dimanche 28 juillet 2024

[EXPOSITION] The Art of the Brick - Paris

Derniers jours pour aller voir The Art of the Brick aux Galeries Montparnasse à Paris ! 

Il s'agit d'un exposition d'œuvres intégralement faites avec des briques de LEGO par Nathan Sawaya, un ex-avocat américain reconverti en artiste à plein temps. 

Au fil de la visite, on reconnaît d'abord des tableaux et des sculptures célèbres fidèlement reconstruits en lego, de tous les horizons et de toutes les époques, du Penseur de Rodin à la Joconde, de Michel Ange à la tapisserie de Bayeux en passant par le cheval de Lascaux. 

Puis apparaissent les créations originales et encore plus fascinantes de N. Sawara, qui s'attache à exprimer l'humanité sous toutes coutures : une salle met en scène des sculptures associées à des états d'âmes, une autre des petits crânes qui semblent faire référence aux catacombes.

 Enfin (et c'est mon coup de coeur de l'expo), l'artiste a fabriqué plusieurs parties du corps humain et les a retravaillées avec le photographe Andrei Duman pour en faire une représentation imagée. Ainsi vous pourrez admirer un estomac, des poumons, un coeur, une main en 3D. Spoiler : y a pas de teub en LEGO, mais ne soyez pas déçus pour autant. 

C'est vraiment un spectacle impressionnant.

J'ai été assez séduite par le message de l'artiste : pas besoin de beaucoup de matériel ni d'outils sophistiqués pour créer et s'exprimer ; un boîte de LEGO basic suffit (enfin, un peu plus qu'une boîte !)














Fermeture de l'exposition le 11 août. 

Prix de l'entrée : compter dans les 20€ plein tarif pour un adulte. 



vendredi 26 juillet 2024

[MANGAS] Street Fighting Cat - 1 (2017) / Ken'en, comme chien et singe - 1 - (2018)

Cet article est le 501ème...Voilà déjà quinze ans que ce blog m'accompagne, même si je l'alimente un peu plus rarement maintenant, faute de temps. 

Voici deux mangas marrants et bien survoltés qui seront au CDI à la rentrée prochaine !


Street Fighting Cat - 1

SP Nakatema

Doki-Doki, 2017 


Qui n'a jamais été réveillé au milieu de la nuit par deux chats qui se foutent sur la gueule ? 

Le mangaka SP Nakatema a fait de ce miracle de la nature une sorte de furyo animalier tout à fait distrayant.  

Lorsque les humains dorment ou ont le dos tourné, les chats de gouttière reprennent le contrôle des quartiers de la ville de Sakura. Leur qualité de vie et les rapports qu'ils entretiennent dépendent de leur place dans la hiérarchie féline, et de leur capacité à respecter les codes d'honneur. Une sorte de société de yakuzas, version chats : alors que certaines bandes ont le monopole des rues et des poubelles de restos, les faibles et les marginaux doivent s'écraser ou faire les larbins pour survivre. 

Hige, le héros, appartient à cette dernière catégorie. Il s'en prend plein la tronche et pense même à en finir avec la vie. Sa rencontre avec Nabunaga, un ancien chat domestique à la carrure colossale va lui donner un peu de répit. Tous deux vont s'associer et se compléter : le malingre va aider le petit nouveau à se repérer dans un milieu qu'il connaît mal, tandis que le costaud va s'occuper de la partie "patates et coups de griffes". 

Serait-ce l'aube d'une vie meilleure pour ce binôme des extrêmes ? Ils ne sont jamais que deux contre une multitude de durs à cuire ! 

Très sympa et sans prise de tête ; ça change des histoires de chatons inoffensifs ! Les chats sont dessinés de différentes manières en fonction des situations, allant du presque kawai au guerrier taillé en serpe. On devine un dessinateur amateur et connaisseur de félins. 

Une bonne lecture de vacances pour les grands et les petits. 

A noter que c'est une série assez courte (4 tomes) _donc particulièrement pratique pour un CDI de collège !


