcheuse posture après avoir "chié dans les bottes" d'un chef du Yamaguchi Gumi, la plus grande organisation de yakuzas du Japon, Jake Adelstein doit se trouver rapidement un garde du corps ; son choix se porte sur Saigo, dit "Tsunami", un colosse de cinquante ans qui a fait partie d'une bande rivale, l'Inagawa kai, avant de se ranger. Le problème, c'est que yakuza un jour, yakuza toujours : avant d'accepter la mission, Saigo précise bien au journaliste qu'il prend des risques énormes en le couvrant, car il redevient par extension un "ennemi" du Yamaguchi Gumi. Et donc un homme à abattre. Jake Adelstein lui demande ce qu'il peut faire pour lui, en échange de ses services ; Saigo lui demande d'écrire sa biographie, une biographie authentique qui ne fera pas l'impasse sur les aspects négatifs de cette mafia crainte mais respectée.       


Et hop, une petite pub intempestive, c'est cadeau !

Le dernier des yakuzas raconte donc la vie de Saigo, depuis son enfance auprès d'une mère américaine et d'un père japonais, jusqu'à son accès aux plus hautes cimes de l'Inagawa-kai, en passant par sa jeunesse délinquante entre gangs de motards, groupes de rock axés extrême droite, ses problèmes d'addiction à la méthamphétamine et aux soaplands (= aux putes). Sur son chemin, il croisera plusieurs grandes figures de la criminalité et se fera une place parmi eux _ou pas. Le livre suit un ordre chronologique, année par année, ou décennies par décennies, en fonction du parcours du "héros", mais quelques grands principes reviendront régulièrement avant d'être mis à mal dans les tous derniers chapitres, marquant ainsi la fin d'une époque : un yakuza ne s'en prend pas au peuple, ne tue pas les femmes ni les enfants, vole les riches, deale ce qu'il veut, fait discrètement le business qui lui chante, mais doit garder une certaine ligne de conduite coûte que coûte. 


"Au Japon on dit que l'endroit le plus sombre est au pied du phare." 

Honnêtement, j'ai acheté ce livre à la gare de Bordeaux, en attendant un train pour la Rochelle où j'allais retrouver des copines pour le week-end. J'étais encore assez optimiste pour croire qu'on allait être motivées pour lire sur la plage, et je me disais qu'il me fallait un roman policier avec un peu de baston. Finalement, comme une gamine, j'ai craqué sur celui-là parce que sa couverture donnait bien envie. Les histoires de mafieux, enlèvements et doigts coupés, c'est pas trop mon truc, et Le dernier des yakuzas ne fera pas figure d'exception. Mais il faut reconnaître que Jake Adelstein nous permet de nous immerger dans la culture japonaise du XX°siècle, n'hésitant pas à faire de longues parenthèses historiques pour bien situer le contexte de l'action. Certains diront que le style journalistique rend l'histoire dure à suivre et le livre difficile à lire, mais son auteur pouvait-il vraiment faire autrement ? Tatouages, drogue, respect des aînés et de la hiérarchie, code de l'honneur, évolution du positionnement de la police vis à vis des yakuzas... Sans les explications de l'auteur, un public non averti n'aurait pas compris certains enjeux, actions et réactions des différents personnages. 

"C'est ça, la vie de yakuza. Tu fumes où tu veux, quand tu veux. 
Le monde entier est ton cendrier"

Bien malgré lui, Adelstein nous rend les yakuzas sympathiques parce qu'il fait le choix de nous présenter leurs travers les plus puérils, leur boulettes les plus ridicules qui se concluent souvent dans un bain de sang beaucoup moins drôle ! On ne peut s'empêcher de voir dans cette horde de criminels une bande de sales gosses, de Robins des Bois qui perdent un temps fou à se faire des croche-pieds entre eux. Bref, une livre à feuilleter, ne serait-ce que pour son thème central, assez peu courant en littérature ! 

