A l'école, en bonne fragile, j'ai toujours fait en sorte de me mettre bien avec des copines grandes, costaud, et/ou fortes en gueule. Bien sûr, ce n'était pas forcément voulu ; les associations se faisaient naturellement, régies par l'instinct de survie, et je pense que ça fonctionnait parce que mes protectrices avaient besoin de se sentir dans ce rôle-là. C'est toujours valorisant d'être nécessaire à quelqu'un d'inoffensif, et puis ça donne un sens aux journées, à un âge où on navigue à vue.
Toujours est-il que cette technique m'a permis de passer ma scolarité sans jamais être emmerdée, alors que je répondais à tous les critères de la victime idéale.
Allez, un petit manga qui parle de suicide pour bien amorcer l'automne !
My broken Mariko
Tout d'abord merci à toute l'équipe des libraires fous de l'excellent podcast BD Le Gaufrier, car c'est en écoutant l'épisode 54 que j'ai appris la sortie de My broken Mariko, un one shot de Waka Hirako.
Ce titre avait attiré mon attention car en présentant leur sélection du jour, l'un des animateurs avait fourché et dit "moricaud" au lieu de Mariko, ce qui avait généré un fou rire chez les intervenants _et chez moi aussi, d'ailleurs, alors que j'étais en train de courir. Du coup, j'avais fini mon parcours avec ce vieux hoquet qui te brûle le dos et qui met plus de temps à te quitter que la plupart de tes ex !
L'histoire
Maltraitée par son père et abandonnée par sa mère, la gentille Mariko avait fini par se briser de l'intérieur et Tomo la grande gueule s'était fait une mission de la protéger.
Depuis leur adolescence, elle la tenait ainsi à bout de bras, l'empêchant de s'auto-détruire, s'efforçant de la garder éloignée des types violents.
Malgré tous ses efforts, Mariko s'est suicidée, à 26 ans, au moment où tout semblait aller mieux, et maintenant Tomo est sous le choc.
En proie à la tristesse, à la culpabilité de n'avoir pas vu le coup venir, elle pète un câble et décide qu'elle fera ses adieux à sa meilleure amie comme il se doit, faute d'avoir pu empêcher de pire de se produire.
Tomo se rend chez le père de Mariko, largue toute sa colère sur lui en lui renvoyant ses crimes à la gueule, et dérobe les cendres de la défunte. Galvanisée par la réussite de son expédition, elle prend quelques affaires, l'urne funéraire et monte dans un bus en direction de la Pointe de Marigaoka, un patelin en bord de mer où Mariko et elle avaient prévu d'aller en vacances, un jour.
C'est le début d'un road trip déroutant mené par une fille encore incapable de quitter l'état second destructeur dans lequel sa peine la maintient.
Tomo perdante et perdue
Si le périple de Tomo est parsemé de nombreux flashbacks qui nous en disent long sur la jeunesse catastrophique en tous points de la jeunes Mariko, on ne sait finalement pas grand chose sur sa meilleure amie protectrice. Grande gueule et intrépide, elle n'en est pas moins fragile et mal entourée : après tout, elle affirme à plusieurs reprises n'avoir "que Mariko", ce qui laisse penser qu'elle n'est pas très bien entourée elle non plus. Que ce soit dans les séquences souvenirs ou dans sa vie d'adulte, Tomo apparaît toujours seule ; il n'est presque jamais fait mention de sa famille ou d'autres amis. A présent coincée dans un boulot stressant qui n'a pas l'air d'être un aboutissement professionnel pour elle, elle n'arrive pas à se défaire de ce soupçon de loose qui la suit partout, collé sous sa semelle comme un vieux chewing-gume. A plusieurs reprises en lisant le manga, j'ai eu l'impression que son obstination à vouloir sauver sa copine était une façon de combler un vide dans sa propre existence.
La voir mourir après des années passées à essayer de la faire vivre lui laisse un goût amer de ratage total et d'injustice _puisqu'après tout, le principal responsable de la dépression de Mariko est plus vivant que jamais. Même si les critiques que j'ai pu lire et regarder ne semblent pas l'interpréter ainsi, il me semble que My broken Mariko est vraiment centré sur le drame de Tomo ; d'ailleurs, l'action ne pourrait se mouvoir sans sa colère dévastatrice contre tout et tout le monde. Y compris contre Mariko elle-même, qui s'est "sauvée" en l'abandonnant à sa souffrance.
Prozac d'or mérité !
L'énorme succès de ce manga est complètement justifié ! OK, c'est une histoire très triste et émouvante comme on pouvait s'y attendre, abordant des sujets très graves, et pourtant on ne se sent pas plombé en le lisant. Tomo a une rage et une énergie communicatives, et son personnage de fumeuse compulsive survoltée à quelque chose de comique, parfois. Ses traits m'ont même fait penser vite fait à l'Agrippine de Claire Bretécher.
My Broken Mariko raconte très bien la détresse de la survivante malheureuse d'un binôme fusionnel qui a tout fait pour empêcher la fin tragique de l'autre et qui doit composer avec son échec.
Un manga pour lycéens et adultes, pas pour les plus jeunes !
Manga découvert grâce au super podcast BD #legaufrier
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Waka Hirako
Ki-oon seinen - 2020
Deux salles, deux ambiances !
On enchaîne avec le premier tome d'une série de mangas beaucoup plus légère : Les Vacances de Jésus & Bouddha.
Hikaru Nakamura
Kurokawa, 2008
Fatigués par le passage à l'an 2000 qui leur a donné beaucoup de travail, Jésus et Bouddha ont décidé de s'accorder des vacances 🌴 sur Terre.
C'est donc en touristes qu'ils posent leurs valises au Japon, en ce début de 21ème siècle. Ils louent un appartement et s'immergent avec curiosité dans la foule des humains qu'ils ne connaissent que "vus du ciel".
On suit donc leur quotidien, entre les aléas de la colocation, les rues animées, les festivals traditionnels japonais, le métro et la piscine.
Pas vraiment d'intrigue dans ce premier tome de la série, mais pour le coup, ce n'est pas gênant : voir Bouddha et Jésus aller de déconvenues en émerveillement tels deux étudiants paumés nous ravit déjà pleinement ! 😀
Comme pouvaient le laisser présager son titre et sa couverture, les Vacances de Jésus et Bouddha est un manga comique, qui joue beaucoup sur les quiproquos entre les deux "figures divines" et les humains qu'ils croisent...
Si le titre vous chiffonne, détendez-vous ! Toutes les religions sont respectées, d'ailleurs on n'en parle pas tant que ça ! Ici, les blagues ne sont jamais fondées sur le mépris du bouddhisme ou du christianisme. Au pire, si comme moi vous n'êtes pas trop calé sur la vie de Siddhartha et de Jésus, vous apprendrez deux ou trois trucs au passage !
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