Un soir, avec Bubulle, on s'est demandé ce qu'on pourrait faire si on se retrouvait avec un cheval mort sur les bras : est-ce qu'on l’incinérerait ? Est-ce qu'on l'enterrerait ? Est-ce qu'on l'offrirait à la mer et à ses poissons après l'avoir déplacé à l'aide d'une grue ?
Sur ces belles pensées, nous nous sommes endormies, et je n'y ai plus guère repensé jusqu'à cet après-midi.
Dans la réserve du CDI, j'ai (encore) trouvé des livres que ma collègue Joséphine n'avait pas eu le temps d'enregistrer dans le catalogue. Au beau milieu des Max et Lili (série à succès en 3°, figurez-vous !), Le cheval qui sourit essayait de se faire tout petit, en espérant que je laisserais moisir dans son carton. Aurais-je du, pour la sécurité des plus sensibles ? Verdict dans quelques jours !
Il suffit de voir la tête des gosses pour deviner l'ambiance.... |
En commençant la lecture de ce petit roman paru dans la collection "Mouche" de l'École des loisirs _ donc destiné à des enfants âgés de 7 à 10 ans, je me suis dit que j'allais bien rigoler. En effet, j'ai bien ri, non seulement parce que c'est ce que je sais faire de mieux après boire de la bière, mais aussi parce que j'ai été fort surprise ! Vous n'êtes pas sans savoir que rien ne provoque aussi bien le fou rire que le choc crée par une situation imprévisible. Mais ce n'est pas le propos.
Je m'attendais à me taper une version dépailletée de "Mon petit poney", c'est un remix gore de Stewball qui s'est présentée à moi. J'exagère à peine.
Comme un noeud dans l'estomac
C'est l'histoire d'un petit village qui se meurt, abandonné au fil des années par sa population. Forcément, l'école se vide elle aussi, au regret du maître d'école. Celui-ci se demande comment faire pour rendre la contrée plus attractive pour les enfants comme pour leur parents : et si on achetait un cheval ?
Évidemment, promener un cheval-mascotte de l'école et du village histoire de donner envie aux gens de rester... Pourquoi n'y avait-on pas pensé plus tôt ?
Mais un cheval, c'est cher, et les parents d'élèves ont moyennement envie de participer à l'achat de la bête... Par chance, l'instituteur est assez généreux pour piocher dans ses propres économies et compléter la somme demandée par le propriétaire du haras local. L'histoire se gâte lorsque l'homme, comprenant que le maître d'école ne connaît absolument rien aux chevaux, empoche les sous et refile à l'école le vieux Bir Hakeim, un canasson gravement malade, pour ne pas dire prêt à crever. Au début, les enfants ne se rendent pas compte de l'état critique dans lequel se trouve l'animal ; ils constatent juste qu'il "sourit", et il ne leur en faut pas plus pour être aux anges. En réalité, ce "sourire" est une grimace de douleur ; il ne le quittera plus jusqu'à son arrivée triomphale à l'école.
C'est alors que le cheval se met à baver méchamment. A l'agonie, il chute lourdement et irrémédiablement dans la cour de récréation, devant les gosses surpris puis effondrés.
Le maître d'école fait appel au vétérinaire, qui suggère d'achever la bête sur le champ, histoire d'abréger ses souffrances. Vraiment ? Tout ça pour ça ? Il n'y a pas d'autre alternative ? Non, mais puisque Bir Hakeim nous a fait une occlusion intestinale, on peut toujours essayer de le déboucher et de le rafistoler, mais ça lui fera sans doute plus de mal que de bien. Le vétérinaire ouvre donc le cheval, lui sort les tripes, les nettoie, les recoud, les remet en place et referme le tout, devant les gosses qui n'en ont pas loupé une miette, évidemment.
On achève bien les chevaux
Non mais, les gens de l'École des loisirs, si vous voulez pousser assez de gosses au suicide pour que le mot "chômage" soit gommé du dictionnaire d'ici quelques années, dites-le clairement ! Plus sérieusement, j'en viens à me dire que ce petit livre a tout à fait sa place au collège, car il apporte une dose de réalisme à un univers souvent teinté de niaiseries ou de puissance guerrière : celui des chevaux ! On n'hésite pas à parler de magouilles et de malhonnêteté dans Le cheval qui sourit : après tout, le propriétaire de Bir Hakeim ne fait rien de moins que rouler dans la farine un instit qui cherche à réaliser un rêve collectif ! C'est une manière comme une autre de plonger les enfants dans la dure réalité... Mais en ont-ils tous vraiment besoin ?
La lueur d'espoir est bel et bien là, même si elle vacille : l'opération des tripes du cheval vient nous rappeler qu'il faut savoir bousculer un peu le destin, jouer le tout pour le tout tant qu'il reste une chance minime de se sortir d'un mauvais pas. Parfois, il faut s'y reprendre à deux ou trois fois. Parfois, la cinquième tentative est la bonne. Parfois, c'est la septième...et c'est encore la plus belle.
Allez, je crois qu'on peut récompenser Chris Donner d'un bon petit Prozac d'Or sur ce coup-là. C'est honnête, non ?
DONNER, Chris. Le cheval qui sourit. L'École des loisirs. Coll. "Mouche". 1992. 67 p. ISBN 2- 211-012-83-3
Illustrations de Philippe Dumas.
La lueur d'espoir est bel et bien là, même si elle vacille : l'opération des tripes du cheval vient nous rappeler qu'il faut savoir bousculer un peu le destin, jouer le tout pour le tout tant qu'il reste une chance minime de se sortir d'un mauvais pas. Parfois, il faut s'y reprendre à deux ou trois fois. Parfois, la cinquième tentative est la bonne. Parfois, c'est la septième...et c'est encore la plus belle.
Allez, je crois qu'on peut récompenser Chris Donner d'un bon petit Prozac d'Or sur ce coup-là. C'est honnête, non ?
DONNER, Chris. Le cheval qui sourit. L'École des loisirs. Coll. "Mouche". 1992. 67 p. ISBN 2- 211-012-83-3
Illustrations de Philippe Dumas.
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