Jake ADELSTEIN. Le dernier des yakuzas. Splendeur et décadence d'un hors-la loi au pays du Soleil-Levant. Points, 2017. Trad. Cyril Gay. 384 p. ISBN 978-2-7578-7029-7

vendredi 9 août 2019

Roux cools : les roux de Riverdale - Saison 1 (2017)

Voilà des années que je n'avais pas mis les rouquins à l'honneur à travers un article estampillé Roux Cool ! La saison 1 de la série télévisée américaine Riverdale est une occasion en or de rattraper le temps perdu ! Enfin, en or... bref, c'est une occasion.

Dès lors, des questions se posent.

Est-ce que ça va vraiment faire plaisir à nos blonds vénitiens préférés ?
Est-ce vraiment une bonne idée de parler de Riverdale ?
Était-ce vraiment une bonne idée de regarder Riverdale ?
Était-ce vraiment une bonne idée d'inventer Riverdale ?...

Voyons cela ensemble.




L'histoire

La petite ville paumée de Riverdale est sous le choc : on a assassiné le jeune Jason Blossom. Qui a commis le meurtre, et pourquoi ? Même si le fils prodige d'un magnat du sirop d'érable a de quoi faire des envieux, personne ne s'était préparé à le retrouver au fond d'un lac, la tête percée d'une balle. Une poignée de lycéens qui le fréquentaient au quotidien tentent de mener l'enquête en parallèle de la police ; à leur tête, on découvre entre autres Archie Andrews, footballeur performant et musicien dans l'âme, sa meilleure amie la gentille Betty et Veronica la New-Yorkaise au caractère bien trempé. Au fil de leurs recherches, la liste des suspects s'allonge et ils découvrent avec étonnement que des connaissances y figurent _quand ce ne sont pas carrément des membres de leurs familles respectives ! Leurs investigations plus échevelées les unes que les autres ne les empêchent pas de continuer à vivre leurs vies de lycéens, entre projets d'avenir et fêtes traditionnelles, cours de musique et club journal, tensions familiales et baise...

Le fil roux de la série 

Je vous propose d'aborder Riverdale en passant en revue les personnages roux présents dans la série. Attention, cette angle d'attaque va sans doute m'amener à spoiler quelque peu !

  • Jason Blossom 
Quand le roux coule...
Quand la série commence, Jason est déjà mort, ce qui, quelque part, le rend plus fascinant que les autres personnages : son fantôme plane sur les siens du premier au dernier épisode, qui nous révèle la clé (ahah, c'est bien le mot) de son assassinat. On n'apprend à le connaître qu'à travers les souvenirs de ses amis, de sa jumelle maléfique et de sa copine. En effet, si Jason Blossom a un jour disparu en barque, c'est parce qu'il voulait quitter sa vie de descendant à hautes responsabilités pour vivre d'amour et d'eau fraîche avec Polly Cooper, la grande sœur de Betty. Mais comme les familles Blossom et Cooper se vouent une haine viscérale depuis des générations, le seul moyen de poursuivre leur idylle était de fomenter une fugue de Riverdale et de faire croire à une issue tragique pour le jeune homme. Sauf que tout ne s'est pas déroulé comme prévu : les Cooper ont fait interner leur fille aînée pour la mettre à distance, en faisant croire à Betty que ce connard de Jason lui avait retourné le cerveau et l'avait rendu dépressive ; quand à Jason... disons que sa petite embarcation a fait une mauvaise rencontre. Plus tard, on comprendra que le roux n'était peut-être pas blanc comme neige, et que Polly faisait aussi quelques cachotteries. Drogue, guerre des gangs, jalousie, concurrence dans l'équipe de foot ? Beaucoup de monde aurait eu une raison d'en vouloir à cette gueule d'ange qui survole la série comme un spectre dont en entend jamais la voix. Entre les non dits, les secrets propres aux familles de "fondateurs" de Riverdale, les casseroles traînées par ceux qui ont eu le malheur de commettre des erreurs dans leur jeunesse et ont le malheur de vieillir là où ils ont grandi... le shérif a bien du mal à y voir clair.     

