lundi 18 avril 2016

Je compte les petits zozios sur mes doigts - Laurie Cohen ; Marjorie Beal (2016)

Ecrire la critique d'un album de dix pages qui s'adresse à des lecteurs âgés de deux ans (et plus) n'est pas simple ! Merci à Babelio et aux Editions Langue au Chat pour l'envoi de ce beau petit livre, dans le cadre de l'opération Masse Critique. 
A la lecture du titre, j'avoue avoir ressenti un début de reflux oesophagien : en effet, on nous dit souvent qu'il ne sert à rien d'utiliser des mots écorchés pour parler aux jeunes enfants, si ce n'est à les induire en erreur. Or, jusqu'à preuve du contraire, un "zozio", ça n'existe pas plus qu'un "vionvion". Mais passons sur ce détail, il n'est pas nécessaire de jouer les grincheux dès le matin. Admirons plutôt ce bel album de dix pages cartonnées et penchons-nous sur la couverture. On remarquera notamment la cohérence entre l'illustration _une grosse main vert-pomme sur les doigts de laquelle nous allons compter, accompagnée d'un oisillon rouge_, et le titre "Je compte les petit zozios sur mes doigts" : "Je compte" et "sur mes doigts" sont inscrits en vert, dans le but, sans doute, que l'enfant fasse le lien entre le sujet d'apprentissage et la grosse main, 
... qui, au passage, me rappelle...
 Tandis que "les petits zozios" apparaît en lettres attachées rouges, assorties à la robe de l'oiseau posé sur la paluche... Au second plan se dessine une forêt d'arbres multicolores. 
Cette association du texte et de l'illustration par le biais des couleurs accompagnera le lecteur dans sa découverte tout le long de l'histoire ; les aventures des oiseaux malicieux sont découpées en cinq doubles pages consacrées à un chiffre (un, deux, trois, quatre et cinq). Ces cinq "chapitres" sont visibles dès la couverture puisqu'ils constituent chacun un onglet, soit un doigt de la grosse main ; 

UN....
DEUX.... 
... TR.. OUPS !!!
                            
Chaque double page est organisée de la même manière : à gauche, les auteurs nous racontent les aventures des oiseaux. A droite, les représentations du nombre sous quatre formes différentes : à l'aide des doigts de la main, en écriture chiffrée, puis en lettres, avec la bûchette et enfin avec la face de dé correspondante. 

Bien entendu, le nombre d'oiseaux en scène sur la page de gauche correspond au nombre abordé sur la page de droite ; et autant vous dire que plus on est de fous, plus on rit ! Si le "zozio en bateau" semble tout sage dans son embarcation, les "deux zozios avec des parapluies" sont déjà beaucoup plus hardis. Quant aux "trois zozios" qui suivent, ils se mettent carrément faire "les fous", tête à l'envers sur une branche d'arbre... Avançant en double file sur une petite route de campagne, les "quatre zozios en voiture" se prennent un peu pour les kings de la route... 

   

... mais arrivent à destination pour la méga teuf des "cinq zozios à chapeaux" ! Ces petits personnages intrépides _ qui, je trouve, grâce au trait enfantin et attendrissant du dessin, tiennent autant de l'alevin en pleine transformation que de l'oisillon,...




... communiquent leurs joie de vivre aux jeunes lecteurs. Ils font de l'apprentissage des nombres une farandole pleine de couleurs. On notera l'effort fait par ses créateurs pour associer chaque chiffre ou presque à une couleur dominante dans la double page : du rouge pour le un, du bleu pour le deux, du vert pour le trois... Ainsi, l'enfant peut tisser des liens entre une quantité et ses représentations visuelles, et se créer ses propres astuces de mémorisation. 

Je compte les petits zozios sur mes doigts est une première entrée pimentée à point dans le monde des mathématiques ; elle donne envie de compter gaiement de un jusqu'à cinq, et bien au-delà ! Si vous avez un gosse de deux ans ou un peu plus dans votre entourage, tentez l'aventure des "zozios rigolos", ce sera plus original que les Télétubbies et beaucoup moins traumatisant ! 

COHEN, Laurie ; BEAL Marjorie. Je compte les petits zozios sur mes doigts. Ed. Langue au Chat, 2016. ISBN 978-2-806-30688-3. Prix : 9,95 €


lundi 11 avril 2016

dimanche 27 mars 2016

Les Aventuriers de la Mer - 9 - Les marches du trône. Robin Hobb (2007)



Je me suis beaucoup gaussée des gens qui s'arrachaient le dernier tome d'Harry Potter lors de sa sortie en 2007, et encore plus des lecteurs qui ont pleuré en prenant conscience que les aventures du sorcier étaient bel et bien terminées : eh, les mecs, c'est qu'un livre, oh ! A présent, je les comprends parfaitement. Voilà, Les Aventuriers de la Mer ont mis les voiles, ou son rentrés définitivement au port, c'est selon ; dans tous les cas, nous lecteurs, nous nous retrouvons seuls sur le quai, comme des cons. 




