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dimanche 23 octobre 2022

[MANGA] My broken Mariko - Waka Hirako (2021) / Les vacances de Jésus & Bouddha - 1 - Hikaru Nakamura (2008)

A l'école, en bonne fragile, j'ai toujours fait en sorte de me mettre bien avec des copines grandes, costaud, et/ou fortes en gueule. Bien sûr, ce n'était pas forcément voulu ; les associations se faisaient naturellement, régies par l'instinct de survie, et je pense que ça fonctionnait parce que mes protectrices avaient besoin de se sentir dans ce rôle-là. C'est toujours valorisant d'être nécessaire à quelqu'un d'inoffensif, et puis ça donne un sens aux journées, à un âge où on navigue à vue. 

Toujours est-il que cette technique m'a permis de passer ma scolarité sans jamais être emmerdée, alors que je répondais à tous les critères de la victime idéale.

Allez, un petit manga qui parle de suicide pour bien amorcer l'automne ! 

My broken Mariko


Tout d'abord merci à toute l'équipe des libraires fous de l'excellent podcast BD Le Gaufrier, car c'est en écoutant l'épisode 54 que j'ai appris la sortie de My broken Mariko, un one shot de Waka Hirako.

Ce titre avait attiré mon attention car en présentant leur sélection du jour, l'un des animateurs avait fourché et dit "moricaud" au lieu de Mariko, ce qui avait généré un fou rire chez les intervenants _et chez moi aussi, d'ailleurs, alors que j'étais en train de courir. Du coup, j'avais fini mon parcours avec ce vieux hoquet qui te brûle le dos et qui met plus de temps à te quitter que la plupart de tes ex ! 

L'histoire

Maltraitée par son père et abandonnée par sa mère, la gentille Mariko avait fini par se briser de l'intérieur et Tomo la grande gueule s'était fait une mission de la protéger.

Depuis leur adolescence, elle la tenait ainsi à bout de bras, l'empêchant de s'auto-détruire, s'efforçant de la garder éloignée des types violents.

Malgré tous ses efforts, Mariko s'est suicidée, à 26 ans, au moment où tout semblait aller mieux, et maintenant Tomo est sous le choc.

En proie à la tristesse, à la culpabilité de n'avoir pas vu le coup venir, elle pète un câble et décide qu'elle fera ses adieux à sa meilleure amie comme il se doit, faute d'avoir pu empêcher de pire de se produire.


Tomo se rend chez le père de Mariko, largue toute sa colère sur lui en lui renvoyant ses crimes à la gueule, et dérobe les cendres de la défunte. Galvanisée par la réussite de son expédition, elle prend quelques affaires, l'urne funéraire et monte dans un bus en direction de la Pointe de Marigaoka, un patelin en bord de mer où Mariko et elle avaient prévu d'aller en vacances, un jour.

C'est le début d'un road trip déroutant mené par une fille encore incapable de quitter l'état second destructeur dans lequel sa peine la maintient.


Tomo perdante et perdue  

Si le périple de Tomo est parsemé de nombreux flashbacks qui nous en disent long sur la jeunesse catastrophique en tous points de la jeunes Mariko, on ne sait finalement pas grand chose sur sa meilleure amie protectrice. Grande gueule et intrépide, elle n'en est pas moins fragile et mal entourée : après tout, elle affirme à plusieurs reprises n'avoir "que Mariko", ce qui laisse penser qu'elle n'est pas très bien entourée elle non plus. Que ce soit dans les séquences souvenirs ou dans sa vie d'adulte, Tomo apparaît toujours seule ; il n'est presque jamais fait mention de sa famille ou d'autres amis. A présent coincée dans un boulot stressant qui n'a pas l'air d'être un aboutissement professionnel pour elle, elle n'arrive pas à se défaire de ce soupçon de loose qui la suit partout, collé sous sa semelle comme un vieux chewing-gume. A plusieurs reprises en lisant le manga, j'ai eu l'impression que son obstination à vouloir sauver sa copine était une façon de combler un vide dans sa propre existence.  


La voir mourir après des années passées à essayer de la faire vivre lui laisse un goût amer de ratage total et d'injustice _puisqu'après tout, le principal responsable de la dépression de Mariko est plus vivant que jamais. Même si les critiques que j'ai pu lire et regarder ne semblent pas l'interpréter ainsi, il me semble que My broken Mariko est vraiment centré sur le drame de Tomo ; d'ailleurs, l'action ne pourrait se mouvoir sans sa colère dévastatrice contre tout et tout le monde. Y compris contre Mariko elle-même, qui s'est "sauvée" en l'abandonnant à sa souffrance. 


Prozac d'or mérité ! 

L'énorme succès de ce manga est complètement justifié ! OK, c'est une histoire très triste et émouvante comme on pouvait s'y attendre, abordant des sujets très graves, et pourtant on ne se sent pas plombé en le lisant. Tomo a une rage et une énergie communicatives, et son personnage de fumeuse compulsive survoltée à quelque chose de comique, parfois. Ses traits m'ont même fait penser vite fait à l'Agrippine de Claire Bretécher.