  • Cheryl Blossom 
"Subissez mon cou roux !"
Dans de nombreuses séries pour ados, vous repérez rapidement la peste, la méchante, celle que tous les personnages ont envie de baffer méchamment sans (presque) jamais oser le faire, parce qu'ils la craignent un peu... A Riverdale, c'est Cheryl Blossom qui détient ce rôle prestigieux. Jumelle de Jason, sa tristesse et sa difficulté à faire son deuil sont parfois prétexte à toutes sortes d'actes cruels envers ses camarades de lycée, surtout les filles. Elle garde sa meilleure dent contre la trop gentille Betty car elle considère que les Cooper sont coupables de la mort de Jason, et aussi un peu parce que c'est plus facile de s'en prendre à elle qu'à quelqu'un qui serait capable de lui renvoyer deux ou trois vannes dans la gueule. Parce qu'en famille on lui a toujours nettement préféré Jason, Cheryl s'impose comme elle peut, en étant le leader tyrannique de l'équipe de pom-pom girls locale et en organisant des jeux à la con pour foutre la merde, à ses heures perdues. En bon suppôt de Satan, il lui arrive aussi d'user de son charme, de sa chevelure rousse et de ses yeux de biches pour jouer les victimes et arriver à ses fins. Certains s'entre vous diront qu'à la fin de la saison, elle tente de se racheter et devient presque touchante lorsqu'elle galère à se faire remarquer par son vieux qui n'en a rien à cirer, mais pour ma part, il faudra plus qu'une pseudo tentative de suicide en robe de mariée sous la glace (dont elle a pris soin d'informer absolument tout le monde) pour que je la trouve attachante.
  • La mère Blossom 
Pénélope de son prénom.
Penelope Blossom est une femme de la haute, respectueuse des traditions et pas fâchée que les classes sociales soient assez bien séparées pour qu'elle n'ait pas à interagir avec le petit peuple : que les gueux restent à leur place ! Mère de famille bien soumise à son mari et prête à tout pour que les secrets de famille soient bien gardés, elle fera une entorse à ses principes en essayant de mettre de grappin sur Archie, pourtant fils s'ouvrier sans aucune prétention ; il faut dire qu'à ce moment de la série, elle a quelques idées derrière la tête. Mais si la mère Blossom est sincèrement effondrée par la perte de Jason, elle n'en est pas moins imbuvable avec Cheryl, qui le lui rend bien. 

  • Archie Andrews 
Ah, là il est bien carotte ! C'est parfait !
Ah, le héros ! S'il était riche, Archie Andrews serait le gendre idéal. Mais on est aux Etats-Unis, alors on lui pressent un destin de self-made-man voué à bâtir une multinationale à la sueur de son front. Après un été passé à travailler dans le bâtiment, il retourne au lycée avec des muscles impressionnants et des textes de chansons romantico-torturées plein le carnet à spirales ; il faut dire que sa prof de musique l'a bien inspiré en couchant avec lui au bord du lac, le soir de la fête nationale _histoire de bien clôturer l'année scolaire. Tape des pieds si ça te rappelle Dawson. Résultat, en septembre, Archie a le cerveau retourné : va-t-il miser sur ses prédispositions au foot, qui lui ouvrirait les portes de la fac, ou va-t-il se consacrer à la musique et embrasser la vie d'artiste, une fois qu'il aura obtenu son diplôme ? Dilemme. Les filles qu'il croise sur son chemin se pâment, mais il ne s'en rend pas compte. 

  • Mary Andrews 

Archie vit seul avec son père, car ses parents sont séparés ; on sait seulement que sa mère est avocate à Chicago, ce qui va être tout à fait pratique quand certains personnages auront des ennuis avec la justice à la fin de la saison. Elle fait cependant quelques les apparitions dans les derniers épisodes, pile pour faire sa belle au bal de fin d'année et remuer la merde de l'époque où les parents de nos petits héros étaient eux-même au lycée. Bref, comme elle est rousse, il faut bien qu'on en parle aussi. 

Ce gros plan sur les flamboyants roux de Riverdale ne nous dispensera pas d'un rapide résumé que cette saison 1, que nous n'avons pas manqué de visionner attentivement.

Saison 1 - Résumé express 


Episode 1 

Tout Riverdale est en émoi après la disparition de Jason Blossom, donc. On sait qu'il est mort, qu'il s'est vraisemblablement noyé, mais pas de trace du corps pour l'instant. L'enquête suit son cours.