Tout est bien qui finit bien, ou pas. 

"Alors, ça finit bien ?
_ Ben, à la base, c'est un bouquin pour les gosses, alors évidemment que ça finit plutôt bien". 

Ma pote Mélanie était une fan de la première heure des romans de J.K Rowling ; elle m'en a tellement rabattue les oreilles lors de nos soirées "appels illimités de 21h à minuit " gracieusement offertes par Orange (ils pouvaient, vu le fric qu'on dépensait en Mobicartes !) que je n'ai eu la force d'attaquer Harry Potter à l'école des sorciers que tout récemment. Oui, elle fait partie de cette génération magique entrée en sixième quasiment la même année que Harry à Poudlard et on peut dire qu'elle a littéralement grandi avec lui. J'en ai pris conscience quand elle m'a répondu avec un certain détachement que oui, elle avait lu le livre comme tous les groupies qui se respectent, mais voilà, quoi.
Le petit binoclard l'avait certes bien aidée à surmonter son adolescence pas toute rose, et elle l'en remerciait, mais depuis, la sorcellerie avait montré ses limites. Face à l'organisation de son mariage programmé l'année suivante, par exemple. 

Du coup, je me suis fait la réflexion qu'il m'avait fallu presque quatre ans pour lire les neuf tomes des Aventuriers de la Mer. Quatre années pendant lesquelles ma vie a changé à plusieurs niveaux, mais sans doute pas autant que celle des personnages de la saga, pour qui un univers entier s'est effondré.

"T'as pas vu mes tongs ?"


Où est-ce qu'on en était ? 
ATTENTION - SPOILER !!!! 

On le comprend au fil des pages : Les marches du trône devient petit à petit le livre de l'"après", de la reconstruction de Terrilville, de la naissance des nouvelles alliances politiques et des projets de vie enfin assumés. Puisqu'on a enfin saisi la nature des liens qui font appartenir serpents, dragons et navires de bois sorcier, autant aller de l'avant ! Les allusions au Royaume des Six-Duchés se font beaucoup plus nombreuses que dans les tomes précédents, comme pour nous inviter à faire la transition vers l'Assassin Royal 7. Quelque part, le lecteur se sent un peu à Angoulême le dernier jour du festival de la BD, quand il n'y a plus personne pour dédicacer son album et que, sous les chapiteaux, les artistes commencent à refaire leurs cartons en scred, désireux de décoller pas trop tard. 

Salut la compagnie !

Sur la plage où il subit les réparations conséquentes à sa tentative de suicide, Parangon livre ses derniers secrets à Ambre et lui apprend par la même occasion qu'Althéa est vraisemblablement à bord de la Vivacia. Le moral de l'équipage remonte aussitôt en flèche car tout le monde la croyait morte, y compris le capitaine Trell. Mais, de son côté, la copine de Brashen est convaincue que la vivenef aveugle a sombré corps et biens. Inconsolable, elle se laisse droguer puis violer par le pirate Kennit. Elle parvient cependant à ranimer l'âme presque éteinte de Vivacia ; ce petit exploit lui donnera assez de gnaque pour crier au viol lorsqu'elle parviendra enfin à quitter la cabine du navire familial. Evidemment, l'équipage de Kennit n'accordera aucune attention à ses accusations, à l'exception d'Etta, qui, en pute d'expérience, lira une vraie douleur dans ses cris d'orfraie. Les marins sont de toute façon occupés à se demander comment ils vont accueillir le Capitaine Rouge qui fonce droit sur eux, avec Malta et le Gouverneur à son bord ! Les voilà enfin, les retrouvailles des Vestrit ; elles s'annoncent explosives... Alors qu'on se réjouit que tous les ingrédients soient enfin réunis pour que ça bastonne dans tous les sens, la dragonne Tintaglia débarque comme un cheveu sur la soupe avec Reyn dans une serre et une bonne dose de connerie dans l'autre. Elle gicle les bipèdes par dessus bord en atterrissant laborieusement sur le pont de la Vivacia, cédant à l'envie de troubler leur petite bagarre.... Kennit commence à paniquer ; mais lorsqu'il voit Parangon arriver droit sur lui, alors qu'il pensait lui avoir fait racler le fond pour de bon, pour la première fois il se sent défaillir. Dites-vous qu'à partir de ce moment-là, c'est parti pour cent pages de folie ! 

Pendant ce temps-là, à Terrilville, Ronica, sa fille, et leurs nouveaux amis du petit peuple boivent des infusions moisies en se demandant, inquiètes, comment ça se passe en mer. Désolée pour ce résumé lapidaire de la situation dans les terres, mais le fait est qu'il ne s'y passe pas grand chose. 


Un p'tit jus ? 