My Broken Mariko raconte très bien la détresse de la survivante malheureuse d'un binôme fusionnel qui a tout fait pour empêcher la fin tragique de l'autre et qui doit composer avec son échec.

Un manga pour lycéens et adultes, pas pour les plus jeunes !

Manga découvert grâce au super podcast BD #legaufrier

#bookstagram #deuil #manga #sousentendusgouinistiques #tameilleureamie #oubliezlekawaii #violence #mybrokenmariko #kioon #seinen #mediathequemargueriteduras #wakahirako #ceuxquirestent

My broken Mariko
Waka Hirako
Ki-oon seinen - 2020


Deux salles, deux ambiances ! 

On enchaîne avec le premier tome d'une série de mangas beaucoup plus légère : Les Vacances de Jésus & Bouddha. 

Hikaru Nakamura
Kurokawa, 2008

Fatigués par le passage à l'an 2000 qui leur a donné beaucoup de travail, Jésus et Bouddha ont décidé de s'accorder des vacances 🌴 sur Terre.

C'est donc en touristes qu'ils posent leurs valises au Japon, en ce début de 21ème siècle. Ils louent un appartement et s'immergent avec curiosité dans la foule des humains qu'ils ne connaissent que "vus du ciel".

On suit donc leur quotidien, entre les aléas de la colocation, les rues animées, les festivals traditionnels japonais, le métro et la piscine.

Pas vraiment d'intrigue dans ce premier tome de la série, mais pour le coup, ce n'est pas gênant : voir Bouddha et Jésus aller de déconvenues en émerveillement tels deux étudiants paumés nous ravit déjà pleinement ! 😀

Comme pouvaient le laisser présager son titre et sa couverture, les Vacances de Jésus et Bouddha est un manga comique, qui joue beaucoup sur les quiproquos entre les deux "figures divines" et les humains qu'ils croisent...

Encore une découverte sympa faite grâce aux #mystérieuxétonnants !

Si le titre vous chiffonne, détendez-vous ! Toutes les religions sont respectées, d'ailleurs on n'en parle pas tant que ça ! Ici, les blagues ne sont jamais fondées sur le mépris du bouddhisme ou du christianisme. Au pire, si comme moi vous n'êtes pas trop calé sur la vie de Siddhartha et de Jésus, vous apprendrez deux ou trois trucs au passage !


#manga #bookstagram #leblogdejésus #bouddhasmile #hydrophobie #usbeketrika #japon #vinted #bouddhasmile #kurokawa #hikarunakamura #lesvacancesdejesusetbouddha


mardi 16 août 2022

[TÉMA LA BIBLIOTHEQUE] La tête sous l'eau - Olivier Adam (2018)

L'autre jour, nous nous sommes fait une frayeur, au collège. Un gosse de cinquième demi-pensionnaire s'est volatilisé juste avant la reprise des cours de l'après-midi. Il faut savoir qu'à ce moment de la journée, les assistants d'éducation guettent les allées et venues des petits et qu'il est impossible de sortir sans autorisation écrite. Vraiment, ça ne rigole pas. L'élève, qui est d'ailleurs connu pour son exemplarité, était au CDI lors de la pause du midi _soit juste avant l'évaporation, et il en était ressorti en même temps que les autres. Du coup, en le voyant noté absent lors de la première heure, j'ai craint d'avoir loupé quelque signe annonciateur d'un malaise. Je ne voyais que ça comme possibilité ! En fait, il était tout bonnement rentré chez lui, pour on ne sait quelle obscure raison. Par l'intermédiaire de ses copains, nous avons appris qu'il n'avait pas trop la pêche de jour-là, sans plus.  

Depuis, il est revenu régulièrement au CDI, toujours calme et souriant ; bien des fois j'ai eu envie de lui demander ce qu'il lui avait pris, mais il m'a semblé que ce n'était jamais le bon moment, et que c'était intrusif. Piétiner les consciences avec de gros sabots n'est jamais productif ; il vaut mieux laisser venir, et accepter le fait que, parfois, on n'est pas le plus apte à recueillir la parole. 


Quelques jours après son escapade, le psy-EN m'a demandé s'il était possible de proposer au gamin en question des BD et romans "sur la thématique du traumatisme". Je me suis prêtée à l'exercice de sans problème, parce que ça par contre, c'était dans mes cordes.  

Très régulièrement, on se retrouve face à des enfants qui vivent des situations ultra-glauques sans qu'on puisse le deviner, parce qu'ils ont l'art de garder la face, et/ou parce que l'école est pour eux le seul moyen de couper avec la réalité. Cela donne le vertige de se dire qu'on doit commettre de nombreuses boulettes porcasses.  

Bref, c'est en faisant une recherche de livres dans ce contexte-là que je suis tombée sur le livre La tête sous l'eau d'Olivier Adam. 


