Si vous êtes basés dans le Sud-Ouest, vous avez sans doute déjà entendu parler du festival "BD en Périgord", qui se déroule tous les ans à Bassillac et Auberoche, une commune proche de Périgueux.
Je n'y suis jamais allée ; mes parents nous avaient dit, quand on été enfants, qu'on irait y faire un tour à l'occasion, mais ça ne s'est jamais fait. On ne réclamait pas outre mesure : dans la région, c'est le festival d'Angoulême qui fait rêver.
Bien des années plus tard, cet événement culturel incontournable dans la région est revenu sur le tapis lors des repas de famille du dimanche. Pas de la plus flatteuse des manières, c'est le moins qu'on puisse dire ! Marine travaillait depuis peu dans une entreprise de nettoyage du secteur et en tant que dernière personne embauchée, elle récupérait les missions à la con et leur lot de bizarreries. Nettoyer de font en combles le gymnase censé accueillir les stands et expositions du festival en faisait partie.
Il fallait que tout soit nickel (et déserté de tout personnel de nettoyage) avant l'installation, ce qui impliquait de se rendre sur place très tôt, vers 5h du matin. Sur le principe, cela ne la gênait pas plus que ça : les horaires décalés faisaient partie des inconvénients du métier, elle le savait. Et puis, c'était une fois pas an.
En revanche, en tant qu'employée, Marine ne disposait pas des clefs du gymnase. Il fallait qu'elle attende que le gardien, qui devait venir plus tôt lui aussi pour l'occasion, les lui remette. Impossible de procéder différemment, comme récupérer les clefs la veille, par exemple. Question de confiance et de responsabilités, sans doute.
La première fois, le gardien est venu à 5h comme convenu. Il s'est montré très antipathique, mais enfin, il lui a permis d'accéder au site.
Les années suivantes, la tâche a été plus compliquée pour Marine, car le type venait tard, voire pas du tout. Lorsqu'il arrivait tard, elle ne pouvait pas remplir sa mission à fond, puisqu'elle ne disposait pas du temps nécessaire pour le faire. Lorsqu'il ne venait pas, elle ne pouvait tout simplement pas travailler.
Dans tous les cas, elle se rendait sur place à l'heure prévue, poireautant des heures dans sa voiture par de froids matins d'octobre. Et à chaque fois, forcément, les retours sur la qualité du service étaient négatifs. Même si elle savait pertinemment qu'elle n'y était pour rien, cela l'affectait toujours. D'autant qu'elle donnait sa version de l'histoire à sa patronne, et que cette dernière faisait mine de ne pas la croire _ sans doute pour éviter tout litige avec la mairie.
L'année dernière, Marine nous a raconté qu'elle en avait eu marre, qu'elle s'était pointée et qu'elle était rentrée se recoucher assez rapidement. C'était juste avant les premiers diagnostics. La maladie couvait déjà et sa fatigue envahissait suffisamment ses journées pour qu'elle s'épargne les sautes d'humeur d'un boulet. Elle ne savait pas que c'était la dernière fois qu'elle se levait pour rien.
Sache, gros connard de gardien, que tu ne la verras plus jamais, cette femme de ménage qui venait te casser les couilles le jour de l'ouverture du salon de la BD, et dont la tête ne te revenait pas visiblement. J'espère qu'à la place, tu auras affaire à une grognasse tout aussi désagréable que toi.
La Femme de ménage
Freida McFadden
2022
Photo : édition J'ai Lu
Difficile de trouver (et de garder) un boulot quand on sort de prison ! Millie le sait bien, elle en fait l'expérience depuis plusieurs mois. Aussi, lorsque la jeune femme est recrutée au pied levé pour faire le ménage chez de riches new-yorkais, elle s'empresse d'accepter le poste, espérant se rendre indispensable avant que ses patrons ne découvrent ses antécédents !
Dès son arrivée, elle sent que quelque chose cloche chez les Winchester : déjà, la minuscule "chambre de bonne" que lui attribue Nina, la mère de famille, ne se verrouille que de l'extérieur. L'impossibilité d'en ouvrir la fenêtre n'aide pas vraiment à s'approprier le lieu...
Puis au fil des jours, son sentiment de malaise s'amplifie, à juste titre : Nina est bordélique à l'extrême, au point que Millie se demande si elle ne fait pas exprès de foutre des saletés partout, juste pour la faire galérer. D'autant qu'elle peut passer d'une minute à l'autre du "mode copine" au mépris le plus total envers son employée. La fille, la petite Cecelia, est clairement hostile envers Millie, en plus d'être flippante en tous points.
Enzo, le jardinier, ne cesse de s'agiter et de prononcer le mot "danger" dès qu'il voit Millie, mais comme il ne connaît pas un mot d'anglais, la communication est impossible, elle ne voit pas bien où il veut en venir. Heureusement, Andy Winchester, le père, parvient à apaiser cette ambiance électrique.
Plus Nina Winchester s'attache à la faire tourner en bourrique, moins Millie n'a de scrupules à se rapprocher dangereusement du bel Andy, qui ne demande pas mieux ; et alors que le lecteur aimerait crier à l'héroïne que coucher avec le patron, c'est pas une bonne idée, l'histoire prend une tournure complètement inattendue !