Happy happy end 

J'avoue que je ne pensais pas que Robin Hobb s'attacherait autant à ménager la chèvre et le chou histoire d'assurer une quasi happy end. Kennit meurt, permettant à Parangon de prendre un nouveau départ grâce à sa tête toute relookée par Ambre. Celle-ci a d'ailleurs pris soin de lui sculpter des yeux et de lui prêter l'apparence d'un beau jeune homme au nez cassé. Faut-il y lire une allusion à FitzChevalerie, l'assassin aux multiples cicatrices ? Althéa renonce à son indépendance et vient se coincer d'elle-même sous l'aile protectrice de Brashen Trell ; Malta et Reyn finissent par trouver leur compte dans ce mariage arrangé par le destin. Une crête de reine dragonne a même poussé sur le front de la jeune fille, tandis que son petit frère s'est couvert d'écailles reptiliennes. Les deux en sont fort aise. Les gens du Désert des Pluies tombent le voile, enfin fiers de leurs visages difformes. On a même trouvé une bobonne de consolation à Greg Tenira, le marchant éconduit par Althéa ! Les serpents arrivent enfin sur leur lieu de nidification, guidés par Tintaglia : dragons ont encore de beaux jours devant eux. C'est joyeux, c'est festif, la tension se relâche... ce serait presque trop beau, voire comique si ce n'était pas écrit par Robin Hobb. Mais non, cette fille nous vend tellement du rêve avec son écriture qu'on est juste contents, satisfaits, détendus nous aussi ; et on le serait tout autant si elle nous racontait le forçage des endives au XIX°siècle. Je pense quand même que l'artiste avait la tête à un autre projet lorsqu'elle a écrit ce final digne d'un hyperactif au réveil, et qu'elle était plus pressée que ses lecteurs de ramener les barques au port ; et c'est plus que compréhensible. 

Du coup, certains personnages passent à la trappe un peu vite _Kyle par exemple, qu'on achève vite fait bien fait après l'avoir ressorti de son trou juste pour la forme. En même temps il ne servait plus à rien depuis fort longtemps. Sérille devient copine avec Ronica pour ne pas se retrouver à la rue et arrive plus ou moins à réaliser son rêve de départ : vivre à Terrilville coûte que coûte. On regrettera aussi le traitement léger du viol d'Althéa, qu'elle signale sans être ni écoutée ni crue _pas même Jek ! et qui passera à la flotte à la mort de Kennit... qui ne paiera jamais pour son acte, en fait ! 

Pour l'anecdote, le jour où j'ai terminé Les Aventuriers de la Mer, une de nos élèves de 3ème a emprunté au CDI le tome 1 de L'Assassin Royal, un peu au pif. Je crois qu'elle est tombée dans la marmite d'Umbre Tombétoile depuis, car elle en est maintenant au 6 (soit La Reine solitaire) ! Robin Hobb compte une fan de plus... 


ROBIN HOBB. Les Aventuriers de la Mer, tome 9 "Les Marches du trône". Pygmalion, 2007. 332 p. ISBN 978-2-7564-0121-8

samedi 5 mars 2016

Peindre un perpetuum mobile - Georges Meurant (2013)


Merci à Babelio et aux éditions Kantoken pour l'envoi, dans le cadre de l'opération Masse Critique, de Peindre un perpetuum mobile ; l'ouvrage a été écrit par Georges Meurant et sa publication date de 2013. 

A la réception de ce joli livret comptant une soixantaine de pages à tout casser, j'ai voulu le feuilleter et je suis restée perplexe pour deux raisons : d'une, mon hermétisme face à certaines formes d'arts découragerait un régiment ; pour sûr, il allait être question de cet amoncellement de petits carrés colorés imprimés sur la couverture souple, et ça me piquait déjà les yeux. De deux, les propos tenus étaient écrits en anglais ! Nous voilà bien ! La phase d'affolement passée, chacun remarquera que l'oeuvre est en fait bilingue, et qu'il suffit de retourner l'ouvrage pour le lire en anglais ou en français, selon son choix. Les pages centrales sont des reproductions en couleur des fameuses Huiles sur bois dont l'artiste nous parlera précisément dans Peindre un perpetuum mobile.


En effet, Georges Meurant, peintre belge né en 1948 et plus que jamais en activité, est parvenu en quelques pages à nous parler de sa peinture. Il nous a offert des clés utiles pour l'aborder sans faire fausse route, en prenant soin de rendre hommage à ses sources d'inspiration. 


Les Huiles sur bois représentent une succession de formes géométriques, généralement rectangulaires, aux couleurs variées. Elles donnent un nombre infini de possibilités d'associations de pièces, d'interprétations propres à chacun, de lectures sans début ni fin... comme un "perpetuum mobile". Mais, pour se donner toutes les chances d'apprécier un peu plus qu'un dixième du tableau, il est important de se défaire de notre perception du monde conditionnée par notre culture et de faire preuve d'ouverture d'esprit.    



Le texte de Meurant nous rappelle qu'il est difficile d'associer le peintre belge à un courant artistique de son temps, voire même d'établir un lien entre son travail et ceux des peintres des précédentes décennies. Et pour cause ; ses principales influences sont ce qu'il nomme les "oeuvres de cultures premières", tels que des dessins et des sculptures nés en Afrique des siècles plus tôt ; de ses contemporains, il laissera seulement entendre qu'ils sont trop imprégnés à son goût par la société de consommation dans laquelle ils vivent... Les théoriciens de toutes spécialités (mathématiques, psychologie, esthétique, anthropologie, philosophie) qui se sont frottés à son oeuvre ont eu du fil à retordre ; Meurant cite à plusieurs reprises son ami Jean Guiraud, qui est à l'origine de "l'induction figurale" caractéristique de son oeuvre.  

