Je ne suis pas auteur, mais je pense que ce doit être un vrai casse-tête d'avoir pour projet d'écrire un roman traitant des questions de l'écologie, du réchauffement climatique, du développement durable... et d'aboutir sur autre chose que sur une leçon de morale plus ou moins bien dissimulée. Certains écrivains y parviennent avec plus ou moins de succès, mais ils ont le mérite d'essayer et leur seule tentative mérite d'être valorisée ; d'autant plus lorsqu'ils mettent leur talent au service de la jeunesse. Parmi eux, on peut citer l'auteure Hélène Montardre, connue pour les nombreux livres pour enfants qu'elle a publiés, et notamment la série Océania. Une fois n'est pas coutume, nous allons faire les choses dans l'ordre en parlant du premier tome, "La Prophétie des Oiseaux".
L'histoire
Depuis le naufrage du bateau transportant ses parents, Flavia vit avec son grand-père Antatole dans un phare, quelque part sur la côte Atlantique. Sans vraiment comprendre pourquoi et sans avoir de possibilité d'agir, ils voient l'océan monter un peu plus chaque jour, tandis que leurs voisins disparaissent peu à peu. A seize ans, Flavia n'est pas conne à ce point et se doute bien que quelque chose de grave se prépare ; mais comme les journaux ne laissent passer aucune information sur cette fulgurante montée des eaux, elle ne mesure pas vraiment l'urgence de la situation et laisse faire les choses. Internet ? Oh, ça fait longtemps qu'on n'a plus ça ici..
Un jour ce pendant, émergeant d'un affreux cauchemar dans lequel elle se noie, Anatole lui annonce qu'elle doit rejoindre la capitale pour gagner une place sur un bateau qui l'emmènera aux Etats Unis. Pourquoi l'Amérique ? Parce que c'est sur ce continent que tout le monde s'exile...
Flavia ne se sent pas prête à partir : d'abord, il serait égoïste de sa part d'abandonner son grand-père à l'Europe mourante, avec pour seule compagnie ces oiseaux qu'il observe et dont il est spécialiste depuis des décennies. Ensuite, l'insistance d'Anatole à la pousser de l'autre côté de l'Atlantique la laisse perplexe : voudrait-il se débarrasser d'elle ? Que lui cache-t-il ? Pourquoi ne lui demande-t-il même pas ce qu'elle en pense ?
Voyant que l'Amérique ne sera bientôt plus accessible que pas des voies clandestines, et que les places pour y accéder sont déjà très chères, le vieil homme veut sauver sa descendance au plus vite. Il sait que l'Europe va bientôt disparaître avec l'avancée des eaux. Tout comme lui. Mais Flavia est jeune, et il estime qu'elle a tout autant droit à sa chance de survie que d'autres adolescents thunement mieux lotis. Il fait donc appel à un marin de ses amis pour lui faire traverser la mer incognito... Bye bye le phare d'Anatole !
Flavia ne se sent pas prête à partir : d'abord, il serait égoïste de sa part d'abandonner son grand-père à l'Europe mourante, avec pour seule compagnie ces oiseaux qu'il observe et dont il est spécialiste depuis des décennies. Ensuite, l'insistance d'Anatole à la pousser de l'autre côté de l'Atlantique la laisse perplexe : voudrait-il se débarrasser d'elle ? Que lui cache-t-il ? Pourquoi ne lui demande-t-il même pas ce qu'elle en pense ?
Voyant que l'Amérique ne sera bientôt plus accessible que pas des voies clandestines, et que les places pour y accéder sont déjà très chères, le vieil homme veut sauver sa descendance au plus vite. Il sait que l'Europe va bientôt disparaître avec l'avancée des eaux. Tout comme lui. Mais Flavia est jeune, et il estime qu'elle a tout autant droit à sa chance de survie que d'autres adolescents thunement mieux lotis. Il fait donc appel à un marin de ses amis pour lui faire traverser la mer incognito... Bye bye le phare d'Anatole !
Désolée, mais moi quand on me parle de phare... |
La Digue, la Digue...