Après avoir passé l'été à bosser pour son père, Archie redevient sociable et prévoit d'aller dîner au Pop's avec Betty, son amie d'enfance. Autant s'habituer à cette cafétéria qui fait un peu années 1950, à la différence qu'on peut s'y connecter en wifi, car vous la verrez souvent : son enseigne est le QG des lycéens et de leurs parents ; à moins que ce ne soit le seul resto de la ville ? De son côté, poussée par Kevin, alias son ami gay qui squatte sa chambre comme une bonne biatch, la gentille Betty entend profiter de ses retrouvailles avec Archie pour lui faire une big déclaration en bonne et due forme. Hélas, elle n'en aura pas de temps : alors qu'ils viennent à peine de poser leurs culs sur la banquette, l'arrivée très remarquée de la ténébreuse Veronica Lodge lui coupe l'herbe sous le pied. C'est le coup de foudre : Archie n'a plus d'yeux que pour la New-Yorkaise, qui, sans aucune gêne, déboule à leur table et commence à raconter sa vie. Prends-en de la graine, blondinette ! Consciente que Veronica vient de lui voler la vedette bien comme il faut, Betty la vertueuse se fait une mission de faciliter sa découverte de la ville et du lycée de Riverdale. Certains diront que c'est maso, d'autres que c'est chrétien. Toujours est-il que, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, elle s'engage à fond dans son rôle de marraine, à coups de grands sourires masquant sa souffrance intérieure d'évangéliste. Elle ne regrettera pas ses efforts : derrière son fort caractère et sa capacité à dire les vérités qui blessent, Veronica a de grandes qualités et saura se montrer reconnaissante.


Sale temps pour Archie : son père n'accepte pas vraiment ses choix de vie, la prof de musique avec qui il a couché ne veut plus trop le voir et n'est pas disposée à témoigner au sujet de l'affaire Blossom : en effet, alors qu'ils étaient en train de baiser près du lac, ils ont entendu un coup de feu qui coïnciderait avec le lieu et l'heure de la disparition de Jason. Leur relation étant bien entendu secrète, Miss Grundy n'a pas très envie de dire ce qu'elle foutait là avec son élève.

Veronica essaie de s'intégrer au lycée ; mais quelques meufettes drivées par Cheryl Blossom lui mettent les bâtons dans les roues. Ou dans les roux ?

On découvre vite fait Jughead, le meilleur pote d'Archie, un pseudo rebelle portant un bonnet et qui squatte un cinéma à l'abandon. Il parasite aussi la cafétéria avec son ordi, sur lequel il écrit des textes sûrement très sombres. Oui, Jughead nous est vraiment présenté comme le type louche qui a forcément des choses à cacher. Mais on n'y croit pas trop.   

Interdit aux deux roux !

Episode 2 

Au cours d'un énième jeu à la con organisé par la machiavélique jumelle Cheryl, Archie et Veronica se galochent au nez et à la barbe de Betty, qui rentre chez ses parents en tirant la gueule. Une fois sur place, sa mère l'assomme à coups de "je te l'avais bien dit, de pas traîner avec ces dépravés", et elle s'en va chercher le respect au fond de son pieu. Archie et Veronica sont rongés par la culpabilité, évidemment, tandis que Cheryl peine à masquer sa jubilation. On s'étonnerait presque qu'elle en ait encore sous la pédale, alors que le cadavre de Jason est encore sur la table d'autopsie. Jughead commence à écrire un livre inspiré de ce fait divers, et en vient à soupçonner Archie d'avoir mis un grain de sable dans le destin de l'autre roux. A la fin de l'épisode, Cheryl se dit "coupable" de l'assassinat de son frère. Ouh mais c'est la folie, on a trop de suspects !

ça se regarde en chien de faïence !