Y a-t-il un exercice plus difficile, quand on est artiste, que d'expliquer aux autres ce qu'on a voulu faire ? Georges Meurant s'en sort très bien, et arrive à poser des mots précis sur les différentes étapes de sa composition, sur ses techniques, sur l'effet produit, sur ce qu'il a voulu dire et... sur ce qu'il n'a pas voulu dire. Grâce à cette louable démarche, son oeuvre sera rendue accessible à un public qui n'y est pas familier. 

Mon inculture crasse (et assumée) en matière d'art pictural fait que je n'ai sans doute pas tout saisi, mais mon regard sur ces petits rectangles à la fois proches et lointains a changé en bien. N'hésitez pas à signaler, en commentaire, les possibles erreurs de compréhension que j'aurais pu commettre à la lecture de l'ouvrage.

MEURANT, Georges. Peindre un perpetuum mobile. 2013, Kantoken. 78 p. ISBN 978-2-930739-04-5

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lundi 22 février 2016

Les Aventuriers de la Mer - 8 - Ombres et flammes - Robin Hobb (2008)


L'Assassin Royal et les Aventuriers de la Mer m'ont souvent fait rêver ; leurs héros ont toujours eu le don de m'éloigner d'un quotidien qui me déplaisait ; en faisant écho à nos vies, certaines de leurs péripéties ont su nous refiler la pêche. Mais pour la première fois depuis que j'ai attaqué l'oeuvre de Robin Hobb, je suis sortie mal à l'aise de ma lecture. Ombres et flammes, l'avant-dernier volume des Aventuriers de la Mer, donc, est de loin le plus psychologique et le plus tordu de la série.




Où est-ce qu'on en était ?

A Terrilville, l'heure est à la réconciliation entre vrais, faux, nouveaux, anciens marchands, esclaves, frondeurs, riches, pauvres, habitants du Désert des Pluies, chiens, chats... La plupart ont compris que la flotte de Chalcède est "l'ennemie" commune à tous, et que les galères issues de ces contrées ont de grandes chances de paralyser la Baie des Marchands incessamment sous peu. Par chance, un soutien aussi colossal qu'inattendu va permettre aux autochtones de respirer un peu autre chose que la fumée de leurs maisons embrasées : Tintaglia, le dragon femelle libéré de son cocon par Reyn et Malta après des siècles d'emprisonnement. Encore qu'il risque d'y avoir un peu de fumée supplémentaire si on la sollicite. Ne vous y trompez pas ! La bête n'est pas charitable outre-mesure : comprenant qu'elle a absolument besoin des humains pour aménager les cours d'eau et les terres des Rivages Maudits afin de permettre la reproduction et l'éclosion de ses semblables, elle accepte de passer un marché avec eux. Reyn arrivera-t-il à la convaincre de l'accompagner chercher Malta, ballottée quelque part sur les eaux acides du Désert des Pluies ?  

L'île de Partage est témoin de la rencontre autant espérée par les uns que redoutée par les autres entre le Parangon et la Vivacia. Comment Althéa va-t-elle réagir à la transformation de la figure de proue, qui se fait maintenant appeler Foudre ? Kennit parviendra-t-il à regarder dans les yeux le barbu aveugle qui guide le navire fou des Ludchance ? Comment Brashen et Hiémain réussiront-il à réparer les dégâts causés par les révélations et le réveil des souvenirs douloureux ? 

ATTENTION SPOILER 



Chapeau, Robin Hobb. Vous avez bien ficelé votre rosbif. A aucun moment on n'avait deviné un lien quelconque entre le pirate Kennit et la vivenef Parangon. On n'avait encore moins pensé à associer le prénom Kennit au nom "Ludchance". On n'avait relevé qu'une seule fois l'allusion du viol de Kennit par Igrot lorsque le roi des pirates était encore enfant, mais on n'avait jamais tilté que le crime ait pu avoir lieu à bord du Parangon. Ou alors c'est juste moi qui ai un jambon dans l'oeil depuis le début. Dans tous les cas, la situation a de quoi laisser perplexe : pour ne plus être rongé par les meurtrissures du passé, Kennit les a confiées à Parangon avec en même temps que toute sa palette de sentiments, histoire qu'il absorbe le tout. En acceptant, le navire a voué une fidélité éternelle à l'enfant et a endossé toutes ses souffrances, et ce, longtemps après son départ. De son côté, le pirate est devenu l'être froid et insensible qu'on a accompagné dans les sept premiers volumes : à la fois blindé contre la douleur et proprement incapable d'aimer. Aussi comprendra-t-on aisément que sa rencontre avec le bateau des Ludchance puisse le rendre fébrile.     