L'histoire

Une famille de Parisiens déménage à Saint-Malo, s'adaptant ainsi au projet professionnel du père, journaliste et écrivain à ses heures. Ils sont quatre : les deux parents, et leurs deux enfants, âgés de quinze et dix-sept ans, ou dans ces eaux-là. Les adultes sont ravis de quitter le tumulte de la capitale pour le bord de mer, ou du moins jouent le jeu, mais pour Léa, la fille aînée, c'est très compliqué. Elle laisse derrière elle toute sa vie sociale ; la ruralité ne lui correspond pas... Elle se met à tirer la gueule H24. Quant à son frère Antoine, il s'en fiche un peu : être un geek asocial en Île-de-France ou en Bretagne, c'est bien pareil. 

Un soir, Léa disparaît, comme aspirée dans la foule du festival auquel elle assistait. Elle va être recherchée pendant de longs mois, plongeant sa famille dans l'angoisse et la stupeur. Chacun va gérer la situation comme il peut : la mère va se barrer avec son amant, le père va tomber dans l'alcool et la dépression, le fils va lâcher le programme de seconde pour se réfugier dans le surf, un sport qu'il ne connaît pas du tout et dans lequel il ne semble pas avoir d'aptitudes particulières. 

Après quelques mois d'attente, Léa est retrouvée, en apparence saine et sauve. En apparence seulement. La jeune fille a été séquestrée et maltraitée pendant des jours, ce qui l'a brisée de l'intérieur. Ses proches ne savent comment s'y prendre pour rétablir un lien digne de ce nom avec elle, car son mutisme, son regard vide et ses crises de panique les désarçonnent complètement. Médecins et psys recommandent de laisser faire le temps, mais tant qu'elle ne parle pas, l'enquête ne peut avancer et son agresseur est toujours dans la nature. 

Attention SPOILER, des moments-clés du livre vont être dévoilés dans les paragraphes suivants. 

En regardant tous ces personnages déprimés et à bout de nerfs s'écharper, culpabiliser, attendre, faire leur introspection, chercher des solutions... je me suis dit que La tête sous l'eau pouvait faire un bon Larme de Rasoir, et même concourir pour les Prozac d'Or

Mais non, on va plutôt le classer dans Téma la bibliothèque, pour les raisons qui suivent... 

Ah mais c'est celui-làààà !  

Milieu-fin du roman. Après un gros travail effectué avec la psy, sa copine et son frère, Léa a réussi à pousser la porte du commissariat pour dénoncer son agresseur. Elle leur raconte tout ce qu'elle a vécu entre la soirée du festival et sa libération, et donne aux policiers assez d'éléments pour qu'ils puissent faire un portrait robot. Bien que ces informations soient confidentielles _ même les parents et le frère n'ont aucune idée de ce qui s'est dit pendant l'entretien de Léa avec les flics_, la fuite ne peut être évitée et tout est déballé en long et en large dans la presse locale. 

Antoine est au lycée ce jour-là, et un sous-entendu qui lui est fait en classe à propos de sa soeur lui fait péter un câble. Il quitte le cours comme un gros schlag qu'il n'est pas, et va se planquer au CDI. Riche idée ! 

A ce moment du récit, chacun pourra apprécier le portrait très peu élogieux qui est fait de la prof doc de l'établissement malouin. Bizarrement, il a tout de suite suscité chez moi un air de déjà lu... 

Mais où donc était-ce ? 

Ah, ça me revient ! Bien sûr !! C'est celui-là, le "fameux" roman d'Olivier Adam qui a fait si grand bruit dans la communauté des profs docs il y a quelques mois, au point d'être boycotté dans certains centres de documentation !! Je n'avais pas fait le lien entre La tête sous l'eau et cette affaire jusqu'à la lecture de la page 153.    

Ok, ça pique un peu. Mais n'oublions pas que l'auteur a posé comme narrateur un adolescent de quinze ans... par définition pas indulgent avec les représentants de l'autorité, quels qu'ils soient. D'ailleurs, même si on en a moins parlé, le CPE prend sa race, lui aussi, sur la page précédente.

Olivier Adam aurait pu aller bien plus loin dans le cliché et tailler le système plus violemment. 

"Je passe devant l'infirmerie fermée puisqu'on n'est pas mardi matin de 9h à 10h30 et continue jusqu'au CDI faute de mieux. La documentaliste me laisse m'asseoir sans poser de question car elle dort vu qu'elle n'a rien à faire cette feignasse. C'est une grosse femme triste et sans âge, qu'on imagine sans vie, avec sa vieille maman retraitée de l'EN et qu'on prend pour sa petite sœur, ses livres de la Comtesse de Ségur en journée et Harlequin le soir et ses chats qui cannent un par un depuis qu'elle a investi dans une voiture sans permis, sans doute à tort. Ah, Antoine reconnaît qu'il est en proie à quelques idées reçues, tout n'est pas perdu. Quelle maturité ce gosse. Le seul truc qui la gêne, c'est le bruit qui la réveille en sursaut, après quoi elle se transforme en dragon et te mange. Tant qu'on ferme sa gueule et qu'on reste bien sagement à sa table à lire ou devant l'ordinateur à se branler discrètementelle ne moufte pas " car elle filme. 