Ce premier volume de ce qui sera, en fait, une tétralogie, se compose de deux grandes parties intitulées "Le Passage" et "Derrière la Digue". La première raconte, comme on peut s'en douter, le départ de l'héroïne et sa traversée houleuse (qui finira en queue de poisson, ahah). La seconde est centrée sur sa vie _mais peut-on vraiment parler de vie ? d'immigrée clandestine. A mon sens, il s'agit de la tranche la plus intéressante du roman ; ceux qui ont lu Reborn de Thierry Robberecht, dont il a été question ici-même il y a quelques années comprendront pourquoi. A l'heure où les jeunes et les moins jeunes s'interrogent sur les migrations qu'ils ne voient plus seulement à travers l'écran de la télévision, il est plus que jamais enrichissant pour les lecteurs de se mettre dans la peau d'un personnage européen, blanc, de la classe moyenne _bon, Anatole ne roule pas sur l'or mais il a un toit et l'eau courante _, lettré, dont l'existence confortable bascule vers la précarité. Une fois passée la Digue protégeant les Etats-Unis de la montée des eaux, Flavia rejoint les rangs des parias, de ceux qui ont eu le culot de vouloir vivre et qui doivent se cacher en attendant d'obtenir des papiers _ou pas.
Désolée, mais moi quand on me parle de digue...
Autant dire qu'ils sont nombreux... Par chance, Flavia a failli se noyer à l'issue de son voyage à bord du Samantha, où elle avait eu le temps d'apprendre quelques nouvelles croustillantes de la Terre. Aux abords de la Digue, alors qu'elle est à moitié dans les vapes, elle rencontre Chris, un jeune aventurier new-yorkais dont le grand kif est d'escalader l'imposante construction dès qu'il a un peu de temps libre. C'est le coup de foudre immédiat, des deux côtés. Chris l'emmène dans son appartement prêté par un oncle qui n'attendait qu'une squatteuse, et à partir de là, elle pourra réfléchir sur son sort en toute sécurité.
La jeune fille, qui, il faut bien le dire, a des airs d'adolescente fleur bleue un poil agaçant, va aller de découvertes en découvertes, dont celle-ci : ses parents scientifiques ne seraient peut-être pas morts.. Voilà qui change tout, mille dieux ! Pour en savoir plus, un retour en Europe s'impose, mais Chris n'est pas chaud. Dans les rues, la colère monte dans la grande communauté des clandestins tandis que les autorités américaines ont pris soin de laisser leur humanité aux vestiaires.
L'écologie est ailleurs
Tous les ingrédients sont là pour nous faire comprendre qu'on n'attend plus que nous pour commencer la recette du roman écolo : prenez une fille élevée au grand air par un grand-père guetteur d'oiseaux, plus proche de la nature que des jeunes de son âge, aussi méfiante avec son prochain qu'une poule d'eau dans les roseaux.. Enlevez-lui ses parents scientifiques, dont la mort reste mystérieuse. Ajoutez à l'histoire une montée des eaux ravageuse qu'on devine conséquente au réchauffement climatique. Saupoudrez le tout des préoccupations nombrilistes de quelques grandes puissances ; et tout ce qui traîne, passez-le au four sans aucune pitié. Pourtant, si Hélène Montardre veut nous communiquer un message vert à travers Océania, il nous viendra sans doute dans les tomes suivants. "La Prophétie des Oiseaux" reste au final assez centré sur l'héroïne, son cheminement personnel, pour ne pas dire sa quête d'identité. Autant la critique des médias, malhonnêtes rétenteurs d'information voués à maintenir les population dans l'insouciance, est exprimée très clairement via la bouche du journaliste écolo Noël Nora, entre autres, autant les comportements suicidaires des hommes envers leur environnement naturel sont très peu évoqués. Au jeune lecteur de faire les déductions qui s'imposent en fonction des faits qui lui sont présentés : ce n'est peut-être pas plus mal ainsi, bien au contraire. Car du roman à la réalité, il n'y a qu'un pas !