Tintaglia, la dragonne qui a failli attendre.

Bien que j'aie été, comme je le disais, pas mal dérangée par cette histoire de viol et surtout par le parallèle maladroit avancé à demi mots entre un désir de Kennit pour Althéa, pendant "avouable" d'un désir pour Hiémain, et l'enfance brisée du pirate.. 


Psychologie de comptoir bonjour !! 

... il me semble que l'on doit retenir d'Ombres et flammes l'émancipation du personnage complexe qu'est Tintaglia, le dragon femelle. 

Depuis son éclosion en grande pompes dans la Cité en plein effondrement, Tintaglia s'est montrée méprisante et froide comme la pierre pour tout ce qui n'est pas un dragon ou un serpent de mer. Autant dire qu'elle n'a pas l'intention de parlementer avec les humains, ces petites bêtes insignifiantes qui ne semblent capables de rien sinon d'enrayer le cours de leur espèce. Pourquoi devrait-elle remercier Malta et Reyn de l'avoir libérée de son oeuf de bois ? Après le temps qu'ils ont mis pour y arriver ! Qu'ils s'estiment déjà heureux qu'elle ne les ait pas grillés sur place pour avoir tant traîné ! Si Reyn pense qu'elle ira sillonner le fleuve du Désert des Pluies au nom de la gratitude pour retrouver Malta, cela signifie que les écailles lui ont aussi poussé dans les yeux ! 

Pourtant, la bête n'est pas infaillible dans ce monde qu'elle connaît depuis toujours via ses souvenirs, mais qu'elle commence tout juste à expérimenter ; elle n'ose s'approcher des marais de peur de s'embourber en touchant terre. La pluie fine l'agace tout autant qu'un humain inoffensif. Quant aux serpents de mer encore un peu perdus et dépouillés de la mémoire de leur espèce, ils ne réagissent pas vraiment lorsqu'elle voltige près de la surface. Pire, Tintaglia a souvent l'impression de se prendre de gros vents lorsqu'elle passe près d'eux, et leur indifférence attaque son moral, toute dragonne qu'elle soit. Or l'indifférence, elle n'aime pas, mais pas du tout ! et c'est en toute logique qu'elle devient perméable aux flatteries de Selden ce petit homme pas fini qui ne semble plus vivre que pour chanter ses louanges, et qui se recouvre peu à peu des mêmes écailles reptiliennes que ses semblables de Trois-Noues. 

Mais surtout, elle peut être bien meilleure qu'elle-même n'ose se l'avouer ; la dame "des Trois Règnes" s'abaisse au niveau d'un serpent mourant freiné dans sa migration à cause du manque de profondeur du fleuve (Chapitre 1, "Alliances") et l'encourage gentiment avant de l'achever, à la demande du malheureux rampant. Sa bonté de coeur s'étendra même jusqu'à une fine tranche de l'espèce humaine, dont elle a certes besoin pour vivre et faire vivre ses descendants, mais qu'elle affectionne aussi quoi qu'elle en dise. 

Allez jeter un oeil ici, c'est super beau

Qui ne connaît pas une Tintaglia égoïste, imbue d'elle-même, capricieuse et colérique quand on s'oppose à sa volonté ? Une bête à la peau dure qui vient se nourrir de votre coeur et donne ce qui reste aux poissons, en vous disant au passage que le goût c'était pas top !, et que ne vous reverrez plus, le jour où elle aura trouvé ailleurs un casse-croûte satisfaisant ? Une vieille carne que vous aimez malgré tout car vous savez bien que, sous les écailles qui puent la marée, elle a emmuré un coeur d'or. Bien sûr, vous avez maudit ce coeur dès la minute où vous l'avez entrevu, car vous avez compris qu'il n'était pas pour vous ; aussi auriez-vous sans doute préféré qu'il n'existe pas.    

Je ne sais pas pourquoi certains passages du billet apparaissent en rouge. Désolée !      


ROBIN HOBB. Les Aventuriers de la Mer, tome 8 "Ombres et flammes". J'ai Lu, 2008. 377 p. ISBN 978-2-290-00474-6

samedi 13 février 2016

Parcours initiatiques. Angelot du Lac - Yvan Pommaux - Version intégrale (2010)


Dans Les Chemins de Yélimané, le jeune Yaté était parti bon gré mal gré sur les traces de ses ancêtres, une histoire de coeur foireuse dans le baluchon. A l'occasion, Bertrand Solet nous avait montré qu'on pouvait très bien écrire des romans pour la jeunesse et aborder des sujets sérieux, pour ne pas dire des "questions socialement vives", sans nécessairement donner aux lecteurs l'envie de se pendre. Je vous propose aujourd'hui de nous accrocher à cette bouffée d'optimisme en cette période d'après-fêtes déprimante par nature et même de la prolonger avec un autre ouvrage : Angelot du Lac d'Yvan Pommaux _auteur jeunesse dont la réputation n'est plus à faire. 


Angelot du Lac... 