Vous voyez bien qu'il n'est pas si méchant !

Même si j'ai tendance à provoquer les collègues en disant qu'il n'y a jamais que la vérité qui blesse, je comprends les réactions outrées : le seul point du portrait qui m'ait fait tiquer se situe quelques pages plus loin, où il est dit que la documentaliste sent la transpiration et le déo bon marché. La raison à cela est claire : voilà plus de dix ans que je travaille avec des collégiens, et voilà plus de dix ans que je m'entends dire que je pue.. Ce qui n'est pas foncièrement faux, mais que voulez-vous, notre odeur corporelle est une des multiples facettes de notre identité. 

Bref, il est légitime de se sentir vexé par ces quelques tournures, quand on enchaîne les semaines à s'investir sur tous les tableaux (EMI, lecture, gestion documentaire, ouverture culturelle...) pour finalement constater dans un roman grand public _et à succès, je pense_ que l'image du métier est toujours aussi désuète. L'eau va glisser sur l'un et s'infiltrer en l'autre, en fonction de son parcours. 

Le kiosque presse de l'horreur

Abordons rapidement le lieu CDI. Identifié par le jeune Antoine comme un lieu-refuge, il ne remplit vraiment ce rôle-là dans La tête sous l'eau ; en revanche, il répond parfaitement à sa vocation d'accès à l'information d'actualité, à travers la presse nationale et régionale notamment. Le centre de documentation est une sorte de zone mixte entre le cocon protecteur du lycée et la dure réalité du monde extérieur. Le héros en ressort l'estomac allégé (puisqu'il gerbe sur les journaux, ooooh comme cette situation me parle !), mais l'esprit enrichi de nouvelles connaissances. Des connaissances dont ils se serait bien passé, je vous le concède... mais auxquelles il allait devoir faire face dans tous les cas.  

Toujours est-il que les révélations électrochoc vont engendrer chez lui un raz-de-marée de colère ; sa détermination renouvelée va se diriger vers les méandres du darknet, cette zone de non droit qu'il n'avait pas encore explorée jusque là. Comme quoi, la documentaliste a beau être ce qu'elle est, son boulot de mise à disposition de l'info est un vrai catalyseur de l'action, un maillon de la chaîne qui conduira à l'agresseur de Léa. Bref, c'est grâce à la prof doc que le livre finit bien, ni plus ni moins ! 

C'est pas ça qu'on appelle un page-turner ? 

Passées les considérations propres au CDI, revenons sur l'impression générale que cette lecture me laisse ; elle est plutôt positive !  

Voilà bien longtemps que je n'avais pas plié un livre en une seule journée, même en vacances ; pourtant ce fut le cas avec ce roman d'Olivier Adam. Cet écrivain _que je ne connaissais que de nom jusqu'alors, a l'art de tenir son public en haleine, y compris lorsque l'issue de événements racontés est un peu (beaucoup) prévisible. 

Cela vient sans doute du fait que les jeunes personnages racontent leur histoire à hauteur d'enfants, si l'on peut dire, avec leurs mots ; l'enchevêtrement du récit d'Antoine et des lettres teintées de mystère écrites par Léa avant sa disparition nous mettent en position d'enquêteur ; pour nous aussi, le puzzle ce reconstitue peu à peu. J'ai toujours été très fan de ces procédés de malins et des textes à plusieurs voix ! La sensibilité des personnages enfants et la fragilité des adultes est traitée en profondeur ; la figure de Jeff (l'oncle hyper bien intentionné mais gravement irresponsable) ne doit pas être très courante en littérature car pour ma part je ne pourrais en citer d'équivalent. Ou alors je lis pas les bons trucs, ce qui est possible aussi. 

"Le Gué de l'âne" Saint-Germain du Salembre.
Et : non, ça n'a rien à voir avec le sujet. 

Si je voulais faire ma chieuse, je dirais qu'en fin d'ouvrage, les événements s'enchaînent un peu rapidement et on a l'impression que toutes les ramifications ne sont pas exploitées à fond : la codétenue de Léa, la circulation des vidéos sur Internet, le mobile de l'agresseur... Après, ce sont des choix de l'auteur, il n'est pas prévu de les remettre en question. Pas mal de critiques parcourues sur Internet font état d'un roman qui emprunte beaucoup à ceux déjà écrits par Olivier Adam, mais comme je n'en ai lu aucun, je ne le ressens pas. 

Etant donné les thématiques abordées et la prévalence de jeunes personnages, je dirais que La tête sous l'eau parlera particulièrement aux collégiens (4°-3°) et lycéens ; mais ce n'est pas un livre exclusivement réservé à la jeunesse. A découvrir, donc ! 