Ken'en - Comme chien et singe - 1 

Fuetsudo / Hitoshi Ichimura 

Doki-Doki (2018) 


Photo prise au parc des Buttes Chaumont


Japon, sans doute au Moyen-Age. 

Alors qu'il traverse le pays afin de parfaire son initiation, le jeune moine Benzon arrive dans le petit village de Mitsuke, où les habitants sont encore chamboulés par la malédiction qui vient de les frapper : un mononoke (une sorte d'esprit) leur a fait savoir qu'il ne les laisserait pas en paix tant qu'on ne lui aurait pas sacrifié une jeune fille.  

Benzon part donc en quête d'un exorciste ; on lui recommande un certain Hayate... qui s'avère être un gros chien blanc. Il est bien étonné, mais bon, pourquoi pas. Le jour de l'offrande, le chien est stratégiquement caché dans le cercueil censé renfermer la jeune fille et déposé à l'endroit prévu. 

Effectivement, quelqu'un vient : il s'agit d'un kakuen, un être vivant mi-singe mi-humain qui n'existe qu'en version mâle et qui doit donc, de temps en temps, enlever une fille pour pouvoir faire perdurer l'espèce. 

Ce kakuen-là s'appelle Mashiro, il est plutôt pacifique et n'a pas envie de se marier. Alors, quand il découvre le chien, c'est le coup de foudre : il l'adopte aussitôt, oubliant même pourquoi il était venu. Sauf que Hayate est en fait un reiken "mi-homme, mi-chien", et peut changer d'apparence en fonction de ses besoins. Mashiro va vite voir que cette bête-là n'a pas du tout envie d'être tenue en laisse !  

Nous allons suivre les aventures et les déboires de Mashiro, partagé entre son sens des responsabilités envers les autres kakuen de sa tribu et le rejet de leurs traditions archaïques. Il doit aussi gérer son attachement pour Hayate _qui le tyrannise pas mal !  

A travers ce seinen, les auteurs ont réussi à traiter des sujets profonds (le sort des femmes, le consentement, concilier ses intérêts et ceux d'un groupe, cacher son identité...) sans le dépouiller d'une certaine légèreté ! Les personnages sont attachants ; Mashiro et Hayate s'envoient vanne sur vanne, et les blagues ne manquent pas ! 

Graphiquement, les décors en pleine nature, entre mers et forêts, sont superbes. 



jeudi 25 juillet 2024

[SERIE JEUNESSE] Les filles au chocolat (1, 2, 3, 3,5) - Cathy Cassidy

Qu'est-ce qui m'a donné envie de lire la série de romans jeunesse Les filles au chocolat ?

L'enthousiasme de la gamine de 5ème ultra fan de l'adaptation en BD, lorsqu'elle a entrepris de me résumer le début ? Ou la façon dont le collègue avec qui j'étais à ce moment-là a toisé son album lu, relu et corné ? Sans doute les deux... La condescendance est l'une des nombreuses plaies purulentes de la nature humaine (et de l'Education Nationale, au passage). 

L'histoire 

Cathy Cassidy nous raconte le quotidien d'une famille recomposée originale à tous points de vue : Charlotte et Paddy sont deux artistes qui ont fait leur vie de leur côté avant de se retrouver pour gérer une sorte de gîte à Kitnor, un petit village anglais situé en bord de mer. La situation a poussé les quatre filles de Charlotte à accueillir une "5ème soeur" en la personne de Cherry, la fille de Paddy. Depuis que ce dernier s'est lancé dans la fabrication de chocolats artisanaux, le bed and breakfast a gagné en notoriété et les enfants _qui n'en seront bientôt plus_ doivent s'acclimater au succès naissant ; toutes mettent la main à la pâte dans la joie et la bonne humeur, mais chacune a ses propres tourments, plus ou moins bien cachés. Il pleut aussi dans le monde des Bisounours ! 