Episode 3 
Veronica passe la soirée avec Chuck, le fils de l'entraîneur de l'équipe de foot du lycée. Le lendemain, elle se rend compte qu'il fait courir des rumeurs sur elle via les réseaux sociaux. Avec l'aide de Betty, elle entreprend de se venger : grâce à leur initiative, elles apprendront que leur cas n'est pas isolé. Méfiez-vous des réseaux sociaux, les enfants ! Le père d'Archie rencontre la prof de musique de son fils, intrigué par sa passion soudaine pour la composition ; suite à l'entretien, il décide de l'encourager en lui aménageant le garage. Cheryl revient sur ses aveux lorsqu'elle se retrouve face à la police, tandis qu'Archie se décide à dire qu'il a entendu un coup de feu le matin du drame.

*pète discrètement dans la piscaille*

Episode 4
Le Twilight, drive-in local, est sur le point d'être démoli pour le plus grand malheur de Jughead, qui le squatte, donc. Betty et Veronica découvrent qu'Archie se tape leur prof de musique ; elles décident de la coller comme des sangsues et trouvent des choses suspectes en fouillant sa voiture. Toutes deux engagent Archie à se méfier et à essayer d'en savoir plus sur le parcours de cette enseignante arrivée récemment à Riverdale. Alors que toute la ville, les jeunes comme les vieux, se sont réunis pour assister à la dernière séance du Twilight, le scandale éclate : la mère de Betty a grillé le journal intime de sa fille, et en sait donc autant qu'elle sur la nature des relations qu'entretiennent le rouquin et sa prof. La jeune femme n'a d'autre solution que de quitter la ville sur le champ ! On ne la reverra plus de toute la saison... Durant la soirée, Kevin choppe un membre du gang des South Side Serpents nommé Joachin.


Episode 5
Cheryl veut présider les obsèques publiques de son frère, mais sa mère la rabaisse et se fout de son éloge funèbre. Elle ressent le besoin d'inviter Véronica à la soirée précédant la cérémonie, sans pouvoir expliquer pourquoi. On comprend qu'elle commence à apprécier sincèrement la nouvelle, d'autant plus que ses parents sont hostiles à la New-yorkaise : "N'oublie pas que son père est en taule". Alors qu'elle bosse au Pop's, la mère de Veronica découvre un carton contenant un serpent (vivant) ; elle y reconnaît un message subtil des South Side Serpents, et en parle au père d'Archie. Betty et Jughead continuent de jouer les détectives en herbe, déterminés qu'ils sont à en savoir plus sur la mort de Jason ; en parlant avec son père, la blonde parfaite comprend que sa propre famille est en froid avec les Blossom depuis des générations et que le coupable pourrait bien se trouver parmi les siens. Raison de plus pour essayer de retrouver sa grande soeur Polly, qu'elle n'a pas vue depuis longtemps car elle "se soigne" "très loin" de la maison... Pas très précis comme infos, quand même.



Episode 6
Archie veut chanter pour la fête du lycée mais il a le trac et se plante aux auditions ; Val, la chanteuse des Pussycats, mythique (et unique....) groupe musical du lycée, jette l'éponge pour l'aider. Cela désespère la leader du groupe nommée Josie, qui doit recruter au plus vite un nouvelle soliste. Veronica se présente pour la remplacer, et bien qu'elle soit riche et blanche, sa candidature est acceptée. Faute de grives on mange des merles. Veronica compte bien faire son trou chez les Pussycats, quelles que soient les difficultés rencontrées ; il faut dire qu'après avoir surpris sa mère dans les bras de Fred Andrews, la citadine est prête à se lancer dans toute activité qui lui permettra de canaliser sa rage. A force de recherches, Betty et Jughead finissent par localiser Polly et à se rendre dans le centre d'hébergement catho pour jeunes paumés dans lequel elle est enfermée. Ils découvrent que la jeune femme est enceinte de Jason, dont elle semble ignorer la mort. Parce que les enquêtes, ça rapproche, Betty et Jughead finissent par se galocher.




Bon, à partir de là, je commence à vraiment bien spoiler. Donc si vous voulez découvrir la série par vous-même, je vous conseille de ne pas lire le résumé des épisodes suivants ! 