Olivier ADAM. La tête sous l'eau. Robert Laffont. Coll. R. 218 p. ISBN 978-2-221-21517-3

jeudi 4 juin 2020

Dans la série : y a confinement et confinement ! Naissance des coeurs de pierre - Antoine Dole (2017)

"J'espère que je n'ai pas fait une boulette..." 
Tu n'as pas "fait une boulette", tu as balancé un couscous entier, tu le sais fort bien, et au fond de toi tu jubiles.
 Pourquoi est-ce que je suis l'une des rares personnes à ne pas me laisser séduire par tes petits numéros ? J'aimerais mieux ne pas voir...      

Sans le vouloir, ces derniers temps, je me suis retrouvée à lire pas mal de bouquins qui parlent de l'enfermement sous toutes ses formes : vive BCDI à distance ! Le pire, c'est que ce n'était vraiment pas étudié pour ! S'il y a bien une dernière ahurie en France qui n'a compris le concept de confinement qu'en se réveillant avec un petit SMS du gouvernement le mardi 16 mars au matin, c'est bien moi. 
D'où ils ont eu mon portable, d'ailleurs ?
Peu importe, il est temps d'évoquer ces lectures de circonstance. 
              

Naissance des coeurs de pierre - Antoine Dole (2017)
  
                                                            


Jeb a 12 ans : comme tous les enfants de son âge, il doit passer une épreuve pour "entrer dans le Programme". Ce rite de passage propre au Nouveau Monde doit lui permettre d'être considéré comme citoyen à part entière. Les jeunes sont essentiellement testés sur leur capacité à dissimuler leur humanité : en effet, dans cette société qui se dit "meilleure" que celle de l'Ancien Monde, les émotions sont interdites et considérées comme dangereuses pour soi et pour les autres : n'est-ce pas elles qui ont causé les guerres, autrefois ? Aussi, les candidats qui montrent des signes de faiblesse le jour J révèlent qu'ils n'arrivent pas encore à se détacher de leurs états d'âmes, et un sort aussi mystérieux que redoutable les attend. Ceux qui savent se maîtriser sont prêts à se faire injecter la potion magique qui lavera définitivement leur cerveau, "pour le bien de tous". Jeb espère qu'il réussira et qu'il saura se montrer digne d'entrer dans le Programme : le contraire couvrirait sa mère de honte. Mais au fond de lui, il sait bien que c'est mort. 




Aude vient d'entrer en seconde dans un lycée de bourges, avec la motivation propre à son âge. Ses parents sont sur son dos car ils veulent qu'elle brille, mais leurs coups de pression vont s'avérer contre-productifs. Si on ajoute à cela d'autres paramètres plombants, tels que l'ambiance du bahut pas vraiment propice à l'intégration pour ceux qui se démarquent, l'absence des copines du collège, ou le désintérêt des adultes pour tout ce qui ne ressemble pas de près ou de loin à un bulletin de notes, on arrive vite au décrochage et la dépression. Aude se fait harceler, ne peut en parler à personne, s'emmure. Elle trouve du réconfort dans la compagnie de Mathieu le surveillant, le seul type qui semble capable de la comprendre.     

Les deux trajets de vie sont liés, évidemment. Par quoi ? Comment et quand vont-ils se rejoindre ? Il faudra lire le livre jusqu'au bout pour le savoir. Une fois n'est pas coutume, je ne spoilerai pas ! Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il est important que vous n'abandonniez pas votre lecture en plein milieu... parce que vous pourriez très bien être tenté de le faire ! Non pas que ce soit mal écrit ou ennuyeux, au contraire ! 

   


Les premières pages ne laissent pas de doute : deux univers parallèles nous sont présentés alternativement, au fil des chapitres. D'un côté, on pourrait bien avoir affaire à une dystopie dans laquelle le petit Jeb se débat. De l'autre, un décor contemporain et réaliste, quelque part en France. 

Pourtant, les deux univers ont en commun une ambiance de malaise constant. Le Nouveau Monde de Jeb, que l'on découvre pourtant à travers ses yeux d'enfant sensible, est terne, morose, d'une propreté clinique. Il suscite au mieux la déprime, au pire l'angoisse. Aude n'a pas une vie quotidienne qui fait rêver, peut-être parce qu'elle nous est décrite en tenant compte de l'état d'esprit d'une lycéenne pleinement consciente de son statut de brebis galeuse de sa classe.





Les deux histoires peu à peu imbriquées sont très bien racontées, sur un ton juste... tellement juste qu'il fout un peu le cafard, et que j'ai bien failli laisser tomber. C'aurait aurait été dommage, déjà parce que les derniers chapitres contiennent l'essentiel du message de l'oeuvre, mais surtout parce qu'on se rend compte qu'on a étiqueté à tort le Nouveau Monde de Jeb comme univers "imaginaire", "fantastique" ; or, de tous les événements qui ponctuent le parcours chaotique de l'enfant, lesquels relèvent de la science fiction, du futuriste, du surnaturel ? Aucun. Ils sont tous effroyablement plausibles !  


"Jamais on ne pointera du doigt que c'est le monde tel qu'il est qui a engendré tout cela."