La série compte pour l'instant 9 tomes, mais elle n'est pas terminée ; chaque livre est bien la suite du précédent, mais sa narratrice ou son narrateur change. L'histoire est racontée soit par une fille de la famille Tanberry, soit par un de leurs proches. Cela permet d'avoir différents points de vue et cela nous fait prendre conscience de la différence qu'il peut y avoir entre ce qu'on laisse paraître et ce qu'on pense vraiment. 

Les filles au chocolat - 1 - Coeur Cerise (2010)

Une nouvelle vie commence pour Cherry, 13 ans : au revoir l'Écosse où elle vivait modestement avec Paddy, son père, et cap sur Kitnor, un petit village anglais situé en bord de mer. 

Tous deux vont s'installer chez la nouvelle copine de Paddy : elle s'appelle Charlotte, elle tient un bed and breakfast toujours blindé de touristes, elle est très sympa MAIS elle a déjà quatre filles à peu près de l'âge de Cherry. Alors forcément, cette dernière stresse un peu et craint de ne pas trouver sa place dans cette nouvelle famille aux allures parfaites. D'autant plus que ses complexes et son envie de plaire aux autres l'amènent à mythonner comme pas deux, au point de se fourrer dans ses situations délicates ! 

Si les petites Coco, Skye et Summer font un bon accueil à Cherry, Honey est bien décidée à lui mettre la misère. En effet, l'aînée ne digère pas le divorce de ses parents et aimerait bien voir les deux pièces rapportées rentrer dans leurs pénates. Les vacances d'été s'annoncent agitées !  

Ajoutez à cela une caravane de gitans, un beau gosse avec une guitare, des projets de chocolaterie artisanale, des adultes en mode bisounours et du crêpage de chignon (soft)... et vous avez les bases d'une série jeunesse dont on comprend le succès. 

Les filles au chocolat - 2 - Coeur Guimauve

Skye Tanberry prend le relais de l'histoire, qui débute sur la soirée d'Halloween, soit quelques semaines après les dernières événements de Coeur Cerise. Skye est l'une des deux jumelles. Plus discrète, moins "parfaite" que Summer, la danseuse qui illumine son monde, elle peine parfois à imposer son point de vue dans cette grande famille et préfère se réfugier dans ses rêves. Jusqu'à présent, cela ne lui posait pas de problème, mais maintenant qu'elle grandit, elle commence à l'admettre : Summer lui fait de l'ombre. Pour elle, c'est une souffrance de voir ses meilleurs amis la délaisser pour sa jumelle plus populaire. 

Mais voilà encore autre chose : Charlotte et Paddy ont retrouvé dans le grenier du gîte une malle contenant les effets personnels de Clara, une ancêtre de la famille disparue tragiquement. Skye est friande de vieilleries et de mystères, et elle récupère des vieilles robes et un paquet de lettres. Peu après, elle est prise de visions étranges et se demande si elle ne serait pas un peu possédée par l'esprit de Clara. 

L'histoire est racontée par une fille de douze ans, le ton du livre est donc inévitablement plus enfantin que le précédent. Du coup, j'ai un peu moins accroché, mais il reste très agréable à lire. Il est notamment intéressant parce qu'il parle de l'évolution de la relation de deux sœurs jumelles qui se ressemblent de moins en moins, et qui ont l'impression de ne plus vraiment se connaître. Le petit côté fantastique est très bien dosé ! 

Les filles au chocolat - 3 - Coeur Mandarine

C'est bientôt l'été à Kitnor, et les vacances s'annoncent bien remplies pour toute la famille : Charlotte et Paddy partent en voyage de noces au Pérou, laissant le bed and breakfast et l'atelier entre les mains de la gentille Mamie Kate ; au même moment, une équipe de tournage investit les lieux et commence à réaliser un documentaire sur la chocolaterie artisanale de Paddy. Les filles se réjouissent de l'animation que tout cela suscite, sauf Summer. En effet, la jumelle de Skye doit bientôt passer une audition pour intégrer une prestigieuse école de danse, et elle se met beaucoup de pression pour réaliser son rêve. Même si son talent n'est plus à démontrer, elle n'est jamais satisfaite de ses prestations, et s'agace de ne pas pouvoir contrôler tous les paramètres.. à commencer par l'évolution de son corps.

