mercredi 24 août 2016

Soyons sérieux : Les films interdits du IIIe Reich - Felix Moeller (2013)


Soyons sérieux ! 
Parce que ça faisait longtemps...
Voici une fiche de travail suite au visionnage du documentaire de Felix Moeller : Les films interdits du III° Reich (2013). Une pure paraphrase, n'en attendez rien.



Dans les enfers des Archives du Cinéma allemand, situées près de Berlin, sont conservés les films de propagande nazie sortis sous le IIIe Reich. Trois cent d'entre eux sont actuellement interdits à la diffusion car ils délivrent des messages racistes, antisémites, glorifiant le nazisme, la haine et la guerre. Paradoxalement, il reste facile de les récupérer sur Internet, "en contactant des revendeurs d'extrême droite", nous explique une intervenante, ou en suivant des chaînes Youtube de néo-nazis...

Il faut savoir qu'à l'époque, le cinéma était un instrument de pouvoir à part entière pour Goebbels, ministre de la propagande et parfaitement conscient que le septième art pouvait retourner le cerveau des gens. Au plus fort de la guerre, le peuple allemand était un gros consommateur de films et ne passait pas entre les mailles "l'industrie du divertissement nazi". Absurdes mais divertissants _pour des spectateurs démoralisés, les "films de la nation" faisaient pleinement partie de la stratégie de communication du Reich ; Goebbels n'hésitait pas à commander des films à gros budget et à se montrer généreux envers les stars du moment.. Entre autres, Emil Jannings et Heinrich George. Le premier avait choisi de travailler pour le III° Reich, non par conviction, mais parce qu'il gagnait plus qu'à Hollywood et pouvait choisir ses rôles. Le second est toujours une énigme, puisqu'il s'agit d'un acteur défavorable aux idées du Reich qui a changé de camp. 

Le documentaire Les films interdits du III° Reich interroge la nécessité d'une interdiction ou non de ces oeuvres, de nos jours. Si les difficultés d'accès au nom de la protection de l'enfance sont légitimes, elles posent aussi un problème : elles empêchent les jeunes de connaître une partie de l'Histoire qui a bel et bien existé. Alors, on se demande à présent ce qu'il faut faire de toutes ces bobines : sont-elles encore dangereuses ? comment serait perçue leur remise en circulation ? doit-on les oublier ? Certainement pas.

Bientôt la rentrée = TOUS SUR ARTE ! 


Felix Moeller choisit une poignée de films d'époque pour nous permettre de nous faire une opinion : Heimkehr, Le Juif Süss, Suis-je un assassin ? Pour chaque exemple, il nous montre un extrait de l'oeuvre, puis une scène de projection en public, avant de nous faire partager les réactions des spectateurs à l'issue de cette projection.  

Heimkehr : l'action se déroule en Pologne, ou vie une minorité d'Allemands violemment persécutés et torturés par les Polonais. Le procédé est adroit : en adoptant ce point de vue, les Allemands sont victimisés et l'invasion de la Pologne se justifie au motif de la légitime défense. C'est tout simplement l'inverse de la réalité, mais les spectateurs adultes considèrent qu'une jeune qui n'a aucune culture historique et aucun recul pourrait très bien se laisser prendre au piège.

Le Juif Süss fait partie de la quarantaine de films diffusés sous conditions, c'est à dire qu'ils sont ils sont forcément précédés d'une présentation et suivis d'un débat. Il y est question de Süss, un homme ambitieux, malhonnête et amateur de femmes.

Suis-je un assassin ? suscite aujourd'hui encore des réactions contrastées : s'il s'inscrit officiellement dans la longue liste des films de propagande nazie, et veut justifier une élimination massive des personnes handicapées, il adopte un point de vue bien particulier. Une femme apprend qu'elle est très malade et supplie son mari de la tuer avant qu'elle dépérisse ; celui-ci s'exécute. Aujourd'hui, ce long métrage pourrait être compris comme un film en faveur de l'euthanasie. Le réalisateur (Liebeneiner) avait alors pour mission de susciter le débat dans les chaumières à défaut de pouvoir le faire en public _morale chrétienne oblige.


Les réactions des spectateurs _adultes ou scolaires_ se recoupent : 

- Sans connaissances préalables, ces films présentent toujours un danger, surtout pour des adolescents paumés. Ce n'est pas pour rien qu'il existait des films de propagande spécifiquement conçus pour la jeunesse sous le III° Reich. Ils fonctionnaient d'ailleurs très bien sur certains d'entre eux ; aujourd'hui encore, ils pourraient faire basculer du mauvais côté des enfants sensibles aux idées d'extrême droite. 

- Beaucoup sont convaincus que les mécanismes de propagande pourraient fonctionner sur le grand public.
- Les lycéens s'effraient qu'il soit aussi facile d'entrer dans ces films ; les ficelles de la manipulation sont très efficaces, surtout lorsqu'elles font appel à nos sentiments.
  
- Les stéréotypes existent partout, sous différentes formes, même si les Juifs, les Anglais et les handicapés ne sont plus les principales cibles... Cela ne veut pas dire qu'on est hors d'atteinte.

SECOND DEGRÉ !!! - SECOND DEGRÉ !!! - SECOND DEGRÉ !!!

- Il est important de découvrir ces films, mais de manière encadrée. Selon les lycéens parisiens que l'ont peut voir dans le documentaire, une diffusion télévisée et sans explication préalable du Juif Süss pourrait faire des dégâts ! 



En conclusion, à la question "Que faire de tous ces films cachés qui constituent pourtant un pan de l'Histoire ?" la réponse demeure :"On ne sait pas trop", mais historiens et professionnels du cinéma s'accordent à dire qu'une totale ignorance de leur existence est quasiment aussi dangereuse qu'une diffusion large et incontrôlée. La meilleure alternative reste la diffusion encadrée... et l'éducation. 



FELIX MOELLER - Les films interdits du III° Reich. Allemagne, 2013. 
Documentaire, 52 min. 
Lien Dailymotion
Lien Arte + 7  




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