Comme dans n'importe quel métier, on ne fait pas d'omelette sans casser des oeufs quand on est documentaliste en établissement scolaire. Soit on choisit de présenter le CDI comme un lieu hostile à toute vie humaine et par conséquent toujours bien rangé, soit on tolère la présence d'enfants tout en s'exposant au risque de trouver quelques livres en bordel dans les rayons malgré l'ambiance studieuse et un bref rappel du mode de classement en début d'heure. Le cas échéant, nous voilà face à deux nouvelles options : la réaction épidermique suivie d'une remise en ordre immédiate (mais quels boulets !! c'est pourtant pas si dur l'alphabet ! qu'est-ce qu'ils ont été me mettre un conte dans les romans ces p'tits cons), ou la réaction positive : si les documents sont mal classés, cela veut dire qu'ils ont été feuilletés, regardés, délaissés, voire lus ! Enfin ne rêvons pas trop quand même. Faisons plutôt preuve de curiosité et penchons-nous sur ce qu'ils ont laissé traîner.
Ce matin, j'ai ainsi récupéré trois livres après le passage d'un groupe de quinze ( eh franchement, CA VA ) :
Ajoutons aux deux artistes impliqués dans la réalisation de l'ouvrage la contribution vocale de Benoît Allemane, puisqu'il s'agit d'un livre-CD. Paru chez Gallimard, Antonio Vivaldi fait partie de la collection "Jeunesse Musique".
"As-tu déjà construit un instrument de musique ? Avec un roseau, on peut faire une petite flûte..." Oui, et avec du châtaigner aussi. J'ai en tête cet après-midi chaud et orageux où la mémé n'en finissait plus de faire son café. Elle m'avait promis de m'accompagner dans les bois derrière la maison pour couper une branche et me fabriquer un pipeau ; mais avant, il fallait bien faire le café, puisqu'on était dimanche après-midi ! La cafetière fumait comme une locomotive asthmatique en crachouillant des gouttes brûlantes, mais le niveau d'eau ne semblait pas baisser. Parfois, la mémé poussait le vice à en verser un peu plus dans le réservoir, provoquant de petites explosions vaporeuses. Finalement, elle avait tenu sa promesse et avait vidé au couteau un tronçon de branche bien souple _ à tel point qu'elle s'était loupée, transformant d'un coup la flûte en sifflet. Le sifflet ne sifflait pas, mais il venait d'elle ; il était joli et avait bon goût. Puis il a fini par pourrir, inévitablement, comme toute chose, comme tout le monde, et comme elle aussi.
"As-tu déjà construit un instrument de musique ? Avec un roseau, on peut faire une petite flûte..." Oui, et avec du châtaigner aussi. J'ai en tête cet après-midi chaud et orageux où la mémé n'en finissait plus de faire son café. Elle m'avait promis de m'accompagner dans les bois derrière la maison pour couper une branche et me fabriquer un pipeau ; mais avant, il fallait bien faire le café, puisqu'on était dimanche après-midi ! La cafetière fumait comme une locomotive asthmatique en crachouillant des gouttes brûlantes, mais le niveau d'eau ne semblait pas baisser. Parfois, la mémé poussait le vice à en verser un peu plus dans le réservoir, provoquant de petites explosions vaporeuses. Finalement, elle avait tenu sa promesse et avait vidé au couteau un tronçon de branche bien souple _ à tel point qu'elle s'était loupée, transformant d'un coup la flûte en sifflet. Le sifflet ne sifflait pas, mais il venait d'elle ; il était joli et avait bon goût. Puis il a fini par pourrir, inévitablement, comme toute chose, comme tout le monde, et comme elle aussi.
Je m'égare.
L'album retrace la vie du musicien italien de façon synthétique mais néanmoins complète ; chaque double page est consacrée à une étape de sa progression personnelle ou artistique, et fait mention d'une de ses compositions majeures. Je suppose que dans le même temps, le CD nous permet d'écouter le morceau de musique cité _ mais pour être honnête, je n'ai pas écouté le disque parce qu'on ne l'a pas mis en libre accès. On le prête à l'élève seulement s'il emprunte l'album ou s'il demande à l'écouter sur place, car c'est encore le moyen le plus sûr de le conserver intact et de le conserver tout court, d'ailleurs.
Moi qui n'ai aucune culture musicale, j'ai appris des choses sur le créateur des Quatre saisons qu'on apprécie parfois sans connaître, notamment qu'il était prêtre et roux _d'où son surnom de "prete rosso". Quant au principe du livre audio, signalons qu'il est très demandé par les collégiens, et pas seulement les plus jeunes d'entre eux.
Kidnapping - Jean-Marie Firdion 2002
Le ventre perforé par une violente gastro, Benjamin n'ira pas au collège aujourd'hui et restera seul à la maison, cloué au lit. Il ne sait pas encore que des cambrioleurs ont décidé de visiter la demeure familiale. Décontenancés par la présence de l'enfant, les malfaiteurs l'emmènent avec le butin pour éviter qu'il ne les balance, et pour en tirer une rançon.