Ce troisième tome est un poil anxiogène _normal, puisque c'est la stressée de la famille qui raconte, mais il a l'intérêt de décrire l'installation progressive d'un trouble alimentaire chez un jeune, vue de l'intérieur. 


Les filles au chocolat - 3 1/2 - Coeur salé

Enchaînons avec Coeur Salé. Cette fois-ci, le jeune Shay Fletcher qui nous raconte sa vie trépidante de lycéen moyen, gêné dans ses moindres mouvements par un père oppressant. 

On peut dire que Shay fait presque partie de la famille Tanberry : il est quand même sorti avec deux des cinq sœurs, ce qui crée des liens. Et ça vaut bien un tome à soi - qui n'est d'ailleurs pas le numéro 4, mais bien le "3 1/2 : peut-être est-ce une sorte de spin-off que Cathy Cassidy n'avait pas prévu de sortir, à la base ? 



En ce moment, le musicien en herbe est dans la tourmente : il a été approché par une maison de disques mais son père a refusé en bloc le contrat alléchant qui lui était proposé. Il ne peut guère compter sur le soutien de son frère, chouchou des parents et voué à prendre la direction du centre aquatique familial, un jour. Sa copine Cherry Costello était son rayon de soleil, jusqu'à ce que Honey, l'aînée des Tanberry, non contente d'avoir manqué de cramer la grange familiale en découvrant les joies de la clopes quelques mois plus tôt, ne vienne semer la discorde entre eux. 

En gros, rien ne va plus. Mais pas de panique : dans Les Filles au chocolat, tout finit toujours par s'arranger. 

Coeur Salé nous éclaire sur un personnage secondaire qu'on avait un peu oublié depuis le premier volet ; ce chapitre, plus expéditif _et donc forcément moins profond que les précédents_ traite des tensions entre parents et enfants lorsque ces derniers veulent prendre le contrôle de leur vie. 

Bon, j'ai apprécié beaucoup plus que je ne m'y attendais la lecture destinée à un public jeune mais beaucoup moins niais qu'on pourrait le croire. Cathy Cassidy traite bien de l'acclimatation à un nouvel environnement, de l'ajustement relationnel qui s'impose lorsqu'on intègre un groupe _l'élève fan est en famille d'accueil, elle a dû s'y retrouver_, de gérer l'hostilité viscérale qui se dégage d'une personne. 

On a quand même un peu l'impression d'être dans les Sims par moments : les parents sont d'accord pour tout _et ne gueulent même pas vraiment lorsqu'une gamine de 11 ans loue une pelleteuse pour faire un bassin au poisson rouge. Vas-y que ça bouffe du chocolat et des pancakes H24. Ces excès vont d'ailleurs exaspérer Summer, lorsqu'elle va tomber dans l'anorexie. Le copain de Honey vit quasiment chez eux et c'est lui qu'on appelle lorsqu'il faut gérer ses colères... Tout ça n'est pas très réaliste, certes, mais, par les temps qui courent, une histoire dégoulinante de sucre est toujours bonne à prendre.      

Voilà une série moins girly qu'on ne pourrait le croire en regardant la couverture des livres (mais ça l'est un peu quand même), aussi addictive qu'un sac de bonbons : on sait que ça ne va pas nous apporter grand chose d'un point de vue nutritionnel, mais on y revient toujours, irrésistiblement. 