Ah ah, ce beau jeu de mots sur fond de référence à Lancelot du Lac m'a laissée perplexe dans un premier temps ; la couverture, quant à elle, a été cause de nostalgie. Je ne sais pas si c'est parce que l'association du rouge et du jaune palot m'ont fait penser aux vieux livres pour enfants qui traînaient chez mémé et dans la ferme de Mauzac, ou si c'est plutôt la faute d'Angelot. Le petit bonhomme à fronde qui nous défie du regard sur ce gros album BD cartonné m'a fait penser au héros du Faucon Déniché, roman où l'action se déroule au temps des châteaux forts, et qui a longtemps été à la classe de 5° ce qu'Antigone est à la classe 3°. Nous l'avions lu en oeuvre intégrale avec la gentille et potentiellement bordélisable Mme Poulain. Qu'elle repose en paix à présent. 

Bref, hormis le fait que ce soit plutôt chelou d'éprouver de la nostalgie face à un bouquin flambant neuf que je n'ai jamais vu, je crois avoir dit que ce livre avait l'avantage de n'être pas déprimant, donc haut les coeurs !




Angelot est un orphelin parmi tant d'autres, à l'époque tumultueuse de la guerre de Cent Ans. Il a été recueilli encore bébé par une bande d'enfants livrés à eux-même dans une forêt pleine de loups. Les gamins vivotent comme ils peuvent de maraude et d'autres menus larcins, mais leur union fait leur force. "Angelot" parce que Coline, l'une des filles de la fine équipe, lui trouve un visage d'ange lorsqu'elle décide de le prendre sous son aile. "Du Lac", parce qu'il l'ont trouvé près d'un lac. Ainsi l'enfant passe-t-il les premières années de sa vie au calme finalement, chouchouté par Ythier, Girard, Coline, Margot et Le Ventru. Au fil du temps, il développe un certain talent pour le tir à la fronde et en fera son arme de prédilection, bien que le brave Ythier lui apprenne aussi les bases de la baston à coup de bâton. 

Mais n'est pas Gabrielle qui veut !
Or, la joyeuse bande est un jour rattrapée par la situation politique du pays et se retrouve coincée au milieu d'une bataille entre chevaliers Français et Anglais : surpris, les enfants partent chacun de leur côté pour ne pas se prendre un coup d'épée ou une ruade. Angelot se retrouve seul pour de bon, et pour la première fois de sa vie... mais il n'aura pas l'occasion de déprimer ! Au programme à l'issue du chaos, une course solitaire effrénée pour la survie tout d'abord, mais surtout pour retrouver sa famille de coeur ! 

Prenez bien votre souffle à la page 34 de cette intégrale des aventures d'Angelot car vous n'aurez plus l'occasion de le faire avant la fin ! Le "Prince de la fronde" va rencontrer successivement des adjuvants, tels que le chevalier et le comédien Jehan, mais aussi de drôles de filous contre qui il lui faudra jouer de la caillasse.   



Parcours initiatique 

Angelot du Lac est un peu l'histoire d'un cordon ombilical qui s'effiloche avant de se couper complètement. Brutalement séparé de Coline et Ythier, deux adolescents qu'il considère comme ses parents malgré leur jeune âge, l'enfant trouvé va tenter par tous les moyens de reconstituer son cocon familial ; et il y parvient d'ailleurs assez rapidement. Mais il se rend compte au moment des retrouvailles, après avoir sauvé Coline de la prison où elle était enfermée à tort pour sorcellerie, que ses jeunes protecteurs ont une relation autre que fraternelle. Angelot se sent alors exclu de leurs rapports privilégiés et fugue, mort de jalousie, sans doute rattrapé par une sorte de complexe d'Oedipe déformé, ou simplement échaudé de ne pas avoir été au centre de l'attention l'espace de quelques secondes.

C'est ainsi qu'Angelot tourne une page de sa vie et en prend le contrôle par la même occasion. Il offre ses services à Eustache, Comte du Forez, ce chevalier bienveillant rencontré lors de la fameuse bataille en pleine forêt ; il devient vite un écuyer habile. Au cours de leurs aventures, ils feront notamment la connaissance d'Agnès, une pauvre petite fille riche promise à un homme qu'elle ne connaît pas. Inutile de dire que le prince de la fronde s'en fait aussitôt le justicier, bien que la blondinette soit pimbêche comme pas deux. Puis leurs aventures les amèneront à défendre une bête féroce, à se frotter aux pirates pour enfin... devenir les acteurs principaux du dramaturge Jehan de Meudon, dit "Songe Creux".

Sans vouloir spoiler, disons simplement qu'à la fin de l'album, la boucle se boucle. Angelot du Lac s'apaise, calmé par la vie, et semble avoir trouvé un sens à son existence. Une vraie BD d'apprentissage.