Ce roman est arrivé au CDI au milieu d'une colossale livraison de spécimens de manuels scolaires. Il s'agit d'ailleurs d'une édition scolaire, où les enseignants disposent d'un dossier pédagogique complet. On y trouve un découpage de l'oeuvre suivant le schéma actanciel, quelques pages centrées sur les principales thématiques et des pistes d'activités transposables en classe.
Difficile en ce qui me concerne de s'attacher aux personnages, et notamment à l'héroïne _d'ailleurs, je n'y suis pas vraiment arrivée... La relation entre Chris et Flavia est assez nunuche, et les adolescents avec qui ils vont se lier d'amitié n'ont pas beaucoup de mordant, même et surtout quand ils se veulent rebelles et téméraires ; mais c'est peut-être parce que je me suis habituée aux collégiens de Seine-Saint-Denis : ils sont bien vivants, eux ! Du coup, il me semble que la crédibilité de cette histoire qui traite de questions graves et actuelles en prend un coup. Mais ça reste mon avis, rien de plus. Après tout, seul celui capable de faire aussi bien peut se permettre un jugement catégorique, et c'est loin d'être mon cas !
Alors, à vous de vous faire un avis !
Hélène MONTARDRE. Océania 1 - La Prophétie des oiseaux. Rageot, 2016. 400 p. ISBN : 978-2-7002-590-6
Tous les ingrédients sont là pour nous faire comprendre qu'on n'attend plus que nous pour commencer la recette du roman écolo : prenez une fille élevée au grand air par un grand-père guetteur d'oiseaux, plus proche de la nature que des jeunes de son âge, aussi méfiante avec son prochain qu'une poule d'eau dans les roseaux.. Enlevez-lui ses parents scientifiques, dont la mort reste mystérieuse. Ajoutez à l'histoire une montée des eaux ravageuse qu'on devine conséquente au réchauffement climatique. Saupoudrez le tout des préoccupations nombrilistes de quelques grandes puissances ; et tout ce qui traîne, passez-le au four sans aucune pitié. Pourtant, si Hélène Montardre veut nous communiquer un message vert à travers Océania, il nous viendra sans doute dans les tomes suivants. "La Prophétie des Oiseaux" reste au final assez centré sur l'héroïne, son cheminement personnel, pour ne pas dire sa quête d'identité. Autant la critique des médias, malhonnêtes rétenteurs d'information voués à maintenir les population dans l'insouciance, est exprimée très clairement via la bouche du journaliste écolo Noël Nora, entre autres, autant les comportements suicidaires des hommes envers leur environnement naturel sont très peu évoqués. Au jeune lecteur de faire les déductions qui s'imposent en fonction des faits qui lui sont présentés : ce n'est peut-être pas plus mal ainsi, bien au contraire. Car du roman à la réalité, il n'y a qu'un pas !
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Ce roman est arrivé au CDI au milieu d'une colossale livraison de spécimens de manuels scolaires. Il s'agit d'ailleurs d'une édition scolaire, où les enseignants disposent d'un dossier pédagogique complet. On y trouve un découpage de l'oeuvre suivant le schéma actanciel, quelques pages centrées sur les principales thématiques et des pistes d'activités transposables en classe.
Difficile en ce qui me concerne de s'attacher aux personnages, et notamment à l'héroïne _d'ailleurs, je n'y suis pas vraiment arrivée... La relation entre Chris et Flavia est assez nunuche, et les adolescents avec qui ils vont se lier d'amitié n'ont pas beaucoup de mordant, même et surtout quand ils se veulent rebelles et téméraires ; mais c'est peut-être parce que je me suis habituée aux collégiens de Seine-Saint-Denis : ils sont bien vivants, eux ! Du coup, il me semble que la crédibilité de cette histoire qui traite de questions graves et actuelles en prend un coup. Mais ça reste mon avis, rien de plus. Après tout, seul celui capable de faire aussi bien peut se permettre un jugement catégorique, et c'est loin d'être mon cas !
Alors, à vous de vous faire un avis !
Hélène MONTARDRE. Océania 1 - La Prophétie des oiseaux. Rageot, 2016. 400 p. ISBN : 978-2-7002-590-6
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