Références des livres : 

Cathy CASSIDY. Les filles au chocolat - 1 - Coeur Cerise. Nathan, 2011

Cathy CASSIDY. Les filles au chocolat - 2 - Coeur Guimauve. Nathan, 2012

Cathy CASSIDY. Les filles au chocolat - 3 - Coeur Mandarine. Nathan, 2012

Cathy CASSIDY. Les filles au chocolat - 3 1/2 - Coeur Salé. Nathan, 2013



  


mardi 16 juillet 2024

[Concours lecture 6ème] Mouche et le manicou - Elisa Vix / Elisa Laget (2015)

Mouche et le manicou

Elisa Vix  (texte), Elisa Laget (illustrations) - 2015 

Oskar éditeur, Coll. Ottokar


Des parents divorcés + des vacances en Martinique + un furet qui pue (et qui fait plein de conneries) = une belle histoire de Noël ! 

Noémie et Max vont passer les vacances de Noël chez leur père, récemment installé en Martinique. Sur place, ils font la connaissance de Josiane sa nouvelle copine, et de son fils Michel. 

Les problèmes commencent lorsque les adultes constatent que Mouche fait aussi partie du voyage : Mouche, c'est le furet apprivoisé de Noémie. Il a beau être sociable et très intelligent, on a tendance à surtout retenir de lui qu'il sent la mort et chaparde la bouffe. 

Aussi, quand au petit matin la famille constate que le frigo a été mis sens dessus dessous durant la nuit, Mouche devient le suspect numéro 1, et le père menace de l'enfermer dans une cage. Hors de question qu'on en arrive là pour Noémie, qui est par ailleurs convaincue de l'innocence de son furet sur ce coup-là. Avec l'aide de Michel, elle part en quête du vrai coupable. Leurs investigations vont les mener dans l'antre l'Alphonsine, la sorcière vaudou. 

Une histoire pleine de mignonnerie, avec moins d'aventure qu'on ne pourrait s'y attendre au vu de la couverture, mais qui arrive en 50 p. à nous peindre un décor martiniquais et une intrigue cohérente. Ma foi, c'est honnête ! 

CDI Collège : OK, plutôt pour les 6ème : Mouche et le manicou reste quand même un livre destiné aux enfants

Un titre à proposer dans le cadre de projets (avec des CM2, des UPE2A, ou encore des élèves dys), car la police de caractères et les illustrations, toujours judicieusement insérées, permettront aux lecteurs de rester bien accrochés à l'histoire, quel que soit leur niveau. D'ailleurs, on l'a mis dans la sélection du concours lecture 6°/5° de l'année prochaine. 

Thèmes : amitié / famille recomposée / animal de compagnie / Martinique 

Petit exercice, pour ceux qui voudraient l'étudier en classe (niveau fin de primaire / 6ème)

dimanche 14 juillet 2024

[Concours lecture 6ème] Né coupable - Florence Cadier (2020)

Avez-vous déjà entendu parler de George Stinney, et de la terrible injustice dont il fut victime ?

Mars 1944, Caroline du Sud. Tous les regards sont tournés vers l'Europe et la guerre ; on espère un retour rapide et victorieux des soldats américains. George a 14 ans, il vit paisiblement avec ses parents et ses frères et soeurs dans le quartier noir de la petite ville d'Alcolu. Un après-midi, alors qu'il promène la vache familiale, George croise deux fillettes blanches qui font une balade à vélo. Ils discutent quelques instants, mais très vite, leurs chemins se séparent. 

Sauf que les petites filles ne rentreront jamais chez elles et seront retrouvées mortes le lendemain. Aussitôt soupçonné du meurtre, George est arrêté, molesté, emprisonné... bien qu'il n'y ait aucune preuve contre lui. Il clame son innocence, mais les policiers sont trop contents d'avoir trouvé rapidement le coupable idéal pour se permettre de le relâcher. Au bout de quelques jours, il finissent par lui extorquer des aveux. 

A l'extérieur, les avis sont partagés, comme l'est la société américaine en pleine ségrégation : beaucoup demandent une mise à mort rapide, d'autres, moins nombreux et plus téméraires, veulent que les droits de George soient respectés, et qu'une vraie enquête soit menée. 

Malheureusement, à cette époque _et peut-être encore aujourd'hui..._ certaines voix comptent plus que d'autres. 