Formation accélérée  

Oui, plus forte que cette auto-école bordelaise qui proposait d'obtenir son permis B en une semaine, la vitesse de progression de l'enfant trouvé (mais trop gâté) défie toute concurrence. Les péripéties d'Angelot et de ses compagnons de l'instant s'enchaînent à un rythme très soutenu _peut-être un peu trop ; à peine s'est-il dépêtré d'une situation tendue qu'une autre embûche lui tombe sur le nez, avec son lot de nouveaux personnages. Le lecteur n'a pas intérêt à relâcher son attention sur une ou deux vignettes, au risque d'être vite largué ! On pourra regretter de ne pas avoir eu le temps de s'attacher à certains personnages secondaires, tels que le moine et sa dame sarrasine, ou Béatrix, la petite paysanne qui s'amourache d'Angelot. C'était un risque à prendre... Mais ne perdons pas de vue que cette intégrale est le regroupement d'une trilogie, elle-même parue en plusieurs épisodes dans Astrapi. On comprend mieux cet empressement général qui régit le petit monde d'Angelot du Lac.



Dossier pédagogique 

Yvan Pommaux s'est montré très pédagogue sans pour autant nous proposer un cours sur la société médiévale transposé en vignettes : il a choisi d'ouvrir son album par la genèse du personnage et de l'oeuvre, et de le clôturer par un dossier concis mais efficace sur les grandes phases qui ponctuent le Moyen-Age, de l'an 500 jusqu'à la Guerre de Cent Ans, terrain de jeu du héros. Un glossaire illustré d'extraits de la BD fait le point sur un vocabulaire propre à la littérature médiévale, sur lequel les profs de français et d'histoire pourront jeter un oeil avec plaisir, eux aussi. Ainsi les jeunes lecteurs y trouveront les explications dont ils ont besoin mais ne seront pas empêchés dans leur découverte par d'innombrables notes en bas de page (ou de vignette). Ils apprécieront par la même occasion, je pense, la clarté d'une oeuvre faite de cases larges et aérées, où les protagonistes échangent via des bulles gonflées d'une belle écriture... de cahier, presque ; et bien que je ne sois pas fan de la coloration des planches _trop fade à mon goût, je reconnais qu'elle nous épargne la noirceur des scènes nocturnes et participe à la bonne lisibilité de l'ensemble.



De l'action, de l'humour (bon, les blagues du lanceur de cailloux ne sont pas la force de cette BD, avouons-le), de la joie de vivre, des retrouvailles émouvantes, pas de cul, pas de suicide, pas de torture, pas de maladie grave : Angelot du Lac file la pêche et devrait permettre à pas mal de collégiens de passer le temps de la meilleure des manières. Sans pour autant trop s'attacher aux personnages dont la complexité humaine n'était pas la première préoccupation de l'auteur, on l'a bien compris. Verdict la semaine prochaine !


POMMAUX, Yvan. Angelot du Lac. 2010, Bayard Editions. 180 p. ISBN 978-2-7470-3222-3



samedi 9 janvier 2016

Les Aventuriers de la Mer - 7 - Le seigneur des Trois Règnes - Robin Hobb (2006)


100 % Intercités 


Le Seigneur des Trois Règnes, septième tome des Aventuriers de la Mer, a été lu à dans le train dans son intégralité. Entre les accès de somnolence, les enfants qui réagissent comme ils peuvent à l'obligation d'être assis pendant trois heures, un chien ultra-allergène couché sur mes pieds, des voisins qui réalisent qu'ils se sont trompés de voiture, descendent leurs valises de la galerie, partent et reviennent cinq minutes plus tard parce qu'on leur a piqué leurs places entre temps, et surtout mon absence totale de concentration, il est possible que j'aie loupé quelques passages du livre... Donc désolée par avance pour les éventuelles erreurs d'interprétation du livre. Cela dit, il me semble avoir retenu l'essentiel : le brouillard s'est levé sur la plupart des personnages, et tous y voient beaucoup plus clair sur leur destin hors du commun. Est-ce une bonne nouvelle ? Rien n'est moins sûr, car les révélations en cascade annoncent forcément une fin proche !





Où est-ce qu'on en était ? 

Pour ceux qui débarquent, petit rappel de l'histoire ici. Sinon, vous trouverez sans peine sur Internet les informations de base grâce à des dizaines de blogueurs plus connaisseurs que moi.

Voguant au gré du fleuve sur un canot de fortune, Malta regrette déjà d'avoir sauvé la vie du Gouverneur et de la Compagne Keki, tant ils montrent peu de gratitude à son égard. Pire, elle est l'objet de reproches et de moqueries ; autant dire que la jeune marchande va vite leur rappeler que sans elle, ils figureraient parmi les victimes du tremblement de terre qui a détruit Trois Noues et la Cité des Anciens. Mais une rencontre malheureuse va la guérir définitivement de son altruisme... Son petit frère Selden et son futur mari Reyn Khuprus ont quant à eux évité le pire grâce à la reconnaissance de Tintaglia, ce fameux dragon femelle qui hantait leurs nuits depuis sa prison de bois : elle les as extirpés des décombres de la cité en ruines en les portant dans ses pattes griffues pour les déposer en lieu sûr. Keffria s'apprête à regagner Terrilville pour en savoir plus sur les plans des Nouveaux Marchands.