Certes, vous n'allez pas vous fendre la poire en lisant ce livre, mais le propos est intéressant. Naissance des coeurs de pierre est en lice pour le prix du Prozac d'or 2020 de ce blog ; honnêtement, je ne suis pas sûre qu'il ait ses chances, car la concurrence est rude ! Cela dit, ce roman pour ados (à partir de 14 ans seulement, en fonction des sensibilités) part quand même avec un point bonus Anafranil d'avance. Autrement dit : rien n'est joué ! 

  
Oui, l'Anafranil est blond


Antoine DOLE. Naissance des coeurs de pierre. Actes Sud Junior, 2017. 158p. ISBN 978-2-330-08141-6



samedi 4 janvier 2020

Le Petit Prince de Calais - Pascal Teulade (2016)


Bonne année à tous !

On commence 2020 par un roman pour la jeunesse qui ne vous laissera certainement pas insensibles, et dont vous avez dû entendre parler : Le Petit Prince de Calais, écrit par Pascal Teulade et publié en 2016.

Ce titre a fait partie de la sélection du Prix des Incorruptibles 2018 - 2019, sélection 5ème/4ème.




Jonas coule une vie paisible en Érythrée avec sa famille. Doué pour la pêche et passionné par la mer, il est à la fois le héros de sa petite soeur, le bras droit de son père, le prince de sa mère et de sa grand-mère. Oui, mais à force de penser aux poissons, Jonas a négligé les cours au point de se faire exclure de l'école. Cela signifie qu'en dépit de ses quinze ans, il est disponible pour servir dans l'armée de son pays. Les parents du jeune homme s'inquiètent : il ne savent que trop bien quel sort est réservé aux jeunes militaires, et ils veulent à tout prix l'y soustraire. La mort dans l'âme, ils se résignent à prendre l'autre option : l'immigration : Jonas ira tenter sa chance en Angleterre, et on fera comme s'il avait fugué. Je n'ai pas le souvenir d'avoir lu une date précise, mais on peut dire à vue de nez que l'action se situe aux alentours de 2015.





Quelques jours plus tard, Jonas est confié à un passeur, avec dans son baluchon quelques effets personnels, dont son livre favori : Le Monde extraordinaire de la mer, l'adresse d'un cousin inconnu griffonnée au dos d'une photo, un téléphone portable. Sa mission : aller à Londres, s'y faire une place au soleil, trouver du travail. Les indications qu'on lui donne lui semblent bien abstraites, et les questions qu'il pose restent sans réponse. Mais avant même qu'il ait eu le temps de se retourner, le voilà parti en toute discrétion.

Heureusement, il a eu le temps d'offrir à sa soeur un petit calendrier de l'Avent en guise de cadeau de départ : tous les jours, du 1er au 24 décembre, elle devra ouvrir une fenêtre du calendrier et manger le chocolat qui se cache derrière. Cela lui permettra de ne pas l'oublier.  

Le prince est devenu un migrant parmi tant d'autres.

Issu d'une famille chrétienne, Jonas se sent d'abord porté par la force du prophète Jonas, celui qui a passé trois jours dans une baleine avant de délivrer le message de Dieu. Le voyage du garçon jusqu'à Calais évoque la mésaventure de son homonyme biblique : ballotté de camion en camion, aussi bien caché que s'il s'était fourré dans un gros poisson. Si personne ne le jettera par-dessus bord, d'autres migrants ne manqueront pas de le dépouiller de ses frusques pendant son sommeil. La Jungle de Calais sera un peu sa baleine ; elle ne le gardera pas trois jours mais vingt-quatre, et surtout, elle ne le recrachera pas.

Comme dirait Shrek : "Vaut mieux que ce soit dehors que dedans"

En effet, Jonas se retrouve bloqué en France, à Calais plus précisément, alors qu'il est relativement près du but, en comparaison au chemin parcouru depuis l'Erythrée. Il se rend compte qu'il n'est pas facile de passer une frontière lorsqu'on n'a pas de papiers.

A travers son regard, on découvre le quotidien d'un camp de migrants, et, même nous adultes, on prend conscience de dizaines d'obstacles auxquels on ne pense pas lorsqu'on a un toit et qu'on n'est pas dans le besoin : la difficulté d'avoir les pieds protégés et au sec, l'impossibilité de se laver, d'accéder aux soins, de pouvoir protéger ses effets personnels, son intégrité physique, de franchir la barrière de la langue... L'auteur Pascal Teulade arrive à nous rendre compte efficacement de cette réalité, et il sait de quoi il cause, puisqu'il a passé plusieurs semaines dans la Jungle de Calais aux côtés de l'association Médecins du Monde. Je vous renvoie vers l'interview livrée à la Radio Télévision Suisse.  en mars 2017.


Petit à petit, les forces du petit Érythréen s'amenuisent, le lien qui le rattache à sa famille s'élime de jour en jour. Les atteintes à son corps causées par une blessure à la main, au pied... finissent de lui saper le moral.