Né coupable a beau être écrit pour les jeunes lecteurs _on décèle même de la mignonnerie dans les premiers chapitres_ il n'en demeure pas moins inspiré d'une histoire vraie qui finit cruellement. Comme le texte est accessible, on compte le proposer aux 6° avec dans le cadre du concours de lecture... mais le sujet traité et l'issue tragique sont peut-être un peu rudes. Le livre a fait partie de la sélection du prix des Incorruptibles, mais pour le niveau 5°/4°. N'hésitez pas à dire ce que vous en pensez en commentaire.  

En finalement peu de pages (150 environ), Florence Cadier nous raconte bien plus qu'une injustice sur fond de racisme : elle dépeint les failles de toute une société, depuis l'emprise du Klu Klux Klan, jusqu'aux ravages de la peur sur les proches de la famille Stinney, qui deviennent des parias dans leur communauté et n'auront finalement que peu de soutien. 

A lire, donc (mais pas un dimanche soir) ; la mise en parallèle entre la silencieuse descente aux enfers de George et la place que prend le débarquement au même moment dans l'actualité est intéressante. 

CDI collège : OK, avec accompagnement pour les 6ème ; attention, c'est Talents Hauts = on ne prend pas de gants ! 

CDI lycée : le ton sera peut-être enfantin pour les lycéens, mais ça peut être un bon complément pour un travail de recherche sur la peine de mort ou la ségrégation. A regarder avec le documentaire Un coupable idéal de de Lestrade (2001), qui commence à dater mais qui reste efficace. 

Florence Cadier. Né coupable. Talents hauts, 2020. 150p. 



jeudi 11 juillet 2024

[Concours lecture 6ème] Miss Crampon - Claire Castillon (2019)

L'année prochaine, avec des collègues profs de français, on va proposer un concours de lecture à deux classes de 6ème. C'est nous qui nous occupons de faire une sélection éclectique entre romans, BD, mangas. On va bien voir ce que ça donne. 

Voici un compte-rendu de Miss Crampon, écrit par Claire Castillon ; c'est l'un des titres que j'ai proposés. 



"Sur un malentendu, ça peut marcher"


L'histoire

Suzine est une élève de 3ème discrète et appréciée de sa famille et de ses camarades parce qu'elle s'attache toujours à contenter tout le monde. Elle dit et fait ce qu'on attend d'elle sans broncher, souvent au détriment de ses propres envies, et quand lui vient l'idée d'être désagréable ou de manifester son désaccord, elle se mure dans le silence par peur de blesser. 

Le jour où ses deux meilleures amies se disputent, elle est incapable de prendre parti, et finit par se les mettre à dos toutes les deux. La voilà donc rejetée du groupe : c'est exactement ce qu'elle voulait éviter.  

Sous cette situation a priori banale, se cachent de vrais problèmes de fond pour Suzine. Suite à un souci de santé qu'elle a eu dans son enfance (j'en dirai pas plus pour pas spoiler) elle n'a pas confiance en elle et craint de se retrouver isolée. Elle sait que ses camarades sont toxiques, mais au collège il vaut mieux être mal accompagné que seul. Voyant que les brimades et intimidations par SMS montent d'un cran lorsqu'un certain Tom entre en jeu, Suzine commence à mentir son monde afin de se protéger, et au risque de se retrouver prise à son propre piège.

Ne vous attendez ni à assister à des matchs de foot survoltés : Miss Crampon est plutôt psychologique. Cela dit on ne s'ennuie pas pour autant puisque monter des stratégies pour survivre au collège, c'est un sport à part entière. 

Les points positifs : le roman amène subtilement les questions du harcèlement, d'abord nié par l'héroïne qui est aussi la narratrice, et de la discrimination au handicap. 

Les personnages féminins, très divers, sont majoritaires en nombre _ou du moins c'est équilibré. Quant aux garçons, pour une fois qu'ils ne sont pas dépeints comme des brutes épaisses et malveillantes, ils sont plutôt sympas à découvrir. 