Episode 7
Hermione (la mère de Veronica) travaille pour son nouveau copain Fred Andrews (vive le piston), et lui lâche une propriété appartenant à son mari après avoir imité la signature de sa fille. Fermement opposée à cette démarche, la citadine est bien décidée à lui mener la vie dure, en contrepartie. Archie découvre que Jughead squatte le lycée depuis la destruction du Twilight, car son père alcoolique n'a plus de quoi subvenir à leurs besoins. Archie arrive à convaincre son père d'embaucher ce type, histoire qu'ils puissent redresser leur situation. Vive le piston acte II. Polly fuit son asile ; tout le monde sait à présent qu'elle est enceinte _faut dire qu'on peut plus vraiment le louper. Lors de leur visite de courtoisie, Jughead et Betty avaient appris que Jason avait caché sa voiture dans les bois. Ils la retrouvent et y découvrent des choses suspectes. Devinez quoi ?

De la DROGUE !

Episode 8
Veronica et Betty organisent la baby shower de Polly, pensant que ce serait l'occasion de réconcilier la mère Cooper et la mère Blossom avec la jeune femme. C'est vraiment un truc de fou, cette série. Un jour les personnages se frappent au sang, le lendemain ils ont un flingue sur la tempe, et le surlendemain ils jouent à la dînette ! Bref, la petite fête tourne vite au pugilat et les deux daronnes finissent par se battre pour récupérer Polly à la maison. Fred ne s'en sort pas : ses ouvriers l'ont planté pour des contrats plus juteux et il ne peut entreprendre le chantier du Drive-In. Archie tente de lui venir en aide en ramenant des lycéens costauds capables de bosser dans le BTP. Tous savent que Blossom veut retarder au max les travaux et que c'est lui qui a soudoyé les ouvriers pour qu'ils lâchent Fred Andrews. Un soir, lesdits lycéens se font boxer par de sombres inconnus, peut-être les Serpents... mais pas forcément, en fait. D'ailleurs, puisqu'on parle des South Side Serpents... on apprend que le père de Jughead est le boss du gang.

Ambiance

Episode 9
Les Blossom mettent leur dévolu sur Archie et insistent pour qu'il accompagne Cheryl à la "cérémonie d'entaille de l'arbre", un rite en lien avec le sirop d'érable. Il n'est pas très chaud, cet univers de bourges le laisse un peu perplexe. Alors, pour l'appâter, ils lui promettent un contrat avec un producteur afin qu'il puisse percer dans la musique, et ça marche. Voyant que son père et sa copine Val froncent du nez, il se ravise et négocie auprès de Clifford Blossom une autre forme d'aide (sans lien avec la prostitution, vous inquiétez pas). Betty profite du rapprochement entre Archie et les Blossom pour glaner des infos sur sa soeur Polly. Mais cette dernière semble avoir rompu le contact définitivement avec sa famille. Ce n'est en fait qu'une façade ; elle a simplement compris que les Blossom avaient un lien avec la disparition de Jason mais elle ne veut pas qu'ils comprennent qu'elle a compris. Eh ouais, y a pas que les hormones qui travaillent ! Veronica a compris que son père était un vrai con capable de briser d'autres familles, comme celle de la jeune Ethel, une lycéenne de sa connaissance qui semble isolée et malheureuse.



Episode 10
C'est l'anniversaire de Jughead ; il a décider de ne pas le fêter, comme chaque année. Mais Betty et Archie tiennent absolument à lui organiser une petite soirée surprise : c'est ce qui s'appelle chercher la merde. Evidemment, ça se passe mal, Jughead se sent hyper mal à l'aise, se prend la tête avec son pote, sa copine, et tente de se casser de sa propre fête. Chuck le harceleur refait surface et se pointe à la soirée d'anniversaire, après que Cheryl lui a monté le bourrichon avec ses idées de vengeance envers Betty. Cet épisode est vraiment étrange, ou étrangement situé dans la série, je sais pas. Veronica refuse de préparer une déposition en faveur de son père car elle considère qu'il est à sa place en taule, et d'ailleurs, qu'il y reste le plus longtemps possible. Mais celui-ci lui écrit une lettre dans laquelle il lui indique qu'elle ferait mieux d'aller dans son sens avant que ses ennuis ne retombent sur sa mère... La jeune fille est perdue, elle sent qu'elle n'a pas toutes les cartes en main pour comprendre la situation.