Avis
AH ! Je l'ai enfin lu ! Ce livre me faisait de l'oeil (littéralement) à chaque fois que je passais au Relay de la gare de Limoges. On est génération Loft Story ou on ne l'est pas. J'ai dû en parler à ma collègue prof d'ULIS à un moment, parce qu'elle me l'a gentiment offert avant qu'on parte en vacances.
J'avoue avoir été un peu moins jouasse en voyant qu'il figurait dans la bibliothèque Babelio de mon ex, ce qui est rarement bon signe....
Oui, c'est mesquin de stalker et de balancer ensuite.
Bref, on peut couper ce best-seller en deux parties.
Une première, efficace et bien accrocheuse, mais parfois rendue peu convaincante par le personnage de Millie. Trop de mystère tue le mystère : soit elle se décide à nous dire pourquoi elle a été emprisonnée, soit elle arrête d'y faire allusion toutes les deux pages.
Ensuite, face à tous les micro-événements chelous qui se passent sous ses yeux, il n'y a bien qu'elle pour ne pas comprendre qu'elle ferait mieux de prendre ses jambes à son cou.
Enfin, ses petites envolées "ouah trop beau le jardinier / le boss, j'ai pas ken depuis teeellement longtemps !!"... très peu pour moi.
J'ai failli stopper ma lecture à mi-chemin, avant de me convaincre d'essayer d'aller jusqu'au bout, et j'ai bien fait d'insister un peu ! En effet, la deuxième partie de ce thriller psychologique est assez déroutante pour justifier à elle seule le grand succès du livre. Je ne dirai rien de plus pour ne pas spoiler, mais le revirement qui s'opère à ce moment-là surprendra même celles et ceux qui avaient déjà entrevu quelques ficelles...
A dévorer sur la plage ou dans les transports !
Un peu à l'eau de rose par moments, mais ça passe.
Lisez bien jusqu'au bout !
Pour tous ceux qui ont aimé le film Parasites, et pour les nostalgiques de Desperate Housewives !
Légendes & lattes
Travis Baldree
2022
Photo : édition J'ai Lu
Genre : cosy fantasy
Tout plaquer et partir ouvrir un café dans un endroit où personne ne boit de café, voilà le défi que s'est lancé Viv, une orque mercenaire lassée de l'aventure.
Après plus de 20 ans d'une vie dure et sans possibilités d'attaches, cette solitaire dans l'âme entend bien se poser et monter son propre établissement dans le petit village de Tuine.
Elle a pour seuls guides sa grande motivation, sa passion du café, et une pierre "porte-bonheur" qui pourrait bien devenir un objet de convoitise.
Ce retour au calme pourrait avoir des airs de retraite, si Viv n'avait pas tout à construire pour mener à bien son projet : non seulement le café en lui-même, mais aussi son sens de l'accueil et ses compétences en commerce, proches du néant. D'autant que l'ombre du mystérieux Madrigal, prompt à taxer tout nouveau commerce, vient gâcher quelque peu le paysage.
Heureusement, Viv va faire de belles rencontres et (re)découvrir les joies du travail d'équipe et des soirées entre amis.
Avis
J'ai été séduite par la couverture WTF et par l'idée qu'un livre puisse à la fois parler d'orcs, de pierres magiques et de café ; le résumé laissant présager une dimension bisounours dont j'avais bien besoin à ce moment-là, je me suis laissée tenter.
Au final, cette lecture de Légendes & Latte a été positive dans le sens où...
- elle est réconfortante et sans prise de tête
- le monde cosmopolite de Travis Baldree tient la route, avec ses décors médiévaux-modernes et ses êtres légendaires souvent en proie aux préjugés.
- les personnages sont plein de mignonnerie (trop ?)...
MAIS voilà... je me suis quand même beaucoup fait ch*er, car il n'y a quasiment pas d'action. C'est normal, me direz-vous, c'est le principe de la "cosy fantasy", cette branche de la fantasy où on s'intéresse surtout au quotidien des personnages et de leurs amourettes, au détriment des quêtes et des combats. Une sorte de tour d'autos tamponneuses où il faudrait essayer de ne pas toucher les autres, en somme...
N'étant pas au fait de ce genre nouveau, j'ai attendu désespérément que "ça démarre", pensant que, telle une Xéna dont le naturel revient au galop, Viv allait dégainer l'épée après trois pages de bonnes résolutions pacifistes. Mais non. On voit juste un café se construire pierre après pierre au fil des chapitres, les joies et les galères qui vont avec, et un binôme de tenancières qui s'interroge sur ses techniques de vente..
Bah, pourquoi pas. Quand vous voyez qu'au bout de quinze chapitres, les personnages s'interrogent sur la possibilité ou non d'installer un ventilo ou une plus grande cuisinière, vous vous faites une raison ! A noter que l'auteur a imaginé cette histoire en plein Covid, à un moment où les cafés et autres lieux de socialisation étaient inaccessibles : voilà qui nous rend son roman d'autant plus sympathique.