Un seul rayon de soleil l'empêche de sombrer au milieu des dunes et du bidonville : la compagnie d'une bande d'adolescents calaisiens plus ou moins en maraude dans la Jungle, ou en tous cas soucieux d'aider les personnes en situation précaire. La plus motivée d'entre eux est Anémone, une jeune fille avec qui Jonas sympathise malgré ses difficultés à communiquer avec elle. Leurs bonnes intentions suffiront-elles à changer le cours du destin ? On aimerait y croire, mais un ravin de misère et de paperasse les sépare. J'en profite pour glisser que ce groupe de jeunes est, à mon avis, le seul élément du roman qui ne soit pas réussi : je les trouve un peu tartes et pas du tout raccord avec les adolescents des années 2010. Mais ce n'est qu'un avis personnel.

On va pas se le cacher, les dernières pages n'ont rien d'un happy end ; cependant, Pascal Teulade nous accorde la possibilité de lire Le Petit Prince de Calais comme un conte et de croire en une fin ouverte. 

Les très belles illustrations de la couverture et de l'intérieur du livre sont signées Marie Mignot.

Thèmes : immigration / famille / amitié / 

Bien que ce roman mérite son petit Prozac d'Or larmoyant d'après les fêtes, il est à mettre entre toutes les mains de la tranche 10-15 ans, je dirais, encore que, comme l'indique l'éditeur, "chaque lecteur est unique". Toute prise de conscience est un point de départ vers une amélioration dans l'accueil des migrants. On n'a pas énormément de livres, qu'il s'agisse de fictions ou de documentaires, qui parlent de ce sujet d'actualité : quand quelqu'un se bouge pour parler de questions qui dérangent et devant lesquelles on a pris l'habitude de fermer les yeux, il faut en parler et diffuser son travail. D'autant plus quand l'oeuvre est réussie. 

Les droits du livre sont reversés à Médecins du Monde.



Pascal TEULADE. Le Petit Prince de Calais. La Joie de Lire, 2016. Coll. Hibouk. 167 p. ISBN 978-2-7511-0669-9


vendredi 22 août 2014

Larme de Rasoir : Des fleurs pour Algernon - Daniel Keyes (1966)


Phobiques des insectes, attention : un cafard s'est glissé dans cet article ! 


Un jour, en écoutant la joyeuse bande d'Homomicro, j'ai entendu parler de ce roman de science-fiction écrit par Daniel Keyes dans les années 60. Le chroniqueur _ sans doute Eric Garnier, je ne sais plus..._ nous l'a présenté comme un classique du genre.

Charlie Gordon, un jeune handicapé mental, mène une existence sans joie ni peine ni sens, entre son emploi d'homme à tout faire dans une boulangerie et son pénible apprentissage de la lecture à l'école des adultes attardés. Sa bonté d'âme et la volonté d'être "plus intelligent" qu'il manifeste lors des cours de Miss Kinnian l'amènent à être sélectionnés par deux psychiatres pour mener une expérience à risques : permettre de faire grimper le Q.I d'un "arriéré" par le biais d'une intervention chirurgicale.

Alice Kinnian émet des réserves, mais le Dr Strauss et le Professeur Nemur lui assurent que l'opération ne présent aucun risque, puisqu'ils ont déjà testé leurs hypothèses sur une souris et que c'est une vraie réussite : Algernon _ladite souris_ a largement dépassé les capacités mentales de n'importe quel rongeur de son espèce, et parvient à se dépêtrer à une vitesse folle de labyrinthes toujours plus complexes. Du reste, elle se porte bien.



Charlie est surexcité à l'idée d'être enfin "normal" ; il ne sait pas en quoi ça consiste, mais il sait qu'être "intelligent", c'est bien. Vivement que son hospitalisation se termine, et qu'il puisse retourner laver les chiottes de la boulangerie et rire avec Frank et Joe, ses collègues-amis. En attendant, il suit à la lettre les consignes du Dr Strauss : consigner dans un carnet tout ce qui lui passe par la tête, afin qu'on puisse évaluer sa progression mentale au fil des textes.

Voilà pourquoi Des fleurs pour Algernon se présente sous la forme d'un journal de bord tenu quasi quotidiennement par le héros.




Effectivement, tout se passe bien ; à son réveil, c'est une nouvelle vie qui commence pour Charlie, même s'il ne s'en rend pas compte tout de suite. Le brouillard se lève sur le monde qui l'entoure, dévoilant une ville dont il ne soupçonnait pas l'existence, des hommes dont il ne mesurait pas les multiples facettes et la cruauté. Les souvenirs reviennent, comme des coups de massue sur l'"idiot" qu'il était. Pour son bonheur _et son malheur, il comprend tout, enfin.


Attention spoiler !
N'allez pas plus loin si vous voulez lire ce livre. 

(Mais sinon, vous pouvez.)





Charlie, Charlie et Algernon 
 
Au fur et à mesure que ses capacités augmentent, Charlie Gordon prend conscience de son humanité et découvre des sentiments qu'il n'avait jamais éprouvés : la joie, la curiosité, l'amour, mais aussi la honte et la colère.

Il ressent la joie d'être enfin ce que sa famille a toujours voulu qu'il soit, avant de l'abandonner et de le faire passer pour mort : un garçon aux facultés mentales normales.