Episode 11
Le bal du lycée s'organise, youhou. En attendant, la mère Cooper invite Jughead et son père à dîner, histoire de les matraquer de questions gênantes. Pendant ce temps, Archie et Veronica fouillent la maison de FP _c'est ainsi qu'ils appellent le père de Jughead, pour le coup je pense pas que ça veuille dire Fils de Pute, histoire de s'assurer que ce n'est pas lui le meurtrier. Ils ne trouvent rien, en effet. A priori, c'est pas lui qui a couiqué Jason. Ouf. Un peu plus tard, FP annonce à Jughead qu'ils vont partir à Toledo, ce que le zarbi refuse en bloc, puisqu'il ne veut pas quitter Betty. Lorsqu'il apprend le coup monté dont son père a fait l'objet, il pète un câble et s'isole. Betty tire la gueule comme il se doit à Archie et Veronica, à qui elle reproche d'avoir comploté avec sa mère. La mère d'Archie fait mine de se rabibocher avec Fred pour amadouer son fils. Après le bal et le succès sur scène du rouquin, elle lui propose de la suivre à Chicago pour apprendre la musique. A la fin de l'épisode, FP est arrêté par les flics car on a retrouvé chez lui l'arme qui a tué Jason Blossom ; sauf qu'elle n'y était PAS lorsque les lycéens ont retourné sa baraque. Strange ! 




Episode 12
FP a avoué le meurtre de Jason Blossom, bien qu'il ne soit pas coupable. Il invente un scénario qui tient la route et va donc en prison ; mais Archie et les autres n'y croient pas et pensent qu'il couvre le vrai meurtrier. Jughead fait bien la gueule et pense que son père est à la place qui lui va le mieux. Joaquin en sait beaucoup plus qu'il ne veut bien le dire, mais n'accepte de balancer sa version qu'à Kevin. On suppose que c'est lui qui transmettra la clé USB contenant la vidéo du meurtre. Ah la la qu'est-ce qu'on ferait sans les nouvelles technologies !!!! On apprend aussi que la famille Cooper et la famille Blossom sont liées par le sang ; les enfants de Polly sont donc le fruit de l'inceste. Allez, on parie sur les tares qu'ils auront ?

Il est temps que la série se termine, ça devient n'importe quoi.

Episode 13
Comme le meurtre est résolu, on ne sait plus trop quoi raconter alors on se penche sur les relations qu'entretiennent les personnages, sur les grandes déclarations d'amitié et politesses en tous genre "tu es sûre que ça ne te dérange pas que je me tape le mec que tu dragues dans succès depuis tes cinq ans ?" "_Mais pourquoi ça me dérangerait, puisque je suis tombée dans les bras d'un type hyper bizarre et solitaire qui vient d'entrer dans un gang !"

La mère de Veronica vire les ouvriers Serpents et propose à Fred de racheter son entreprise pour la gérer avec son mari ; le comble de l'insolence, quand on sait que c'est lui qui l'a sorti de sa merde en lui offrant un boulot de comptable dans sa boite et quand on sait qu'ils ont couché ensemble pendant pas mal d'épisodes ! C'est ce qui s'appelle se faire niquer.

Cheryl tente une dernière fois de voler la vedette à tout le monde en faisant une tentative de suicide dans un lac gelé, avant de foutre le feu à la baraque familiale. Voilà voilà. A la fin, Fred se fait tirer dessus par un type cagoulé alors qu'il est chez Pop's avec Archie, et la saison s'arrête là ! Oohh le cliffhanger de ouf !!!!


Verdict : la roux tourne 

A première vue, Riverdale ne présente pas d'autre intérêt que celui de mettre en scène des lycéens pour des lycéens ; on y retrouve bien les figures incontournables du genre : la gentille fille rangée, son alter ego masculin qui brise les coeurs sans le vouloir et qui se tape sa prof, la nouvelle au lourd passé qui débarque de New York et qui vit son arrivée à la cambrousse comme une déchéance, le footballeur costaud et con, le gay, la peste, le type chelou au faciès de coupable idéal, les parents puritains, le gang local... La rentrée, les méga teufs, le bal de fin d'année, tout semble être rangé bien à sa place.