Arrivée à la moitié de ce court roman écrit par le sociologue Jean-Marie Firdion, je me suis dit que l'histoire avait un air de déjà vu, ou de déjà lu. La relation quasi fraternelle entre le héros et Paulo, le plus sympathique des trois voleurs, m'a remis en mémoire un vieux roman paru en 1960 intitulé Signé : Alouette de Pierre Véry.
ET LA CEINTURE (bordel) ! |
Kidnapping fait un peu trop vite le tour de la question : "comment se relever d'une agression ?", mais il a l'avantage de traiter le sujet, et ça fait bien plaisir. Evidemment, le roman touchera en priorité les lecteurs qui se sont déjà retrouvés en position de victime, mais l'ouvrage de Jean-Marie Firdion peut être matière à réflexion pour pas mal de collégiens.
Le journal intime de Georgia Nicolson - 3 - Entre mes nunga-nungas, mon coeur balance. Louise Rennison (2002)
Illustrations de la couverture : Claire Bretécher |
Ah ! Ca fait plaisir ! Enfin un Scripto qui ne donne pas envie de se tailler les veines ! Il s'agit ici du troisième volet de la vie trépidante de Georgia, alors j'ai pensé que pour cette fois-ci on serait obligés de s'asseoir sur la présentation des personnages principaux et sur le plantage de décor. Par chance, Bubulle a lu les deux premiers tomes dans sa jeunesse, ce qui m'a permis de me faire une idée du contexte : Georgia, 14 ans, collégienne britannique au nez et aux seins plus proéminents que la moyenne, nous raconte son quotidien aussi ordinaire que drôle et nous plonge dans son environnement familial et amical sans aucune retenue. Entre mes nunga-nungas, mon coeur balance correspond à une période automnale de deux mois environ pendant laquelle Georgia se promène sur un petit nuage, transportée par les appels (sur le fixe familial) de Robbie, alias "Super Canon". Seuls ses "nunga-nungas", ses seins donc, pour ceux qui n'auraient pas encore compris _ la couverture nous aide quand même pas mal_ la maintiennent sur le sol terrien.
"Ah, elle a fini par sortir avec !?" S'est exclamée Bubulle, elle qui s'est arrêtée au tome 2 de cette série qui en compte 10 ! Apparemment c'était mal barré...
Malgré les vacances en Écosse imposées par son père et le sentiment que ses copines n'ont même pas remarqué son absence durant cette période, la fille ne compte pas se laisser abattre et se jette à corps perdu dans une nouvelle grande cause : sauver son chat Angus de la castration. Il serait vraiment dommage que Naomi, la "bombe birmane" des voisins, se détourne du félin à cause de quelques pauvres nuits tapageuses qui ne dérangent que les vieux croûtons. Perturbée par son intérêt croissant pour son pote Dave La Marrade alors que sa relation avec Robbie, un peu plus âgé qu'elle, a toujours un côté énigmatique voire irréel, "Geo" continue l'air de rien à jouer les rebelles du Top Gang dans son école.
Trop "fille" pour moi, désolée !
Publiées il y a une bonne dizaine d'années maintenant par la comédienne et journaliste Louise Rennison, les aventures de Georgia Nicolson ne sont pas dénuées de réalisme : la connerie de la tranche 14/15 dans toute sa splendeur, mais sans le côté glauque (ce qui est appréciable, ma foi) ! Mais c'est aussi la raison pour laquelle je n'ai pas réussi à accrocher à l'histoire, malgré l'attrait de l'écriture chronologique qui facilite bien la lecture. Les copines qui se fritent subtilement pour des mecs avant de se réconcilier et d'enchaîner avec une heure de débat sur l'acné comme si de rien n'était, j'ai malheureusement trop vu, et de trop près ! C'est bien dommage de résumer le cerveau des adolescentes à cela, mais... on ne peut pas non plus ignorer ce côté de leur personnalité.. Évidemment, Louise Rennison tourne fort bien en dérision les scènes d'hystérie hormonale et de maquillage intempestif, mais le chapitre sur les vacances en Écosse n'en demeure pas moins long et pas très drôle. A mon avis, le journal de Georgia peut sonner faux pour les collégiens d'aujourd'hui, car ils trouveront sans doute les protagonistes pas assez trash pour eux. Quant à la richesse de ces expressions hautes en couleur lancées ça et là, qui ont fait le succès de la série, elles risquent de ne plus faire mouche auprès du public actuel. A tester en club lecture, pour voir ! Il faut juste que je vérifie qu'on a les deux premiers au CDI...
Petite bibliographie récapitulative des livres en bordel :
BEAUMONT, Olivier. VOAKE, Charlotte. Antonio Vivaldi. Gallimard. Coll. "Découverte des musiciens". 1999. 27 p. ISBN 2-0705-2868-5
FIRDION, Jean-Marie. Kidnapping. Editions Thierry Magnier. 2002. 95 p. ISBN 2-7511-0041-4
RENNISON, Louise. Entre mes nunga-nungas mon coeur balance. Le Journal intime de Georgia Nicolson. Gallimard. "Scripto". 2002. 153p. ISBN 2-07-055163-6.
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