Un roman relativement court (200 p), efficace, facile à lire, juste dans l'expression des mécanismes de défense qui se mettent en place dans une tête. 

Les points moins convaincants : la "grande" famille de Suzine _dont les parents sont divorcés_ est peut-être un peu trop parfaite. 

Un livre jeunesse niveau collège

En dépit d'une couverture qui fait un peu "enfant", les 12-15 ans sont bien la cible de ce roman qui a du mal à convaincre les mecs, bizarrement ! Pour l'instant, on ne l'a prêté qu'à des filles. Hâte d'avoir les retours des 6° l'année prochaine ! 

Quiz de lecture pour ceux que ça intéresse...



Claire Castillon. Miss Crampon. Flammarion Jeunesse, 2019. 202 p. ISBN 978-2-0814-3657-2


mardi 9 juillet 2024

[REMEMBER LE COVID] La peste écarlate - Jack London (1912)

Ah, voilà bien longtemps que je n'étais pas revenue par ici ; non pas que j'aie oublié le blog, loin de là ! Simplement, les mots ne sortent pas sur commande, et d'ailleurs c'est bien dommage. A certaines périodes, on bouillonne, on implose même, parfois, de ne pouvoir s'exprimer, alors que c'est notre seul besoin immédiat. Je crois que le mieux est encore de rester patient en se disant que ça reviendra, que ça revient toujours. Plus on s'énerve, plus on rue dans les brancards et moins on n'a de chances de retrouver la clé. C'est hyper frustrant mais c'est ainsi ! 

Je vais essayer de faire une petite sélection de toutes les oeuvres de fiction, quelles que soient leurs formes, qui sont en lien avec cette plaie purulente qui nous affecte depuis plus de quatre ans, et dont on ne peut plus que rire : le Covid, et tous ses cousins fun (les virus, les vaccins, les périodes interminables de confinement). Autant dire qu'il y a de la matière. En voilà une, déjà : 

La Peste écarlate (1912) - Jack London



Photos : édition #Librio 

"Papy, c'était comment avant la peste écarlate ?" 

Dernier survivant d'une pandémie qui a décimé la population mondiale 60 ans plus tôt, un vieil homme raconte sa jeunesse à ses petits enfants. Transmettre ses souvenirs est un défi autant qu'un crève-cœur pour lui, car, faute de cerveaux et de bras, la descendance des rescapés de cette catastrophe sanitaire n'a pu faire mieux de régresser à l'état de chasseurs cueilleurs. Qu'il est difficile pour l'ancien, cultivé, nostalgique de l'électricité et des machines à vapeur, de se faire comprendre de ces jeunes perdus au-delà de dix mots de vocabulaire ! Pourtant, patiemment, en adaptant son langage, il leur raconte tout : sa jeunesse prometteuse à l'université, l'arrivée de la peste, la peur de la mort, les sacrifices inévitables, le retour des bas instincts, la difficile reconstruction dans la dangereuse et sauvage baie de San Francisco.

Un petit roman pas très fun, comme vous vous en doutez, qui nous aurait sans doute moins intrigué il y a quelques années, mais qui gagne à être (re)découvert. On retrouve les thèmes chers à Jack London : la nature, la capacité de l'humanité à passer du raffinement à la bestialité, la dimension sociale... Par contre, ne vous attendez pas à ce qu'on vous explique les causes de la peste et les éventuels remèdes, ce n'est pas le propos ! 

Le + : c'est marrant de voir comment l'auteur imaginait les années 2000... 

Le - : les caractères de l'édition Librio sont vraiment tout petits ! Si le lecteur est motivé, ça passera sans problème, mais un collégien qui entrerait à reculons dans le premier chapitre (forcément descriptif, faut bien tenter de situer 2073 après l'apocalypse...) risque de ne jamais succomber à l'appel de la forêt après ça. Je reste la première fan de la collection à 10F, mais bon ça pique trop les yeux, désolée.