Mais en y regardant de plus près...

Euh...

Non, en fait Riverdale ne présente pas d'autre intérêt.

Allez, je suis méchante gratuitement, c'est pas si pire.

Ma pote Jessica me disait que les clichés dans Riverdale étaient intéressants dans la mesure où ils étaient zoomés (la famille des blonds, la famille des roux, les latinos, les gangsters au visage ingrat...) pour mieux être détournés. Bon, j'ai pas trop vu le détournement, mais mon esprit critique n'est peut-être pas aussi aiguisé que le sien, tout simplement. Ce que je vois, c'est que le seul mec black de l'histoire est un violeur, que le meilleur ami gay de Betty passe son temps à rappeler qu'il est gay, et que le personnage du dépravé au grand cœur arriverait à se faire lyncher dans le village de mes parents. Allez, je suis mauvaise langue : le groupe de chanteuses populaires dans le lycée font un gros effort de mixité. D'abord hostiles à une collaboration avec des élèves blancs, elles se raviseront en intégrant Veronica et Archie dans leurs projets musicaux.

"Pourquoi est-ce que tu as regardé la saison 1 jusqu'au bout, alors, rageuse ?" Me demanderez-vous. Ben, Riverdale n'est pas une série parfaite au niveau du fond ; entre les événements inutiles, les petites incohérences du scénario, les personnages qui disparaissent au bout de quelques épisodes, le dénouement tiré par les cheveux, sans parler de LA preuve finale... on aurait de quoi lâcher l'affaire. Pourtant, on ne le fait pas, ce qui prouve qu'on se laisse prendre au jeu. Donc, que ça fonctionne, l'air de rien. Allez savoir pourquoi, les grimaces de Betty et de Veronica m'horripilent autant que leurs crises de larmes pour tout et rien, et ce, depuis le premier épisode ; Jughead me fait rire alors qu'il n'est pas censé être drôle. J'ai envie de tarter Archie et Cheryl pour différentes raisons. Les adultes ne sont pas des plus charismatiques. Malgré tout, j'ai gardé l'envie de savoir la suite à l'issue de chaque épisode, de savoir qui avait tué Jason. Il se passe tellement de choses que plus on avance, plus on se perd dans les ramifications des arbres généalogiques des Cooper et des Blossom, moins on comprend !



Esthétiquement, pas grand chose à redire ; les jeunes acteurs ont tous une plastique ultra parfaite, les scènes en pleine nature sont belles à regarder, tout est très (trop ?) propre... La saison s'étire sur 13 épisodes d'une cinquantaine de minutes, qu'on sent pas passer, honnêtement. Surtout quand on se marre ; et y a quand même matière à se marrer avec tous les stéréotypes présents dans la série. Après, je ne sais pas si j'aurai la motivation de me lancer dans les saisons 2 et 3, l'affaire Jason Blossom étant résolue. C'était vraiment ce qui me retenait en priorité, loin devant les personnages.

J'ai peut-être passé l'âge, ou alors j'ai perdu de mon ouverture d'esprit, mais je trouve quand même que Riverdale est avant tune série pour ados un peu mièvre. Un savant mélange de Dawson, de Vampire Diaries, de Buffy à ses débuts et de soupe Royco Poireaux - pommes de terre. Et ma foi, il en faut ! D'ailleurs, y a du monde qui regarde et c'est pas pour rien ! 

Plus tard, si j'ai le temps, j'écrirai un billet sur les comics qui ont inspiré la série ; j'ai trouvé un best of sympa des Archie Comics, mais il est en anglais. Donc soyez pas trop pressés !



Riverdale 
Roberto Aguirre-Sacasa 
Personnages inspirés de Archie Comics
Etats-Unis 
Production : Berlanti / Archie Comics / CBS / Warner Bros 
Saison 1 : 2017. 13 épisodes de 42-47 minutes 
Disponible sur Netflix