Elle compte bien y retrouver sa mère Ronica et Rache, leur servante et amie. Ces dernières ont élu domicile chez Davad Restart (avec l'accord plus ou moins franc de la Compagne Sérille) afin de rassembler les preuves de l'innocence du marchand à la double veste dans un éventuel complot contre les Premiers Marchands ; et par la même occasion, dédouaner la famille Vestrit de tout soupçon. Beaucoup la regardent de travers, mais peu lui importe : elle n'a plus grand chose à perdre de toute façon.

Hiémain s'est quasiment noyé dans les souvenirs de Celle-Qui-Se-Souvient en la sauvant de sa prison, et parasite Vivacia ; la figure de proue prend conscience du lourd secret de sa fabrication : va-t-elle survivre à cette révélation ? Kennit est trop près du but pour la laisser filer...
A bord du Parangon, Brashen et Althéa bataillent pour conserver la distance nécessaire au bon déroulement du voyage ; ils savent que Lavoy, le second, profitera du moindre signe de faiblesse pour soulever l'équipage contre eux.

Adaptation BD des Aventuriers de la mer, t1, Soleil 2013. Alwett / Dimat / Vincent 


"Madame, ça se dit, "la dragonne" ?" - le réveil des filles opprimées.  

(Question d'une élève de 5ème, occupée à dessiner des personnages typiques de la fantasy.)

A l'image de Tintaglia prenant son envol après avoir passé des années confinée dans son cocon de bois sorcier, les seconds couteaux, les femmes dites "faibles" et les esclaves sortent discrètement de leur trou. D'un coup, on sent que le salut viendra de leur aide inattendue. Jani Khuprus comprend que son fils n'était peut-être pas aussi fou qu'elle l'aurait cru : le dragon de ses rêves existait bel et bien. Malta la mijaurée, la capricieuse, la bonne à rien _si ce n'est à se mirer ! fait enfin preuve de courage et de réflexion... pour le meilleur et pour le pire. Keffria semble toujours aussi décidée à causer politique avec les Marchands de sa terre natale.

Débarrassée du Gouverneur, Sérille a pris la tête de Terrilville. N'ayant pas l'habitude de diriger un peuple, elle essaie d'asseoir son autorité auprès des nouveaux Marchands, surtout ceux qui ont assez de charisme et d'influence pour constituer un véritable appui. Mais elle n'y parvient pas toujours ; le viol qu'elle a subi lors de la traversée en mer l'amenant à Terrilville l'a rendue fragile et lui a fait perdre toute confiance en ses semblables. Si bien qu'elle n'apprécie que modérément les irruptions imprévisibles de Ronica dans son bureau. Cette vieille femme qui ne cesse d'appuyer là où ça fait mal pour dénoncer les débordements des nouvelles familles marchandes ne lui dit rien qui vaille. De son côté, Ronica chasse tous les complexes d'infériorité qui pourraient être dû à sa déchéance financière et sociale, et s'affirme au contraire, en proposant des pistes pour reconstruire la ville, en condamnant vivement certains et en clamant son innocence auprès des autres. Sérille lui semble bien frêle sous sa carapace de cheftaine ; elle est prise entre agacement et pitié pour la jeune Compagne de Coeur du Gouverneur Cosgo. La matriarche des Vestrit se découvre toutefois des alliés de poids par l'intermédiaire de Rache : les anciens esclaves de Terrilville. 

En mer, les turbulences s'enchaînent à bord de la Vivacia et du Parangon. Hiémain se retape contre toute attente, au détriment de la figure de proue, désormais habitée d'un nouvel esprit... Comme beaucoup de femmes dans ce volet des Aventuriers de la mer, Etta commet un acte qui sera lourd de conséquences. Brashen a la peur de sa vie lorsque le Parangon est attaqué par un vaisseau pirate et qu'Althéa tente de s'élancer dans la mêlée ; il l'écarte maladroitement du danger, la ramenant sans le vouloir à sa condition de femme qu'elle voudrait bien faire oublier à bord _contrairement à Jek, la fille libre et toujours ouverte (dans tous les sens du terme). Elle entre dans une colère noire, dont le capitaine ne saisit pas aussitôt la cause...

Dragon Ball. (Ah ah ah)


Pourquoi L'Assassin Royal et Les Aventuriers de la mer n'ont-ils jamais été adaptés au cinéma (à ma connaissance) ? Sans doute parce que ces oeuvres sont beaucoup trop psychologiques pour qu'une version animée ou filmée ne masque pas une partie au moins des impressions, intuitions, possessions d'esprit et autres combat mentaux qui font leur force... C'est décidément le cas dans ce septième tome : après un cheminement intérieur qui les a conduites à réfléchir sur leur statut _ô combien mineur_ dans leur société, les femmes se rebellent à leur manière, en fonction de leur caractère, et prennent la main sur l'action... A suivre, plus que jamais.


ROBIN HOBB. Les Aventuriers de la Mer, tome 7 "Le Seigneur des Trois Règnes". J'ai Lu, 2006. 377 p. ISBN 978-2-290-00473-9