La curiosité d'apprendre, forcément insatiable, mais aussi incontrôlable ; Charlie doit composer avec deux difficultés, puisqu'il doit d'une part rattraper son retard par la culture, et d'autre part canaliser un cerveau dont les capacités ne cessent d'augmenter. Il devient "une éponge" à savoir, apprend plusieurs langues en quelques jours, et ne conçoit pas que tout le monde ne puisse en faire de même. Mais l'homme n'aime pas se sentir inférieur : complexés, ses collègues s'écartent de lui car il est trop intelligent pour eux et il finit par se faire jeter de la boulangerie. Tout porte à croire que Charlie Gordon est fait pour vivre dans l'isolement, quel qu'il soit.

Même Alice Kinnian ne se risque pas à sortir avec lui : elle se sent tellement bête à côté de lui ! Pourtant, il sait qu'il l'aime, et qu'elle pourrait céder à la tentation ; mais il se révèle incapable de la baiser, à cause d'un blocage causé par les maltraitances d'une mère tyrannique.

Tout comme sa mère, Charlie a honte de Charlie, l'ancien Charlie ; où qu'il aille, quoi qu'il fasse, l'hallucination de Charlie l'idiot bienheureux le scrute de ses yeux ahuris. Au fil de ses comptes-rendus, le jeune homme note ses souvenirs d'enfance en parlant de lui-même à la troisième personne, comme s'il rêvait le passé d'un autre. Il ne comprend pas que ce gamin qui se chiait dessus de peur que sa mère le fouette, sachant qu'elle le fouettait systématiquement quand il se chiait dessus (ouais, c'est le serpent qui se mord la queue) ait pu être lui, un jour. Chacun de ses comportements saugrenus le couvre de gêne à présent ; il aimerait se débarrasser de cet "attardé" qu'il n'est plus, et dont il serait capable de se moquer lui-même. Le seul moyen qu'il a d'y échapper, c'est de s'en distinguer sciemment clairement via ses écrits.

La moquerie, il l'a vécue durant des années sans en souffrir, puisqu'il ne la percevait pas. "N'était-ce pas mieux ainsi ?" se dira plus tard l'homme devenu "un télijan". Lorsqu'il réalise enfin que ses amis Frank et Joe, ont passé des années à lui jouer des sales tours et à rire sur son dos, la colère le saisit enfin, sans qu'il puisse rien en faire : il lui manque l'expérience et la prise d'initiative, qui ne s'apprennent ni dans les livres, ni pendant les séances de psychothérapie.

En effet, Charlie Gordon demeure un simple cobaye pour ses médecins, au même titre que la souris Algernon. Il se prend d'ailleurs rapidement d'affection pour elle, en se disant que la destinée les a rapproche un peu. Mais il sait aussi que l'avenir d'Algernon en dira beaucoup sur le sien, étant donné qu'ils ont subi le même traitement : si un jour elle décline et meurt, il ne pourra plus donner cher de sa propre peau. L'homme revendiquera inlassablement sont statut d'humain dans l'expérimentation. Après ET avant l'opération. Il ne sera pas vraiment entendu, mais plutôt exhorté à la gratitude envers ceux qui l'ont "sauvé" de son engourdissement mental.

Chacun ses références souristiques !
 (Minus et Cortex)
C'est quand même autre chose que Hermux Tantamoq !


Perturbant 

Présenté comme une oeuvre majeure de la S.F, Des fleurs pour Algernon est particulièrement accessible à ceux qui en lisent peu. Hormis les indications scientifiques données par Charlie au sujet de l'intervention qu'il a suivie, et des effets positifs et négatifs qui en résultent, on n'est pas noyés dans le jargon médical. J'avoue avoir eu une crainte à ce sujet. Les connaissances de l'auteur en psychologie sont par contre bien visibles, et on devine à travers la peinture du héros une bonne connaissance des "simples d'esprit", comme on se plaisait à les appeler, avant. J'avais aussi peur de lire une suite de d'idées reçues agglomérées en un même personnage, mais pas du tout. Mais ce roman de Daniel Keyes (mort en 2014) est avant tout une réflexion sur la difficulté des rapports humains, sans cesse déterminés par la facilité qu'on a _ou pas_ à rentrer dans les clous.


Des fleurs pour Algernon est largement pressenti pour gagner le trophée du Cafard de Plomb spécial Rentrée Scolaire Pluvieuse, et peut-être même, qui sait ! Le prozac d'or !






Même si certaines incohérences dans la rapidité d'évolution de Charlie font qu'on a bien conscience de lire de la fiction, ce récit est bouleversant, voire perturbant. L'histoire vaut le détour, mais pas si vous êtes dans une période de déprime, car elle pourrait bien vous achever !





KEYES, Daniel. Des fleurs pour Algernon. Trad. de l'anglais par Georges H. Gallet. Editions J'ai lu. 2002. Coll."Science Fiction". 252 p. ISBN 2-290-31295-9